Présentation
En cinq épisodes tournés en 1913 et 1914, les aventures du terrible
criminel Fantômas, portées à l’écran par Louis Feuillade, dans un serial muet interrompu par la guerre. L'inspecteur Juve comprend bien vite à quel génie du crime il a affaire, mais jamais il ne
renonce, aidé par le jeune Fandor, journaliste intrépide.
Mon avis
Je n’avais jamais vu ce serial
des années 1910, qui s’est emparé « à chaud » d’un grand succès de la
littérature populaire, et j’appréhendais quelque peu l’expérience, me disant que
cela faisait bien longtemps que je n’avais pas regardé de films muets. Je
craignais de m’ennuyer, les rythmes de nos fictions cinématographiques ayant
bien changé ; je craignais aussi de trouver le jeu des acteurs désuet
jusqu’au ridicule. Je me suis lancée…
Et j’ai été soufflée !
Je ne saurais juger de la fidélité aux récits de Pierre Souvestre et
Marcel Allain (j’y viens, j’y viens), mais j’ai tout de suite été emportée par
l’atmopshère. On est très loin de l’image donnée par les films de Hunnebelle dans
les années 1960 : par exemple, l’inspecteur Juve n’est pas l’abruti
hystérique proposé par Louis de Funès, mais un type acharné et malin, qui
comprend bien avant tout le monde quel criminel abominable est Fantômas. Fandor
est un peu plus falot, même s’il prend de l’importance au fil des
épisodes : il a un petit côté Tintin avant l’heure. Et que dire de
Fantômas, incarné par René Navarre ? Regard magnétique, ruses diaboliques,
c’est un vrai génie du mal comme on aime, et on ne s’embarrasse pas ici de donner
quelque explication que ce soit. Fantômas est cupide, certes, mais il a aussi
une vraie jubilation à faire le mal pour rien, gratuitement, il n’a aucune
morale, aucune pitié, il piège ses acolytes avec la même absence de scrupules
que lorsqu’il s’en prend aux nantis.
Le jeu des acteurs a beau être emblématique du muet, il n’a rien de la
pantomime qu’on pouvait voir alors sur les écrans. Le jeu de Navarre est même
assez moderne. Non seulement je ne me suis pas ennuyée, mais ce qui peut nous
apparaître désuet m’a fait sourire, et j’ai même trouvé que ces cinq films
avaient un sacré rythme. Pour tout vous dire, j’ai dévoré l’ensemble en un
week-end, c’était addictif !
Enfin, faut-il que j’enfonce des portes ouvertes ? Louis Feuillade
a contribué à inventer le langage cinématographique. J’ai été frappée par les
nombreuses scènes en extérieur, qui s’échappent des décors un peu théâtraux du
muet. Les scènes dans la nature sont réussies, mais j’avoue avoir été touchée
par les scènes de rue dans la capitale : voir le Paris d’avant la Grande
Guerre, d’avant la grande boucherie, est bouleversant. Même les scènes en
intérieurs sont intéressantes : Feuillade réussit souvent à donner du mouvement – alors que les plans sont bien sûr fixes.
Maintenant, je n’ai qu’une envie, voir Les vampires, avec la somptueuse Musidora. Et je ne serais pas
contre la lecture de quelques Fantômas. Et ça tombe bien, parce que sort bientôt dans la collection Bouquins (Robert Laffont) une nouvelle édition des
récits de Pierre Souvestre et Marcel Allain : il était temps !
Pour qui ?
Pour tous ceux qui sont prêts à voir une page de l’histoire du cinéma
ou qui ont pour seule image de Fantômas un type à la tête bleue...
Le mot de la fin
Historique.
Louis Feuillade, Fantômas, Juve contre Fantômas, Le mort qui tue, Fantômas contre Fantômas, Le
Faux magistrat, Gaumont, 1913-1914. Disponible en coffret, Studios Gaumont,
2008.
3 commentaires:
Eh bien, tu réussis à me donner envie de voir des films muets : un tour de force !
(j'ai oublié de dire que ça complèterait bien ma lecture de "Masqué"!
J'ai discuté avec le scénariste de La colère de Fantomas, Olivier Bocquet, il y a quelques jours, et il a bien entendu évoqué Masqué. Il faut que je le lise! Quant aux films muets, je ne sais même pas à quand remonte mon dernier film muet...
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