jeudi 13 août 2020
Des lendemains qui hantent de Alain Van Der Eecken
Présentation éditeur
C’est la veille des vacances de Noël, au tournant de l’an 2000. Quelques jours plus tôt, l’Erika a fait naufrage au large de Penmarch, répandant une pâte bitumeuse sur les côtes de la Bretagne. À l’insu des instituts de météorologie, une gigantesque tempête se forme au large de Terre-Neuve et s’apprête à franchir l’Atlantique pour frapper l’Europe. Martial, lui, se hâte de quitter le tribunal de grande instance de Souvré, où il travaille comme greffier. Il a promis d’aller chercher son fils à l’école. Lulu veut que ses copains voient la nouvelle voiture de son père, avec la roue de secours fixée sur la porte arrière. Il vient d’avoir sept ans. Alors que les parents s’avancent dans la cour, on entend des pétards, une série d’explosions, peut-être des gamins qui fêtent le début des vacances ? Lorsqu’une institutrice surgit et s’effondre, ensanglantée, Martial comprend. Au péril de sa vie, alors que la police entre très rapidement en action, il réussit à atteindre son fils et, croit-il, à le mettre en sécurité. Son existence, en réalité, vient de basculer irrémédiablement.
Ce que j'en pense
Acheté à sa sortie, ce roman a enfin trouvé son moment. Il commence très fort, par une scène de violence et de mort magnifiquement écrite. Là où un mauvais romancier aurait ensuite pris le chemin du pathos, Alain Van Der Eecken fait le choix du roman noir certes pétri de douleur, mais sans larmoiement à la noix, sans chercher à faire pleurer dans les chaumières. Martial n'est pas un personnage attendrissant, au sens habituel du terme, et c'est bien plus fort : il est habité par la volonté de comprendre ce qui s'est passé, ce qui a conduit à la mort de son enfant, et on le voit tour à tour agité par la peur de savoir, l'envie de se venger, la volonté de mourir. C'est un personnage extrêmement réussi mais ce n'est pas ce qui m'a séduite le plus dans ce roman : non, ce que j'ai savouré, c'est la galerie de personnages qui l'entourent. Le juge Micoulon, pour commencer, qui va aider Martial dans sa quête de vérité, là où la justice considère que somme toute, il n'y a pas d'affaire, ou une affaire close. Cette relation entre le juge et son greffier, le rangement si singulier, les débordements inattendus de jurons chez cet homme si policé, tout cela, tour à tour, touche, amuse, car Des lendemains qui hantent n'est pas dénué d'humour. Et puis il y a Achenbauer, ce flic jadis brillant qui a échoué là sans qu'on sache pourquoi. Le personnage prend toute son ampleur quand il se fois affublé d'une acolyte singulière, Lally : ces deux-là, ensemble, sont irrésistibles, et pour tout vous dire, j'adorerais que l'auteur les utilise à nouveau dans un roman. Leurs relations démarrent mal, mais leurs escarmouches sont savoureuses, et bon sang, ils font des étincelles. Et puis il y a la famille que se recompose Martial, avec Angèle et Régis, qui a l'incongruité d'un personnage vargassien.
Sur fond de tempête de 1999 et de naufrage de l'Erika, Alain Van Der Eecken livre un bien beau roman noir, sans jamais sombrer dans la facilité. C'est pour moi une découverte, et sans doute lirai-je le précédent roman de l'auteur, paru en 2016.
Alain Van Der Eecken, Des lendemains qui hantent, Editions du Rouergue, 2020.
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