mardi 23 janvier 2018

Les premiers Maigret: Pietr le Letton et Le charretier de la Providence


Chose étonnante, je ne connaissais Maigret que par les adaptations qui avaient été faites de son univers. Je me souviens, enfant, de la série télé avec Jean Richard, une adaptation qu'à l'époque déjà je détestais. J. Richard me semblait trop vieux (l'était-il? pas sûr, j'étais une enfant), je le trouvais ridicule et pas très bon, et la transposition à l'époque contemporaine était étrange. Je n'en ai pas revu depuis, car dans les années 1990 est arrivé le Maigret "de" Bruno Crémer. Et alors que je n'avais jamais lu Maigret, il me semblait être le bon Maigret, le seul, l'unique. Après deux lectures, je vois ce que Crémer apporte, ou plutôt ce qu'il enlève, le côté teigneux du commissaire. Mais je confirme qu'il livre une incarnation très réussie. Je ne parlerai pas de la récente adaptation britannique: je ne suis pas convaincue par Atkinson (non son jeu mais son incarnation même), encore moins par la reconstitution des décors... J'ai vu aussi des films avec Jean Gabin dans le rôle de Maigret, mais la personnalité de Gabin me semble trop fortement imprimée sur celle de son personnage. Peut-être changerai-je d'avis en le revoyant après la lecture de plusieurs Simenon. 
Mais je reviens à Simenon, donc. Des Maigret, il y a en a à la maison, et comme une panne de lecture me guettait, j'avais besoin d'un roman court. Pourquoi pas Maigret? J'ai donc pris le premier volume, Pietr le Letton. Et je ne m'attendais pas à autant aimer... Je découvre le personnage sous la plume de Simenon, je retrouve sa placidité, sa présence physique très imposante, sa façon de se couler dans un milieu pour observer, comprendre. C'est déjà bien, mais il y a plus. J'aime l'écriture de Simenon, sans fioritures, presque behaviouriste par moments, sa façon de poser des personnages très rapidement, de leur donner chair par des gestes, des mouvements, des paroles. J'ai été surprise de la rapidité de l'action, de son côté captivant. Je suppose que j'attendais quelque chose de plus lent, mais en fait, Simenon a un sens du rythme remarquable. J'ai enchaîné très vite avec Le charretier de la Providence, aussi déchirant et addictif. Difficile de lâcher ces deux romans, en tout cas... Et puis même si je connaissais nombre d'intrigues via les épisodes avec Crémer, je ne m'attendais pas à tant de noirceur, de tragique, et ça me plaît énormément. Il y a l'empathie de Maigret, et il y a la force des intrigues, de ce qu'elles charrient d'humain. Ces deux premiers volumes ont en commun d'explorer les conséquences tragiques de liens indéfectibles, d'amour et de dépit, et c'est très beau. Me voilà conquise en tout cas, et ravie. J'ai dans la foulée de mes lectures regardé quelques vidéos où Simenon parle de son personnage, de son écriture, et si je ne peux bien sûr préjuger de l'homme, l'homme public en tout cas me plaît par sa modestie et sa simplicité. Je pense que je lirai d'autres romans de l'auteur, hors de la série des Maigret, mais pour le moment je suis bien avec le commissaire. 

Simenon, Pietr le Letton, Le Livre de Poche, 2003. Publication originale: 1931.
Simenon, Le charretier de la Providence, Le Livre de Poche, 2003. Publication originale: 1931.

4 commentaires:

keisha a dit…

J'ai redécouvert Simenon l'année dernière lors du mois belge, et été étonnée (?) du côté très noir noir de ces romans.

Tasha Gennaro a dit…

Bien d'accord avec toi! Et j'aime beaucoup...

Electra a dit…

J'ai plusieurs Maigret chez moi aussi et j'ai lu l'un d'eux que j'ai vu par hasard adapté. Contrairement à toi, je n'ai jamais aimé ni Jean Richard, encore moins Crémer (il me faisait peur !) et à l'inverse, j'adore Rowan Atkinson et je trouve la série plus "vivante" :-)
C'est bien la première fois que je regarde Maigret car pour mois pendant des années c'était l'équivalent du Derrick, un truc pour s'endormir.
Côté livres, j'aime bien le lire et comme tu le dis, une lecture courte ça fait du bien surtout quand c'est bien écrit

Tasha Gennaro a dit…

Je te rejoins sur un point : la série avec Atkinson retrouve le rythme très vif des romans.
Et vive les lectures courtes, plaisir différent de l'immersion dans une oeuvre longue, mais tout aussi délectable...