mercredi 12 janvier 2022

Sens interdits de Chantal Pelletier



Présentation éditeur

2046 en Provence.
Les citoyens, de plus en plus contrôlés (temps d’écran, carnets d’approvisionnement, empreinte carbone, etc.), ont du mal à échapper aux stages de récupération de points de permis de table, aux maisons de redressement alimentaire et au télécoaching punitif.
Des attentats alimentaires, quelques mois plus tôt, ont tué plusieurs fois en France, tandis que la faim taraude les plus démunis et que des milices veillent sur les ambitions économiques des investisseurs chinois. Dans ce monde affolant, les policiers alimentaires Anna Janvier et Ferdinand Pierraud doivent enquêter sur le meurtre d’une femme retrouvée ligotée nue à une chaise devant un festin à l’ancienne, gavée à mort. Ils ne se doutent ni l’un ni l’autre des répercussions que cette enquête va avoir sur leur vie et sur celle de leurs proches...


Ce que j'en pense

Quel plaisir de retrouver les personnages de Chantal Pelletier! Nous les retrouvons deux ans après Nos derniers festins, après les inondations ravageuses de 2044. Et deux ans après la parution du précédent opus, il me semble que le ton se fait plus sombre, plus pessimiste, ou peut-être suis d'humeur moins riante, allez savoir. J'avais déjà été frappée par la vraisemblance de ce que proposait Chantal Pelletier ; au bout de deux ans de pandémie, force est de constater qu'elle ne divague nullement... et cela glace le sang. Est-on si loin de refuser la prise en charge de soins pour des individus n'ayant pas suivi la ligne fixée par les gouvernants? 2046, c'est demain, non?

L'enquête centrale du roman nous permet de retrouver Anna et Ferdinand, Lou et sa tribu, tout ce petit monde étant lié par les découvertes faites par les enquêteurs à la suite de la mort de Tina. C'est un puissant révélateur des dérives de cette société liberticide où seuls comptent les intérêts économiques de quelques uns, tandis que le commun du peuple crève la dalle. 

Comme dans Nos derniers festins, la plume de Chantal Pelletier excelle à évoquer les plaisirs sensuels, qu'ils soient un peu raffinés ou purement régressifs (le plaisir de manger un croissant bien feuilleté et de cueillir les miettes avec le doigt), les plaisirs de la table étant transgressifs dans un monde où la gourmandise est pire qu'un péché : un délit! 

Oserai-je dire que j'ai dévoré ce roman? Oui, et accrochez-vous, parce que les dernières pages vous tordent le coeur, moi en tout cas elles m'ont laissée là, bouleversée. 


Chantal Pelletier, Sens interdits, Gallimard, Série Noire, 2022. 

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