dimanche 31 décembre 2017

Summer de Monica Sabolo


Présentation (éditeur)
Lors d’un pique-nique au bord du lac Léman, Summer, dix-neuf ans, disparaît. Elle laisse une dernière image  : celle d’une jeune fille blonde courant dans les fougères, short en jean, longues jambes nues. Disparue dans le vent, dans les arbres, dans l’eau. Ou ailleurs  ?
Vingt-cinq ans ont passé. Son frère cadet Benjamin est submergé par le souvenir. Summer surgit dans ses rêves, spectrale et gracieuse, et réveille les secrets d’une famille figée dans le silence et les apparences.
Comment vit-on avec les fantômes  ? Monica Sabolo a écrit un roman puissant, poétique, bouleversant.


Ce que j'en pense
Je n'avais guère d'idée préconçue sur ce roman ou sur Monica Sabolo. J'ai lu Summer sans déplaisir et sans enthousiasme. Une famille bien sous tous rapports au bord du lac Léman, une fille adolescente resplendissante, qui disparaît un beau jour... Je commence par ce qui coince : l'impression de lire un roman déjà écrit des milliers de fois, avec des personnages si souvent vus qu'ils en sont réduits à des clichés. J'ai trouvé qu'hormis le frère, Benjamin, dont nous avons aussi le point de vue vingt-quatre ans plus tard, aucun n'avait d'épaisseur, se réduisant à des stéréotypes... La mère est belle à souhait, le père est charismatique et séduisant, mais tout ce beau monde n'est pas si lisse qu'on pourrait le croire (what a surprise...). Benjamin n'échappe pas totalement aux clichés mais il est du moins plus intéressant, plus profond, plus fouillé, tout simplement. 
J'ai suivi cette histoire sans agacement majeur, mais je n'ai pas été surprise. Et comme les personnages sont à mon sens insuffisamment développés, j'ai trouvé la fin un peu facile, en tout cas la "révélation". 
Pourquoi suis-je allée au bout? Parce que le personnage de Benjamin reste intéressant, dans sa façon d'être hantée par sa soeur, par le lac et ses profondeurs. Parce que je me demandais si Monica Sabolo choisirait une révélation convenue ou non... Parce qu'elle écrit bien. Mais assurément, ce ne sera pas une lecture marquante. 

Monica Sabolo, Summer, J-C. Lattès, 2017. Disponible en ebook.

vendredi 29 décembre 2017

Un regard par-dessus mon épaule (2017)

Image empruntée

Eh bien voilà, 2017 s’achève ou presque… A ce jour j’ai lu durant cette année quelque chose comme 110 livres, avec un rythme très fluctuant. Décembre, sauf surprise de dernière minute et lecture frénétique (mais ça m’est arrivé), ne devrait pas être un gros mois : la relecture de Moon Palace m’a occupée un bon moment et j’ai ensuite eu ma panne de lecture.
Mais regardons en arrière… J’ai fait la liste des livres lus et j’ai réussi à élire LE livre qui m’a marquée dans diverses catégories. Parfois je n’ai pu me résoudre à choisir et j’ai nommé deux ex-aequo… Et certains choix ont été très difficiles à faire, surtout côté romans noirs. Je précise que le roman élu n’est pas toujours une parution de l’année, même si je m'y suis efforcée. Et je n’ai gardé que les romans, car je lis trop peu d’essais (dans le cadre de mes loisirs) pour qu’une sélection ait du sens.

Mais nous y voici (roulements de tambours) :

Le roman jeunesse français :
Là, sans conteste, c’est Clémentine Beauvais et Les petites reines qui remporte haut la main la palme dans mes lectures jeunesse. J’ai vibré, ri, je suis ressortie heureuse et comblée… Les péripéties de ces adolescentes m’ont enthousiasmée, et je ne trouve pas si souvent chez les auteurs jeunesse français cette capacité à poser avec légèreté des questions graves. J’ai aimé ce roman au point que je n’ose rien lire d’autre de Clémentine Beauvais, tant j’ai peur d’être déçue. Idiot ? Sans aucun doute.

