dimanche 22 décembre 2019

Lou après tout, tome 1, de Jérôme Leroy


Présentation de l'éditeur
Une odyssée pré- et postapocalyptique d’un réalisme extrême. Fascinant, remuant, vibrant.
Lorsque la civilisation s’est effondrée, le monde allait mal depuis longtemps. Bouleversements climatiques, émeutes, épidémies inquiétantes et dictatures... c’était un monde en bout de course, où l’on faisait semblant de vivre normalement. Le Grand Effondrement était inévitable, mais nul n’aurait pu imaginer ce qui allait suivre.
Quinze ans plus tard, Lou et Guillaume font partie des survivants. Elle est adolescente, lui a une trentaine d’années. Il l’a recueillie quand elle était toute petite. Réfugiés dans une ancienne villa perchée sur un mont des Flandres, ils savent que le danger peut surgir à tout instant.

Ce que j'en pense
Je suis embêtée. Mon avis est partagé sur ce premier tome. C'est que j'aime énormément les romans de Jérôme Leroy, son écriture, son ton, sa vision du monde. Un peu tard dans la saison est une de mes plus fortes lectures de ces dernières années. Et je dois le préciser aussi avant tout malentendu, je lirai le tome 2 de Lou après tout
Je vais donc commencer par ce que je n'ai pas aimé. Eh bien le récit en forme d'analepse, de flashback, de Guillaume, de sa prime enfance à la rencontre avec Lou (je ne précise pas davantage pour ne pas gâcher le plaisir de ceux qui n'ont pas lu le roman). J'ai trouvé ce récit un peu convenu, prévisible aussi, et... gonflant pour être franche. Je comprends l'intention, surtout pour un jeune lectorat (Lou après tout est à mettre entre les mains des minots dès 13 ans), mais pour l'adulte que je suis, le propos sur l'évolution politique, idéologique, technologique, était un peu lourd et démonstratif, les personnages aussi, les situations itou. Ce n'est que mon ressenti, hein, mais je n'ai retrouvé de l'intérêt qu'au moment où Guillaume rencontre Lou, donc à la fin. Je sais que ce n'est pas forcément ce que Jérôme Leroy a fait ou voulu faire, mais j'ai trouvé qu'il y avait un côté "roman à thèse" et ça m'a agacée et lassée à la fois. 
En revanche, le roman est bon dans son aspect roman d'aventures (apo et post-apo), je ne sais pas non plus si le terme convient, et j'ai aimé la noirceur, pas de concession, pas de facilité, on n'est pas là pour réconforter le lecteur, même s'il est jeune. Je trouve cela réussi et j'ai envie de savoir ce qui arrivera ensuite à Lou. Je suis heureuse qu'il ait fait ce qu'il a fait de Guillaume, ça nous évite des facilités romanesques qui auraient été, il faut le dire, embarrassantes... 
Et puis il faut saluer la singularité de la démarche de Jérôme Leroy. Il n'est pas de ceux qui scindent complètement leur oeuvre, les romans pour les adultes d'un côté, ceux pour la jeunesse de l'autre. Depuis quelques années, il tisse des liens, construit une oeuvre cohérente, avec en perspective la Douceur, que l'on retrouvera, j'en suis certaine, dans le dernier tome de Lou après tout. 
Donc n'oubliez pas : mes réserves sont sans doute liées à ma vision d'adulte, et elles me sont sans doute propres. 

Jérôme Leroy, Lou après tout, tome 1: Le Grand Effondrement, Syros, 2019.

