lundi 19 février 2018

Demain c'est loin de Jacky Schwartzmann


Présentation (éditeur)
 « J’avais un nom de juif et une tête d’Arabe mais en fait j’étais normal. » Voici François Feldman, originaire de la cité des Buers à Lyon, plus tout à fait un gars des quartiers mais n’ayant jamais réussi non plus à se faire adopter des Lyonnais de souche, dont il ne partage ni les valeurs ni le compte épargne. Il est entre deux mondes, et ça le rend philosophe. Juliane, elle, c’est sa banquière. BCBG, rigide et totalement dénuée de sens de l’humour, lassée de renflouer le compte de François à coups de prêt. « Entre elle et moi, de sales petites bestioles ne cessaient de se reproduire et de pourrir notre relation, ces sales petites bêtes contre lesquelles nous ne sommes pas tous égaux : les agios. » Mais le rapport de force va s’inverser quand, un soir, François lui sauve la mise, un peu malgré lui, suite à un terrible accident. Et la banquière coincée flanquée du faux rebeu des cités de se retrouver dans une improbable cavale, à fuir à la fois la police et un caïd de banlieue qui a posé un contrat sur leurs têtes. Pour survivre, ils vont devoir laisser leurs préjugés au bord de la route, faire front commun. Et c’est loin d’être gagné.

Ce que j'en pense
 J'avais repéré ce titre à sa sortie et, sur la foi du billet de Jean-Marc Laherrère, j'avais acheté ce roman noir, qui a été un régal. Il y a un côté entre-deux : entre la comédie policière (dont Sophie Hénaff m'a donné encore récemment un très bon exemple) et le roman noir assaisonné d'humour. Le personnage a d'emblée une existence folle, avec son nom juif (celui d'un ex-chanteur de variété, qui plus est) et sa tête d'arabe, comme il le dit, et il donne un corps et une voix à ces jeunes gens grandis dans les cités des métropoles (ici en marge de Lyon). L'intrigue est folle elle aussi, échevelée au possible, sans temps mort, et je ne me suis pas ennuyée une seconde. N'allez pas croire cependant qu'on est dans la pure gaudriole (ce qui m'irait déjà très bien): il y a des pages bien senties sur cette jeunesse laissée pour compte, ses errements, les responsabilités des uns et des autres. En cela Demain c'est loin m'a fait penser à La Daronne d'Hannelore Cayre, pour ce regard drôle et sans angélisme, ces phrases acérées sur une jeunesse perdue, celle des "quartiers", comme on dit. 
Le dénouement, par son relatif optimisme, fait de Demain c'est loin une comédie noire, et c'était une lecture jubilatoire, décapante, bienvenue dans la mouise ambiante. Pas un coup de coeur pour moi, contrairement à La Daronne ou à Révolution (Sébastien Gendron), mais une lecture que je recommande tout de même. Pas un coup de coeur, mais pourquoi donc, me direz-vous? Je pense que j'attendais plus de noirceur, les rebondissements de l'intrigue l'emportent au bout d'un moment sur l'acuité du propos et du regard. Mais je fais la fine bouche : j'ai passé un excellent moment.

Jacky Schwartzmann, Demain c'est loin, Seuil, 2017.

2 commentaires:

Electra a dit…

Tant de polars qui me donnent envie mais mon programme de lecture est serré - plus tard, cet été (j'irais à la BM faire une descente)

Tasha Gennaro a dit…

Je t'admire d'avoir un programme de lecture! Je n'arrive jamais à me tenir à quelque programme de lecture que ce soit, j'ai des envies changeantes.