Le roman jeunesse étranger
Je n’en ai pas lu énormément cette année. Et par conséquent, c’est Susin Nielsen et On est tous faits de molécules que je retiendrai pour 2017. Un peu comme pour Clémentine Beauvais, j’apprécie cette façon de poser des problèmes familiaux et/ou sociaux avec humour et une forme de légèreté. Je me régale à chaque titre !

Le roman français
Là, impossible de départager deux livres… Il fallait que je sélectionne Vernon Subutex 3, de Virginie Despentes, qui clôt avec force sa trilogie. J’ai A-DO-RE… Je garde un souvenir encore ému du final, qui m’a laissée pantelante, bouche bée. Cette puissance dans la radiographie de l’époque, cette façon qu’a Despentes de faire de la littérature un outil pour donner sens à ce qui n’en a plus, parfois…
Mais il y a un autre livre qui m’a bouleversée, et celui-ci, je ne l’attendais pas. Il s’agit de Un peu tard dans la saison de Jérôme Leroy. Je vous l’avais dit, il est en passe d’entrer dans mon panthéon des « meilleurs livres de tous les temps », ceux que j’ai besoin de relire de temps à autre, qui provoquent en moi une émotion renversante. Je vous dis cela et voilà, j’ai envie de le relire, déjà…

Le roman étranger
Il y en a eu, des magnifiques. J’en retiens deux, l’un paru en 2017 (en France) et un autre, plus ancien mais que j’ai lu récemment et dont l’émotion est encore forte. Dans la forêt de Jean Hegland m’a envoûtée, glacée, donné envie de pleurer, surprise… Je suis passée par des tas d’émotions différentes mais une chose est sûre : j’ai dévoré ce roman. L’autre, plus ancien, est Long week-end de Joyce Maynard. Je n’insiste pas, je vous en ai parlé récemment. Mais je repense à ces personnages…

Le roman noir français
Là aussi, deux ex-aequo, et même comme ça c’est un effort, car j’ai eu tant de belles lectures cette année en noir français : des lectures marrantes (Poulets grillés de S. Hénaff), des lectures qui font rire jaune (La Daronne d’H. Cayre ou Révolution de S. Gendron), de lectures glaçantes (Le Bloc de J. Leroy) des tas de moments forts, mais après moultes réflexions, je retiens ces deux romans. D’abord Minuit à contrejour de S. Raizer, qui clôt magistralement L’alignement des équinoxes. Je sais que je relirai la trilogie en enchaînant la lecture des trois volumes, mais là, retrouver cet univers fou, le nôtre et un peu plus, c’était… magique. Mais j’ai également retenu le dernier Serge Quadruppani, Loups solitaires, parce qu’il allie la noirceur, la drôlerie, la réflexion, le regard politique, et aussi parce que j’ai pensé à mon cher Jean-Patrick Manchette en le lisant…

Le roman noir étranger
Là encore, ce fut difficile… J’ai privilégié une découverte, celle de Todd Robinson, avec Cassandra qui patientait depuis sa sortie dans mon stock et Une affaire d’hommes, sorti cette année, avec les mêmes personnages. C’est émouvant comme un Lehane (le Lehane de Kenzie et Gennaro d’autrefois), déjanté, drôle, je suis fan !

Les nouvelles
Je suis de mauvaise foi, j’ai lu peu de nouvelles cette année, mais je ne pouvais pas ne pas revenir sur ma découverte de Robin MacArthur avec Le cœur sauvage.

