samedi 10 novembre 2012

Fatale de Ed Brubaker et Sean Phillips



Présentation
Le récit s’ouvre à notre époque, sur les funérailles de Dominic Hank Raines, romancier à succès. Nicolas Lash, héritier de cet ami de son père (interné, nous l’apprenons plus tard), y rencontre la superbe Jo, qui intervient miraculeusement la nuit suivante, alors que Nicolas est la victime d’un cambriolage ultra-violent au domicile du défunt. A partir de ce moment, la narration bascule en 1956 : Josephine, qui ressemble étrangement à Jo, rencontre Hank Raines, journaliste, qui s’intéresse à des meurtres très violents et rituels ; elle est sous l’emprise d’un flic, Walter Booker, qui enquête sur cette série de crimes atroces.

Mon avis
Du duo Sean Phillips/Ed Brubaker, je connaissais la série Criminal (du moins les deux premiers tomes), dont j’ai apprécié le trait et le ton noirs, sans concession. C’est pourquoi, en voyant un nouvel opus nommé Fatale, je n’ai pas résisté. Mon impression est assez mitigée, mais penche tout de même du côté du positif. Je ne suis pas une spécialiste des arts graphiques, donc mon analyse sera peu technique.
Côté dessin, il n’y a pas grand-chose à redire : hormis quelques cases un peu moins réussies que les autres, l’ensemble est du grand art. On retrouve ici le trait de Sean Phillips, tout en ombres, au trait (de contour) un peu épais, qui pour moi travaille plus sur l’atmosphère que sur un rendu vraiment réaliste. L’ambiance est digne des films noirs, à la fois dans la peinture des lieux, bas-fonds, bars et rues sombres, et dans les portraits de personnages, au point que je vois – peut-être à tort – des références dans certaines cases. Je n’ai pu m’empêcher de penser à La Comtesse aux pieds nus dans la toute première case, et la vénéneuse Joséphine me fait penser, dans certaines cases, par le cadrage, les couleurs, à Ava Gardner.
Côté scénario, j’ai été plus déconcertée, sans doute influencée par ma lecture de Criminal. Fatale, conformément aux attentes suscitées par son titre, convoque les codes du roman/film noir : femme fatale, flics corrompus et perdus, hommes déboussolés et affolés par la créature somptueuse qu’est Jo, ambiance glauque, secrets, tout y est, dans un scénario assez complexe, qui superpose les époques. Mais Ed Brubaker injecte une bonne dose de fantastique, pour ne pas dire d’horreur : l’enquête tourne autour de meurtres qui semblent être le fait de membres d’une secte satanique, et de fait, le Malin rôde, le mystère s’épaissit autour de Jo (je ne veux pas en dire plus). Rien de surprenant ici, me direz-vous, on a déjà vu cela, ne serait-ce que dans certains romans/films noirs (je pense par exemple à l’excellent roman de William Hjörtsberg, Le sabbat dans Central Park, adapté au cinéma par Alan Parker sous le titre de Angel Heart) et dans nombre de fictions populaires. Pourtant, je suis un peu décontenancée au terme de la lecture de ce volume, parce que je ne saisis pas le propos : que nous dit ce récit si compliqué ? où nous emmène Ed Brubaker ? Pour le moment, je suis dubitative. Cependant, il ne s’agit que du premier volume, qui rassemble les cinq premiers « chapitres » (les premiers numéros ou « issues »), et l’on peut parier que Brubaker va développer cet univers, lui donner sens dans les épisodes à venir. Il est donc peut-être normal que je reste un peu sur ma faim.
Je reste confiante, d’autant que je ne peux que reconnaître l’immense talent du duo.

Pour qui ?
Pour les amateurs de bons comics. Pour ceux qui aiment les BD noires.

Le mot de la fin
A suivre de près !
Ed Brubaker, Sean Phillips, Fatale, vol. 1 Death Chases Me, Image Comics, 2012. Contribution de Dave Stewart (color.)
A noter : le volume 2 est annoncé pour février 2013 (en anglais).

Disponible en V.F. chez Delcourt (2012) sous le titre Fatale, vol. 1 La mort aux trousses. Je préfère d’ailleurs la couverture française (qui était la couverture de l’un des numéros originaux).

Aucun commentaire: