Présentation éditeur
L’inspecteur Mortka, dit le Kub, a été envoyé à Krotowice, petite ville perdue dans les montagnes. Officiellement, il estlà pour un échange de compétences avec la police locale. Officieusement, il y est pour se mettre au vert après une sale affaire. S’il pense être tranquille et avoir le temps de réfléchir
à l’état de sa vie personnelle, il se trompe lourdement. Quand Marta, onze ans, disparaît, un pédophile est rapidement arrêté, qui reconnaît le viol et le meurtre de la petite. Mais l’enquête est loin d’être terminée : les vieilles mines d’uranium du coin cachent bien des secrets… et peut-être quelques cadavres.
Ce que j'en pense
J'avais beaucoup aimé Pyromane, et Wojciech Chmielarz m'avait laissée sur la perspective de retrouver le Kub à Varsovie, avec en perspective la question de son acolyte et de son comportement conjugal. Quand s'ouvre La Ferme des poupées, c'est à Krotowice qu'on le retrouve, une mise au vert qui fait suite à l'affaire du volume précédent. J'ai aimé ce dépaysement, du personnage aussi bien que du lecteur, dans une petite ville où le crime n'est pas monnaie courante, a priori. A nouvel environnement nouvelles relations, codes sociaux et professionnels différents. Mais surtout, Chmielarz nous promène : il nous lance sur une première piste et l'on se dit qu'il y a là de quoi tenir tout un roman, et puis non, il accélère brusquement et nous faire prendre une autre direction, de façon magistrale. L'auteur joue avec nos attentes et les codes de nombre de polars contemporains : enfants disparues et spectre d'un tueur en série sadique à souhait. Mais ce n'est pas de cela qu'il veut nous parler, car Chmielarz est un auteur de noir et non de thriller : La Ferme aux poupées nous parle du trafic d'êtres humains, de personnages en quête d'un destin plus grand (et d'un portefeuille mieux rempli), du racisme envers les Roms, des errements ordinaires de la police, de la solitude des êtres déplacés ou déclassés. Une fois de plus, la Pologne du XXIè siècle, après le choc de l'entrée dans un système libéral, la perte des repères traditionnels, se donne à lire dans La Ferme aux poupées, à travers les symptômes que sont ces dérives criminelles et délictueuses. Jamais Chmielarz ne caricature, chez lui pas de manichéisme, et les pires ne sont pas toujours ceux que l'on croit. Il y a de beaux portraits dans ce roman, notamment de femmes, tout en nuances et en complexité. Somme toute, personne n'est innocent.
Wojciech Chmielarz, La Ferme aux poupées (Farma Lalek), Agullo, Agullo Noir, 2018. Traduit du polonais par Erik Veaux. Disponible en numérique.