Le coup de gueule

Bon et puis juste pour faire ma mauvaise tête, une contre-sélection, avec un roman que je n’ai pas chroniqué (y a des limites), le premier tome de Calendar Girl (janvier) d’Audrey Carlan, saga new-adult à succès. Comme j’essaie de me tenir au courant des nouvelles tendances, j’avais voulu essayer. Je crois qu’à ce moment-là, seuls deux tomes étaient sortis. Comme je n’ai pas envie de lui consacrer trop de lignes, je dirai simplement : stéréotypes sexués et sociaux + érotisme de bas étage = fuyez.

mercredi 27 décembre 2017

Dans la forêt de Jean Hegland


Présentation (éditeur)
Rien n’est plus comme avant : le monde tel qu’on le connaît semble avoir vacillé, plus d’électricité ni d’essence, les trains et les avions ne circulent plus. Des rumeurs courent, les gens fuient. Nell et Eva, dix-sept et dix-huit ans, vivent depuis toujours dans leur maison familiale, au cœur de la forêt. Quand la civilisation s’effondre et que leurs parents disparaissent, elles demeurent seules, bien décidées à survivre. Il leur reste, toujours vivantes, leurs passions de la danse et de la lecture, mais face à l’inconnu, il va falloir apprendre à grandir autrement, à se battre et à faire confiance à la forêt qui les entoure, emplie d’inépuisables richesses.

Ce que j'en pense
Cela faisait un moment que j'avais envie de lire Dans la forêt de Jean Hegland, parce que certains d'entre vous l'avaient chroniqué et aimé, parce que Miss Cornélia avait beaucoup aimé, et puis une amie me l'a offert pour mon anniversaire! Il est arrivé à point nommé, alors que je venais de terminer un roman. Je l'ai lu en deux jours, malgré le travail et la fatigue. Eh oui, ce roman, publié aux USA au milieu des années 1990, est très addictif. Il fallait vraiment toute la force du sommeil pour me faire lâcher le livre. Jean Hegland est d'une efficacité redoutable, car somme toute, dans ce roman (post-)apocalyptique, il n'y a pas d'événement trépidant à longueur de pages. Et pourtant, je ne voulais qu'une chose, savoir ce qui allait arriver, savoir où la romancière m'emmenait. 
La construction est remarquable. Nell est la narratrice, qui reçoit en cadeau un cahier et se met à écrire la chronique de ces jours qui marquent la fin de toutes choses. Le récit de ces jours difficiles est entrecoupé de retours en arrière qui relatent la vie d'avant, quand la vie était "normale". La gradation vers le dénuement, la perte, est très bien orchestrée. 
Je me suis rapidement attachée à Nell et Eva, surtout Nell, je dois dire, mais aussi à leurs parents, notamment au père. Car Dans la forêt est un très beau roman sur l'adolescence, sur le passage à l'âge adulte, sur la famille aussi, sur les liens compliqués qui unissent cette famille qui vit isolée, dans un état de fusion où chacun, pourtant, a sa place propre. Jean Hegland parvient à manier l'émotion sans sombrer dans le pathos, mais je dois dire que Dans la forêt secoue le lecteur. Je suis passée par des tas d'émotions, la peur, car la forêt est à la fois protectrice et menaçante. Je trouve que le roman prend des allures horrifiques, avec les deux soeurs en état de siège, si vulnérables à toutes les menaces, humaines ou non. J'ai également été bouleversée, notamment par la mort du père. Et je suis ressortie de ma lecture avec une angoisse qui m'étreint encore par moments: que ferais-je dans la même situation? Comment survivre? 
C'est l'une des qualités du roman que d'être réaliste. Le roman est post-apocalyptique (ou apocalyptique), dystopique, mais le traitement n'a rien de spectaculaire, et d'ailleurs l'intrigue n'est pas datée: on ne sait à quelle époque précise l'histoire prend place. Le roman est écrit au milieu des années 1990 et évoque des aspects de notre Histoire et de notre société (je parle de l'Occident) qui sont encore d'actualité : l'engagement ruineux des USA dans un conflit armé lointain, l'épuisement des ressources naturelles, la crise économique. Et le cocktail est détonnant, tout déraille, la société sombre étape par étape. Plus de télécommunications, d'internet, bientôt plus d'électricité, plus de services, et ensuite plus de denrées dans le commerce. Le monde sombre dans le chaos. L'approche est ici très américaine, par son aspect survivaliste. Et alors que je ne suis pas sensible au survivalisme, ce roman m'a beaucoup questionnée, angoissée. La fin me fait encore cogiter : refondation ou promesse de la fin? J'ai parfois pensé à ce très beau roman apocalyptique de Karen Walker Thompson, L'âge des miracles, où la jeune héroïne fait l'expérience de la perte, alors que l'apocalypse arrive. L'univers des deux soeurs se rétrécit, spatialement, affectivement, en termes de ressources, jusqu'au dénuement ultime. Ce roman est à la fois terrible, tragique, angoissant, émouvant, et très beau... C'est l'une de mes lectures marquantes de cette année, assurément. 

