Présentation
Un braqueur professionnel commandite le braquage de la recette d’un
bar-PMU. Les deux hommes qui accomplissent la besogne tuent, sans l’ombre d’une
raison, le patron. L’enquête va peu à peu remonter la piste du commanditaire,
grâce aux efforts conjoints de la police d’Aubervilliers, de la BRB et de la
Brigade criminelle.
Mon avis
J’avais eu une impression très mitigée à la lecture de Quais des enfers il y a de cela trois
ans : l’intrigue m’avait laissée sur ma faim, en revanche j’avais aimé
l’écriture d’Ingrid Astier et sa capacité à créer des atmosphères. J’étais donc
réservée en ouvrant ce deuxième roman. Mon impression est beaucoup plus
positive que pour le premier, au final Angle
mort m’a même emballée. Ce n’était pourtant pas gagné et je dois même
avouer que pendant une bonne moitié de ce gros roman de cinq cents pages, je
n’étais pas enthousiaste, sans savoir pourquoi. C’était d’ailleurs
étrange : à aucun moment Angle mort
ne m’est tombé des mains, à aucun moment je n’ai envisagé de le laisser de
côté, j’étais intéressée mais pas captivée. Ce n’est qu’aux alentours de la
page 300 que j’ai commencé à éprouver ce sentiment si particulier :
l’envie d’avancer rapidement dans ma lecture et la crainte de m’acheminer vers
la fin.
L’intrigue m’a semblé bien plus convaincante que pour le premier roman
d’Ingrid Astier paru à la Série Noire, j’ai apprécié le rythme d’Angle mort, le relais entre les
personnages, les points de vue, la tension narrative que cela créait. J’ai
trouvé l’ouverture du roman saisissante et très maîtrisée dans l’écriture. Par
la suite, le tempo se fait plus lent, avec une progressive montée en puissance,
une accélération. Tout au long du roman, on sait que le final sera un
dénouement de roman noir, mais tout en proposant une issue parfaitement
logique, il reste éblouissant et pas complètement attendu.
J’ai apprécié de retrouver des personnages de Quai des enfers, du côté de la Brigade Fluviale, mais ce n’est ici
qu’un aspect du roman, car Angle mort
fait le choix de nous montrer plusieurs équipes policières qui travaillent sur
la même affaire, en se focalisant sur quelques beaux personnages. Il faut
reconnaître un sacré talent à Ingrid Astier pour brosser ses protagonistes,
aussi bien du côté des criminels que du côté des policiers. Chacun a en
quelques phrases ou en quelques pages une silhouette, une dégaine, une parlure,
et ça marche, sans jamais verser dans un pittoresque pénible. Et si tout cela
reste du roman, la manière dont c’est écrit (ainsi que la liste des remerciements
à la fin) laisse à penser que l’ensemble est plus documenté – je n’ose dire
réaliste – que la moyenne, laissant peu de place aux fantasmes échevelés. Les
jargons des uns et des autres, les procédures, les usages, tout cela est évoqué
avec précision, et donne un côté très « procedural » à Angle mort. C’est d’ailleurs, je pense,
ce qui m’a retenue alors même que je n’arrivais pas à me passionner pour
l’intrigue. J’étais intéressée, tout simplement.
Enfin, une fois de plus, Ingrid Astier excelle à évoquer les lieux et
les hommes qui y vivent, sans angélisme et avec tendresse. Si Paris est encore
présent, avec au premier chef la Seine, Aubervilliers est cette fois le grand
personnage d’Angle mort. Je ne peux juger
du réalisme de l’évocation mais j’avais le sentiment de voir certaines rues, de
palper les atmosphères grâce à l’écriture.
Bref, un roman abordé avec prudence mais qui m’a finalement beaucoup
plu et que je vous recommande vivement.
Le mot de la fin
Un diesel qui se transforme peu à peu en voiture de sport (ouais, je
sais, mais Angle mort, quoi).
Ingrid Astier, Angle mort,
Gallimard/Série Noire, 2013.
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