Edit du 24 décembre : j'ai enchaîné avec le tome 2, sur lequel je n'ai aucune réserve. Difficile à lâcher, riche en surprises, il permet de suivre Lou dans la Communauté, et Jérôme Leroy déjoue les attentes, refuse les facilités. Vivement le tome 3!



samedi 14 décembre 2019

Les Brigades du Steam d'Etienne Barillier et de Cécile Duquenne


Présentation éditeur
1910. Un mystérieux complot frappe la France en plein cœur.  Solange Chardon de Tonnerre, l'un des meilleurs éléments de la treizième Brigade mobile d'Aix-en-Provence, perd un ami et un bras. En convalescence dans une clinique secrète, elle doit affronter les fantômes du passé comme les assassins du présent. Auguste Genovesi, jeune recrue et nouveau coéquipier, se retrouve plongé avec elle dans une infernale course contre la montre... un véritable bras de fer entre la France et la Prusse.
L'honneur du pays et sa raison d'être sont en jeu. Heureusement, les deux agents peuvent compter sur les prodiges de la science pour affronter les manigances de l'ennemi, ainsi que sur le soutien du Tigre lui-même : Clemenceau... 


Ce que j'en pense
Je n'avais rien lu de Cécile Duquenne jusqu'à ce jour et pourtant, Les Foulards rouges sont dans mon stock depuis longtemps. Etienne Barillier est LE spécialiste en France du steampunk, et il a aussi publié sur Philip K. Dick et sur Fantômas : j'étais donc ravie de le découvrir en auteur de fiction. 
Et diantre! je me suis régalée avec Les Brigades du Steam, roman steampunk et hommage talentueux à la littérature populaire. J'ai aimé que l'action se déroule à Aix-en-Provence, ça nous change d'une capitale déjà vue de nombreuses fois dans des uchronies ou des romans steampunk. C'est une lecture jubilatoire de bout en bout, encore plus pour qui a fréquenté les romanciers populaires du XIXè siècle et de la Belle Epoque, et pour qui a biberonné aux Brigades du Tigre, grand souvenir télévisuel de mon enfance. Les clins d'oeil sont nombreux à toute cette culture populaire, maniée avec humour et révérence. Quant aux personnages, je les ai adoptés très vite, Auguste et ses maladresses de novice, Solange et son fichu caractère et son côté super-héroïne (en vérité, humaine augmentée, comme on dit). Mais il y a tous les personnages secondaires, qui nous remettent la Commune en tête, l'atmosphère des cafés, et jusqu'au Tigre lui-même! L'action est sans temps mort, ça claque, ça captive son lecteur, qui en redemande. Car oui, je n'espère qu'une chose : retrouver Auguste et Solange dans de nouvelles aventures (avec la voiture du Tigre, hein?). 

Etienne Barillier et Cécile Duquenne, Les Brigades du Steam, ActuSF Editions, 2019. 


lundi 9 décembre 2019

Mon florilège 2019

Image empruntée ici

Alors d'abord entendons-nous bien : mon florilège n'engage que moi, il est subjectif et assumé comme tel, et je ne fais ni distinction ni préférence entre ce qui est du polar, du roman noir ou du roman. Donc ne venez pas me chercher des poux dans la tête avec ça, je vous livre simplement les titres que j'ai lus en 2019 (la plupart parus en 2019 mais certains sortis avant, là aussi, ne venez pas m'enquiquiner) et qui m'ont secouée, ravie, enchantée, bouleversée. 
Allez c'est parti (aucun classement dans ce qui suit).

Les parutions 2019:  
1° Frédéric Paulin, (La guerre est une ruse) Prémices de la chute, Agullo, 2019.
Le choc de l'année, je crois bien, les deux premiers volumes d'un ensemble qui en comptera trois, lus quasiment d'affilée. La puissance de l'écriture et de la vision, alliée à un sens du romanesque incroyable. 

2° Pia Petersen, Paradigma, Equinox, 2019.
Une autre claque de l'année, une vision terrifiante et superbe à la fois : quand le roman noir entre en résonance avec l'actualité sociale, et même si on déplace le propos géographiquement, on reste pantois. C'est un des plus beaux romans noirs que j'aie lus, et pas seulement en 2019.