Jean Hegland, Dans la forêt (Into the Forest), Gallmeister, 2017.Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Josette Chicheportiche. Parution originale: 1996. Disponible en ebook. 

lundi 25 décembre 2017

Vingt-cinq choses à propos de la lectrice que je suis


Readers - PascalCampion sur deviantart.com

Vingt-cinq comme le 25 décembre, jour de Noël… Vingt-cinq remarques égotistes, je le reconnais (vous êtes prévenus).

1. Je ne peux sortir sans avoir un livre avec moi, ou en tout cas cela m’arrive rarement. Désormais c’est souvent ma liseuse que j'embarque et j’avoue que c’est plus simple (elle loge toujours dans mon sac, d’ailleurs quand je choisis un sac, je le vérifie au préalable, on ne rigole pas avec ça). Dans 99% des cas je n’ai pas le temps de sortir mon livre, mais il suffit que je n’en emporte pas avec moi pour éprouver le besoin irrépressible de lire. Récemment, mini-festival avec quatre concerts dans la soirée : le deuxième était barbant, j’ai regretté de ne pas avoir de livre (oui, je peux lire en plein concert, et alors ?).

2. J’aime recevoir des livres en cadeau et tout autant en offrir : réfléchir à quel titre pourrait faire plaisir, choisir, c’est délectable. Espérer faire mouche…

3. Je déteste prêter mes livres, sauf à Babounette, qui pour sa part lit les livres, les respecte et avec qui j'ai toujours plaisir à en parler. La plupart du temps : on ne me rend pas le livre, je perds de vue les gens pile à ce moment-là, ou pire, on me le rend abîmé.

4. Inversement, je n’aime pas beaucoup qu’on me prête un livre alors que je n’ai rien demandé : je perçois ça comme une injonction à lire ce titre-là à ce moment-là, et j’ai horreur de ça. Et ça me pèse tant que je ne l’ai pas lu, parce que je me dis qu’il faut le rendre sans trop tarder. Je suis tellement versatile dans mes envies de lectures… Donc si on me conseille un titre, je note les références et puis c’est marre.

5. Pour les mêmes raisons et après quelques tentatives, je ne fais pas de lectures communes, et pas de challenges contraignants (le seul qui me plaît vraiment est le challenge Pavé de l’été de Brize, même si je ne l’ai pas fait cette année).

6. Je ne vais plus jamais en bibliothèque. Problème de temps, et toujours cette versatilité de mes choix de lectures. Pourtant, j’ai adoré flâner entre les rayons, arriver sans idée arrêtée et découvrir de belles choses… C’est aussi que j’aime moins emprunter des livres à la couverture souple, devenus la règle en rayonnage : pour moi, les livres de bibliothèque étaient spéciaux, ils étaient reliés. Maintenant ils ressemblent à tout et à rien, et sont par conséquent en moins bon état. Cela me reviendra peut-être, qui sait...

