Présentation
Jack revient dans le Nord, le nord des Etats-Unis qu’il a quitté après
l’enquête relatée dans Filles,
lorsqu’il était vigile à l’université, et après le délitement complet de son
mariage. Il passe quelques années dans le sud, et par un beau soir, vient au
secours d’une femme dans un bar : elle n’est pas en danger à proprement
parler, simplement sur le point de se faire humilier par un bellâtre un poil
gigolo. Cette rencontre va le mener à New York, puis dans le nord, dans une petite
ville (imaginaire) nommée Vienna, à la recherche du neveu de cette femme,
Merle. A quelques kilomètres du lieu où il a vécu avec Fanny, il retrouve ses
vieux amis Elway et Sarah, alors qu’Elway se meurt d’une leucémie. Il est temps
de solder les comptes avec les vieux fantômes.
Mon avis
Voilà un roman qui aurait pu s’appeler Fantômes et vous l’aurez compris, ce n’est pas follement gai. Allez
comprendre, je me faisais une joie de retrouver Jack, j’avais été séduite par
l’univers de Filles, par le froid
mordant, le désespoir du personnage, la dureté tragique de Fanny, la quête sans
espoir de ces jeunes disparues. La lecture de Nord m’a un peu moins enthousiasmée, pourtant mon impression en
refermant le roman est très positive.
Une lecture moins enthousiasmante ? Le fait est que la quête de ce
jeune homme est largement éclipsée par le côté à la fois contemplatif et
introspectif de ce retour de Jack sur ses propres traces. Il y a de belles
pages sur ce coin un peu désolé des Etats-Unis, sur la nature puissante, mais
alors que dans Filles, l’enquête
nourrissait le désespoir de Jack, ici elle est un prétexte – y compris pour lui
– à ce retour en arrière, et cela crée un certain déséquilibre. Comme mon
rythme de lecture est encore chaotique (œil de lynx is talking to you), j’ai
parfois été à deux doigts de l’ennui.
Une impression finalement positive ? Oui, parce que le dernier
tiers voit le rythme s’accélérer, l’enquête prend sens, la quête de Jack trouve
certaines réponses, ou du moins les apporte au lecteur. Les comptes se soldent
peu à peu, et Frederick Busch offre même une fin presque satisfaisante. C’est
d’ailleurs intéressant, parce que c’est une fin qui peut ouvrir vers un
troisième volume aussi bien qu’une conclusion satisfaisante : Frederick
Busch étant mort en 2006, un an après la parution de Nord, inutile de préciser qu’il faut l’envisager comme une
conclusion.
J’ai décidément beaucoup de tendresse pour le personnage de Jack, ce mélange de anti-héros de roman noir et d’originalité par rapport aux codes du genre.
Frederick Busch excelle dans la construction, et pour autant que la traduction
s’efforce d’en rendre compte, j’aime l’écriture de cet auteur. Sans fioritures,
sans pathos, mais qui sait en un clin d’œil créer une atmosphère, suggérer un
état d’âme, bouleverser avec peu de mots.
Une dernière chose : je ne vois pas comment on peut aborder Nord sans avoir lu Filles. Difficile de suivre Jack dans son cheminement introspectif
et expiatoire sans connaître son parcours et son chemin de croix. Filles et Nord constituent un diptyque somptueux.
Pour qui ?
Pour les amateurs de noir qui n’ont pas peur des personnages sans
espoir.
Le mot de la fin
Nordique (mais pas scandinave).
Frederick Busch, Nord (North), Gallimard, 2010. Traduit de
l’anglais (Etats-Unis) par Stéphanie Levet. Disponible en Folio Policier. Publication originale : 2005. Lu
en e-book.
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