dimanche 28 janvier 2018

Ma ZAD de Jean-Bernard Pouy


Présentation (éditeur)Camille Destroit, quadra, responsable des achats du rayon frais à l'hyper de Cassel, est interpellé lors de l'évacuation du site de Zavenghem, occupé par des activistes. À sa sortie de GAV, le hangar où il stockait des objets de récup destinés à ses potes zadistes n'est plus qu'un tas de ruines fumantes, son employeur le licencie, sa copine le quitte... et il se fait tabasser par des crânes rasés. Difficile d'avoir pire karma et de ne pas être tenté de se radicaliser! Heureusement, la jeune Claire est là qui, avec quelques compagnons de lutte, égaye le quotidien de Camille et lui redonne petit à petit l'envie de lutter contre cette famille de potentats locaux, ennemis désignés des zadistes, les Valter.

Ce que j'en penseC'est le grand retour de Jean-Bernard Pouy, et il est en forme! Il y a dans Ma ZAD tout ce qu'on aime chez lui : un sens aigu de l'époque, un mauvais esprit anar réjouissant au possible, une virtuosité de la langue et de l'écriture jubilatoire. Camille se laisse mener par le bout du nez par la belle Claire, sans être dupe, ça c'est pour le côté un peu classique de la trame : un personnage qui, au fond, accepte de tout perdre pour les yeux d'une belle esquintée au possible. Camille ne se laisse pas emmerder par les nervis de tout poil, par les pourritures nanties, par les tenants de tout pouvoir. Et puis Camille voyage, des Landes à Riga, et ça déménage. Ma ZAD est un roman noir, qui ne manque pas de pointer les aberrations industrielles, politiques, la capacité de résistance mais aussi les vues à court terme (salauds de zadistes qui empêchent la création d'emplois), l'impunité des puissants. La ZAD de Camille, c'est sa maison, c'est Claire. Mais Pouy a l'élégance de nous faire rire avec tout ça, et en ce qui me concerne, j'ai ri sans me soucier de la tête de ceux qui me voyaient rire dans le train (oui j'ai beaucoup pris le train ces deux jours). Il y a ce qu'on aime chez Pouy : les références à des romans noirs, des jeux de mots, des digressions en forme d'agacements (les "en fait", les valises à roulettes, qui me donnent des envies de meurtre sur les quais de gare et de métro), des dialogues qui claquent, et ce dernier chapitre, avec sa longue phrase de plusieurs pages, morceau de bravoure stylistique. C'est bon de voir Pouy revenir à la Série Noire. 

Jean-Bernard Pouy, Ma ZAD, Gallimard/Série Noire, 2018.

2 commentaires:

Electra a dit…

J'ai eu une réaction épidermique à la lecture du titre - vivant à Nantes ... je n'ai plus envie d'entendre parler de Zad mais sinon cet auteur a l'air très drôle !

Tasha Gennaro a dit…

Ah oui j'imagine bien! Du coup si tu devais lire Pouy, va vers La Belle de Fontenay.