7. Après des années d’amour immodéré pour les poches, je suis devenue fan des grands formats. Certes ils sont chers, mais le confort de lecture est grand. Mes Série Noire sont drôlement plus chouettes que les Folio Policier. Mais Folio Policier m’a permis de découvrir des auteurs, hein, je ne dis pas le contraire. Et les poches, c’est plus… petit et moins cher (non, ne me remerciez pas, le caractère informatif de ces lignes est stupéfiant)…

8. J’ai du mal à m’endormir si je n’ai pas lu quelques pages… Ou c’est que vraiment il est trèèès tard, ou que je suis malade.

9. Je regrette la presse littéraire. Je suis lasse de Lire, peut-être à cause des changements éditoriaux (à peine perceptibles mais je vois bien que je n’y trouve plus d’envies nouvelles de lecture, ou trop peu). Le Magazine littéraire ne m’a jamais passionnée et il semble prendre une autre orientation si j’en crois la déclaration d’intention sur leur site… J’ai le souvenir d’un magazine qui me passionnait, Les nouvelles littéraires, je crois, dans les années 1980 : j’avais 13 ans et j’aimais ce format immense. Il y a eu un autre magazine au tournant des années 2000 mais je n’arrive pas à me rappeler son nom (Babounette, tu te souviens, toi?).

10. Longtemps je me suis refusée à jeter des livres. C’était sacrilège. Maintenant je m’en fiche. Je donne à Emmaüs de préférence, mais si un livre est trop abîmé, zou ! poubelle. Même chose si je trouve le livre nul (non je ne citerai personne), avec même une certaine délectation vengeresse : « ah ! tu as cru pouvoir m’infliger ta nullité et t’en tirer ? Va tâter de la peau de banane et du pot de yaourt vide, tu vas moins rigoler ! »

11. Je n’arrive pas à classer mes livres. Il y a pour les romans de vagues principes de classement (par éditeurs/collections pour les polars, ou par ordre alphabétique auteurs), mais au-delà, ça peut être le plus complet désordre : soit parce que je me suis arrêtée au classement par collection et qu’à l’intérieur, c’est n’importe quoi (mes Folio Policier par exemple) soit parce que s’ajoutent de manière incohérente mes acquisitions. Résultat : un joyeux bordel, des temps fous à chercher un titre, que je rachète parfois faute de l’avoir trouvé… (et là bien sûr je retrouve le bouquin)

12. Je déteste qu’on me fasse la lecture à voix haute. J’aime de temps en temps les livres audio, mais quand un proche me fait la lecture, ça m’horripile. Je ne sais pas pourquoi.

13. Je lis de moins en moins les quatrièmes de couverture. J’entends parler, souvent par vous, de livres, je sais de quoi parle le livre dans les grandes lignes, mais il arrive que j’oublie, ou qu’en fait je ne sache rien, et je plonge sans rien savoir, sans rien anticiper, donc. Dernière expérience de ce type, avec un livre dont je ne savais rien de rien : Aquarium de David Vann. Le bonheur pur…

14. J’ai toujours du mal à assumer certaines lectures, quelles que soient mes grandes déclarations.  Oui c’est nul.

15. J’adore savoir ce que lisent les gens quand des lecteurs m’entourent. Et moi qui suis asociale, je pourrais entamer la conversation si je n’avais pas peur de déranger. La semaine dernière, dans une salle d’attente, une jeune femme commençait La Naissance de la tragédie de Nietzsche et une dame d’une cinquantaine d’années s’acheminait vers la fin de Quartier perdu de Modiano… Cela m’a réjoui le cœur.

16. Quand je lis, j’ai horreur qu’on me dérange par des bavardages. Je ne sais pas, qu’est-ce qui ne se voit pas ? Je lis. Je répète : je lis. Cela veut dire : je ne suis pas disponible, circulez… Mais non, certaines personnes (qui à mon avis ne lisent pas) parlent, posent des questions, et bla bla… C’est pour ça que je ne dérange pas les gens que je vois lire, surtout les inconnus, pensez donc.