3° Tiffany McDaniel, L’été où tout a fondu, Joëlle Losfeld, 2019.
Le roman que j'ai le plus conseillé aux abords de l'été, quand les gens me demandaient une idée de lecture pour les vacances. 😈 Z'ont pas dû être déçus, côté lecture de plage... Mais hé ho! je suis pas là pour vous conseiller des lectures mignonnes, faut demander ça à quelqu'un d'autre. 

4° Ernesto Mallo, La conspiration des médiocres, Rivages/Noir, 2019.
Comme la vie est bizarre. A sa sortie, j'avais boudé le premier roman de Mallo paru en France chez Rivages Noir, et sur la foi d'un billet de Jean-Marc Laherrère, j'ai foncé sur celui-ci, une sorte de prequel. Et bon sang de bonsoir, quelle lecture! Ernesto Mallo allie la noirceur sociale et politique à l'émotion romanesque, on en sort pantelant... J'ai aussitôt lu le premier volume, que j'ai cette fois aimé, et je compte bien poursuivre. 

5° Ron Rash, Un silence brutal, Gallimard La Noire, 2019.
Ron Rash n'était pas une découverte mais une confirmation, et de taille. Un silence brutal est une merveille, où l'on retrouve un Ron Rash en grande forme : évocation de la nature, des relations sociales, poésie, tout y est. 

6° Arpad Soltesz, Il était une fois dans l’est, Agullo, 2019.
Encore une claque, pour la rentrée littéraire cette fois. Une plongée dans la noirceur d'un pays pas vraiment libéré de ses démons, une écriture sans concession qui happe pour ne plus vous lâcher jusqu'au bout, une virtuosité dans la construction... 

7° Jordi Ledesma, Ce que la mort nous laisse, Asphalte, 2019. 
Je repense à ce roman, plusieurs semaines après sa lecture. J'y repense pour l'intrigue, ses tragédies, ses drames absurdes, j'y repense pour les atmosphères, si fortes et sombres, pour ce mélange de lumière et de noirceur, j'y repense pour l'écriture... 

8° Franck Bouysse, Né d'aucune femme, La Manufacture de Livres, 2019. 
Ouais bon, pas original mais que voulez-vous, je ne vais pas prétendre à l'originalité juste par principe. Ce fut une sacrée expérience de lecture que ce roman, un éblouissement face à des personnages féminins somptueux et déchirants, avec une écriture d'une justesse et d'une poésie renversantes.

9° Joe Meno, La crête des damnés, Agullo, 2019. 
Une madeleine au goût amer, un portrait sur le vif d'une génération ou d'une certaine jeunesse, et toujours l'écriture solaire de Joe Meno, qui illumine même la plus profonde noirceur. 

10° Caryl Ferey, Paz, Gallimard Série Noire, 2019.
Le retour d'un Caryl Ferey noir à souhait, qui parle d'un pays qu'il connaît bien. Dès le début on est mis au parfum, et ça ne sent pas la rose. C'est brutal, c'est noir, c'est tragique, j'adore.

Punaise que c'est dur d'extraire 10 livres d'une année 2019 si riche... Pardon pour tous ceux qui ne sont pas là, dans cette sélection, et qui pourraient y être... 

Et deux rattrapages...
Maurizio De Giovanni chez Rivages Noir pour le commissaire Ricciardi, une splendeur dont je continue à me délecter puisque je viens de commencer Le Noël du Commissaire Ricciardi. 



Villiam Klimacek, Bratislava 69, été brûlant, Agullo, 2018.
Une merveille que ce roman, dont je sais que je le relirai et que je continuerai à l'offrir. Ce qui me vient à l'esprit plusieurs mois après ma lecture, c'est le mélange d'humanité et de tendresse, en dépit des souffrances infligées par une période difficile de l'Histoire.

Voilà! Il y aura peut-être d'autres lectures somptueuses en 2019, mais dans ce cas je modifierai mon billet, et j'ajouterai...