samedi 10 juillet 2021

Le bal des porcs d'Arpad Soltész




Présentation éditeur

Dans le Joli Pays sous la Minuscule Chaîne de Hautes Montagnes, quand des adolescentes disparaissent d’un centre de désintoxication, personne ne s’en inquiète. Les junkies mentent, volent, et crèvent. Tout le monde le sait, et tout le monde s’en fiche. Mais quel est le lien entre la mort de la jeune Brona , la carrière fulgurante d’une poignée de politiciens, un maître chanteur tout-puissant, la mafia calabraise et l’assassinat d’un journaliste ?


Ce que j'en pense

Vous vous souvenez sans doute que j'avais adoré Il était une fois dans l'est : essai transformé avec Le bal des porcs, deuxième opus d'Arpad Soltész publié par Agullo. Une fois de plus, si vous cherchez un gentil polar, une lecture réconfortante, mais aussi un roman facile, passez votre chemin. Arpad Soltész jette dans ce roman noir toute sa rage et tout son désespoir. Il ne se soucie pas d'être reader friendly, et si vous pouvez bien sûr vous lancer dans Le bal des porcs sans rien savoir des évènements qui ont secoué la Slovaquie ces derniers temps, je vous conseille néanmoins de prendre quelques renseignements sur l'affaire Kuciak, cela facilitera votre lecture et sera un facteur de plaisir supplémentaire. Arpad Soltész construit un roman kaléidoscopique, et l'on peut être désarçonné par la multiplicité des personnages, par les chemins empruntés et APPAREMMENT délaissés ensuite. C'est que Le bal des porcs, sous des dehors de fiction, a des allures de true crime, comme on dit : ce qu'il rapporte est une lecture de faits réels, qui ne se soucient guère, eux, de fluidité et de simplicité. La corruption et la criminalité sont complexes, tissent des liens nombreux et se nourrissent d'interactions et d'interdépendances à plusieurs niveaux et degrés. Alors bien sûr, cela ne facilite pas la compréhension par les béotiens que nous sommes, mais c'est fait pour ça. 
Et n'allez pas penser que Le bal des porcs n'est pas romanesque, oh que si! C'est d'ailleurs un des talents fabuleux d'Arpad Soltész : il semble nous égarer, ne se soucie pas de nous ménager des transitions et des explications sur ce qui relie ce texte-mosaïque, et nous, lecteurs, nous tournons les pages avidement, horrifiés mais fascinés par ce qui se trame, dans tous les sens du terme, sous nos yeux, une criminalité sordide impliquant tous les individus dotés de pouvoir en Slovaquie, politiciens, hommes d'affaires, police secrète, et la trame du roman, tout aussi virtuose que dans Il était une fois dans l'est. Nous retrouvons Schlesinger, dont je ne sais s'il est un double de l'auteur, déjà vu dans le précédent roman. Ce jeune et petit état qu'est la Slovaquie fait une fois de plus figure de far-west sanglant, où les plus sauvages triomphent encore, où les plus cupides écrasent les plus intègres. 
C'est terrifiant, c'est à côté de chez nous. Et c'est, traduit par Barbora Faure, un somptueux roman noir, qui se joue des codes pour faire rendre gorge à la réalité.

Arpad Soltész, Le bal des porcs (Svina), Agullo Noir, 2020. Traduit du slovaque par Barbora Faure. 

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