17. Quand j’étais adolescente, on s’amusait entre copains à faire le questionnaire de Proust (amis snobs, bonsoir). A la question « quel serait votre plus grand malheur ? », je répondais invariablement « devenir aveugle », car je songeais : je ne pourrais plus lire… Insouciance de l’adolescence… Ceci dit, je crois que je pourrais me passer de films et de séries, à la limite de musique, mais de livres… Ouch, ce serait difficile.

18. La question qui m’agace : « toi qui aimes tant lire, pourquoi est-ce que tu n’écris pas ? » M’enfin, y a assez de gens qui publient comme ça, et je n’ai rien à dire, aucune imagination, et qui plus est aucun talent d’écriture.

19. L’un des trucs qui me chiffonnent, et pas qu’un peu, avec le monde de l’édition : que les auteurs soient si mal rémunérés. Sans eux pas de livres. Mais ils sont ceux qui gagnent le moins.

20. J’en ai marre qu’on adapte des romans (en films, en série, en BD). A de très rares exceptions près, le livre est meilleur. Et puis creusez-vous les méninges, messieurs les producteurs et les éditeurs. Y a des scénaristes (même si cette profession n’est guère valorisée en France) : ils ont des idées formidables. En plus je suis de mauvaise foi : si l’adaptation est fidèle, je dis « à quoi ça sert ? » ; si elle est très infidèle, je dis « mais qu’est-ce que tu vas m’adapter ce roman si c’est pour faire n’importe quoi ? ». Insupportable, je vous dis. Quelques adaptations trouvent grâce à mes yeux : Mystic River adapté par Eastwood : c’est du Lehane, et c’est aussi un vrai film d’Eastwood.

21. Plus globalement, j’aimerais que le monde de l’édition soit plus respectueux des auteurs et des lecteurs : en payant mieux les auteurs, les traducteurs, et en payant de vrais correcteurs, parce que les livres et les BD qui ont des coquilles (ou des fautes), c’est de moins en moins rare…

22. Je suis une catastrophe ambulante côté mémoire. J’oublie presque tout : les intrigues, les noms des personnages. Parfois j’oublie même que j’ai lu un livre, et quand je le (re)commence, je finis par me dire : Damned, je l’ai déjà lu. En même temps, ça a un avantage : quand je relis sciemment, je suis ravie et je peux être surprise.

23. Mon envie de lire toujours plus et mes achats parfois frénétiques sont une source de bonheur. Je n’ai aucune honte à voir grandir mon stock déjà monstrueux. J’aime acheter des livres, vos blogs font naître de nouvelles envies, et je cherche les ennuis, par exemple en suivant le Calendrier de l’avent des libraires relayé par Benoît Minville sur Facebook. C’est mon péché mignon, je n’en ai jamais assez, et je ne regrette jamais un achat livresque, même impulsif et irraisonné.

24. Quand je vais dans une ville que je ne connais pas, en France ou à l’étranger, je vais dans les librairies. Alors bien sûr, en Pologne ou en Allemagne, je ne peux acheter de livres, ne parlant pas les langues, mais je regarde, je m’amuse (« oh ! regarde, ils ont traduit machin chose »), et même quand je suis environnée de livres en polonais, je me sens rassurée : les librairies me réconfortent. Y en a qui se sentent bien dans les gares, ou dans les cafés, moi c’est les librairies.

25. Lire ne me réconforte pas en toutes circonstances. Trop souvent, quand je suis soucieuse, angoissée, ou que les ennuis pleuvent, je ne peux pas lire. Mais une chose est certaine : c’est l’un de mes plus grands bonheurs et depuis fort longtemps, que de me laisser absorber par une histoire, séduire par des personnages, emporter par des émotions « pour de faux ». Tourner les pages avec impatience, redouter de finir le livre, trépigner en attendant une suite, guetter la sortie d’un livre tant attendu… Disons que rien n’a été aussi constant dans ma vie depuis que je sais lire, et aussi marquant. C’est une bulle, mais une bulle qui ouvre sur le monde et sur les autres. J’espère que ça va continuer longtemps…

Et vous ?