dimanche 20 septembre 2015

Itinéraire d'une lectrice gâtée 2

S01 E02: Les mystérieux livres verts et autres livres de mon enfance.

Image empruntée ici

Mes parents n'étaient pas - ne sont toujours pas - des lecteurs, même si mon père lisait occasionnellement de la BD quand j'étais enfant. Pas de livres à la maison, donc, pas de bibliothèque. Pourtant, dans le bureau de mon père, il y avait des étagères, et parmi les documents de comptabilité, un rayonnage supportait de grands et lourds livres à la reliure verte, sans la moindre indication. Mon père me le disait et me le répétait, se méfiant sans doute de la lectrice accro que j'étais déjà : "on ne touche pas à ces livres, c'est interdit."
Vous pensez bien que j'étais intriguée. Mais comme j'étais une enfant docile, je n'ai pas touché à ces livres et leur pouvoir de fascination en était d'autant plus grand. C'était des livres de grand, et gare à moi si j'y touchais. Oh! je ne redoutais pas d'être maudite sur trois générations ou changée en statue de sel. Non, je craignais le courroux paternel, c'était suffisant. 
J'ai donc grandi en regardant ces livres verts à chaque fois que je rentrais dans le bureau. Toutes ces années, je faisais feu de tout bois pour me procurer ma dose. 

Côté récits illustrés: 
Si les Martine faisaient l’objet d’un achat hebdomadaire et d’une collection passionnée, j’ai aussi croisé Caroline (avec ses couettes blondes), Oui-Oui, puis Fantômette et enfin Alice. J'étais une grande fan de la détective: je voulais un serre-tête comme elle, m'habiller comme elle (quelle horreur!). Mon amour du roman policier est sans doute à chercher dans Alice... J'en ai relu un l'an dernier, c'est nunuche et Alice n'a en fait aucune personnalité (c'est une sorte de coquille vide), mais reste le bonheur de cette lecture enfantine. Sans compter que le titre français est à lui seul un énorme spoiler (ALICE ET LES FAUX-MONNAYEURS), mais passons.
Sur cette couverture, on voit bien ce que j'enviais au look d'Alice...

Côté presse enfantine:
A l’époque, c’était Pif contre Mickey. Je me souviens de mon premier numéro du Journal de Mickey. Je pense que j’étais en CM1, la couverture était sur fond rouge, et j’étais si emballée que j’ai apporté mon numéro à l’école. J’avais déjà ce côté fétichiste: de même que je traînais ma poupée du moment avec moi, ou ma petite voiture (j’adorais jouer aux petites voitures), j’embarquais partout mes livres et revues. Cela ne m’a pas quittée: j’embarque volontiers ma liseuse, même en concert (on ne sait jamais!). Bref, l’institutrice (old school) m’a confisqué mon numéro. Son mari, adjoint communiste au maire, n’avait pas dû beaucoup aimer cette incursion de Mickey dans sa classe, ça se comprend. Selon les périodes, je lisais Mickey ou Pif, d’ailleurs. 




















Côté BD:
Un soir, il faisait nuit, mon père s’est arrêté devant une brasserie qui faisait tabac et presse pour acheter sa cartouche de cigarettes. Il est revenu avec quelque chose pour moi : Tintin et l’oreille cassée. C’est mon premier album de BD. Je ne sais pas très bien quel âge j’avais, probablement quelque chose comme neuf ans. De même que j’avais collectionné les Martine, j’ai collectionné les Tintin: ils sont toujours dans ma bibliothèque. De temps en temps, mon père m’achetait un Blek le roc en point presse; je lisais tout ce qui me passait sous la main, donc je lisais ça, et il faut bien le dire, je servais d’alibi à mon père qui avait également envie de lire Blek le roc… Vers onze ans, j’ai eu quelques BD, par mes oncles: Chlorophylle, Yoko Tsuno et Gaston Lagaffe. J’ai adoré Gaston, bien aimé Yoko Tsuno et trouvé Chlorophylle trop enfantin. Dans la presse (le journal régional et Télé Poche), j’ai découvert Arthur et Zoé et Mandrake le magicien. 

Mais j'ai lu aussi des bizarreries, par exemple ce livre du 19ème siècle (je le sais maintenant en me rappelant sa reliure), en mauvais état, que je m'étais procuré dieu sait comment, une biographie de Napoléon. Je me souviens d'un épisode de son enfance, relaté dans ce livre: il jouait avec ses frères et soeurs et une charpente, ou un plafond (mon souvenir est flou) s'est effondré; n'écoutant que son courage, il a fait de son corps un rempart pour ses frères et soeurs, et n'a dû son salut qu'à une poutre qui a entravé le chemin de ce qui s'apprêtait à tomber sur les enfants. Il y avait une illustration, bien emphatique, de cet épisode. Ce livre me fascinait... Rétrospectivement, je me demande si je n'ai pas eu entre les mains, enfant, une édition du Mémorial de Sainte Hélène... Le livre est perdu depuis longtemps.

Et donc, ces livres verts, me direz-vous? 
Patience...


Dans le prochain épisode, vous saurez ce qu'étaient ces mystérieux livres verts, et vous continuerez de découvrir mille et une anecdotes de lectures d'enfance...

5 commentaires:

keisha a dit…

Tu as lu Blek le roc? Oh je l'empruntais à un voisin (adulte) je n'avais rien à me mettre sous la dent...
Alice, je dévorais ça en une matinée quand j'étais gamine...
Le vert, c'est le fameuse bibliothèque verte?

Hélène a dit…

J'étais aussi une grand fan des Alice ! J'en ai passé des après midis à vibrer à la lecture de ses aventures. Et comme toi côté Bd j'ai commencé par Tintin ! Je n'ai osé relire ni l'un ni l'autre ...

Tasha Gennaro a dit…

Tintin, je l'ai redécouvert à 20 ans, je faisais de difficiles insomnies et seule la BD était supportable dans ces moments-là. J'ai adoré, notamment à cause de l'humour insufflé par le capitaine Haddock. Mais ce n'est pas mon style de BD préféré aujourd'hui, c'est certain.

Electra a dit…

J'ai eu de la chance car chez moi il y avait beaucoup de livres, d'encyclopédies (mon père) ..et les BD (Tintin, Asterix, Gaston, Boule et Bill) et chez mes cousines aussi...

en vacances, ma mère nous achetait les Pif et Gadget...
Pour ta lecture étrange, moi j'avais piqué "Christine, treize ans, droguée et prostituée" que j'ai lu à l'âge de dix ans en cachette.. ça m'avait beaucoup marqué et je ne pouvais en parler à personne !

Eva Sherlev a dit…

ah les Alice ! qu'est-ce que j'ai pu les aimer ! avec aussi les 6 compagnons de la Croix-Rousse ...
les dignes successeurs des Club des 5 et autres Clan des 7 !
j'avais récupéré ceux de ma mère, et mes parents m'achetaient ceux qui manquaient d'occasion dans les brocantes et les bouquineries, j'ai des centaines et des centaines de livres de la bibliothèque rose et verte avec leurs couvertures cartonnées qui ont dû passer dans des dizaines de mains avant que je les récupère...