mardi 22 janvier 2013

La Tristesse du samouraï de Victor del Àrbol



Présentation
Nous sommes en 1941 et Isabel Mola attend fiévreusement le train qui lui permettra de fuir l’Espagne et son mari en compagnie de son plus jeune fils. Le train de Lisbonne partira sans elle, l’enfant rentrera seul chez son père.
Quarante ans plus tard, Maria Bengoechea se forge une solide réputation d’avocate en faisant condamner un officier de police qui a commis une grave bavure. Cet événement va faire ressurgir le passé, peu avant le coup d’état de février 1981, un passé qui ne passe pas. Sur fond de franquisme, les fautes des uns vont rejaillir sur les autres : la tragédie ne fait que continuer…

Mon avis
J’avais comme tout le monde beaucoup entendu parler de ce roman noir à sa sortie, avec deux avis positifs qui comptent beaucoup pour mes choix polareux: celui de mon libraire et celui de Jean-Marc Laherrère. Pourtant, je ne l’avais pas acheté (tant de choses à lire) et les mois ont passé. J’ai finalement attendu la sortie en poche, et je dois bien l’avouer, l’envie s’était un peu émoussée. J’ai donc commencé le roman sans savoir si j’allais accrocher – fatigue, difficulté à lire, boulot, je ne vous refais pas le couplet.
Vaines inquiétudes. Dès les premières pages, Victor del Àrbol m’a happée pour ne plus me lâcher, et en dépit de la fatigue et du manque de temps, j’ai avancé (assez) rapidement, j’avais hâte de retrouver mon livre, et j’étais aussi impatiente d’avaler les pages que triste de m’acheminer vers la fin.
Certes, La Tristesse du samouraï ne révolutionne pas l’écriture du polar, Victor del Àrbol fait un choix classique, celui d’un récit qui alterne les époques, les points de vue, tout en favorisant tout de même celui de Marìa. Mais si cela a été maintes fois fait, c’est ici parfaitement maîtrisé, la construction est d’une efficacité redoutable, distillant au fil des pages les faits, les informations, sans pesanteur didactique, sans céder non plus à la facilité de révélations spectaculaires. J’ai immédiatement été touchée par le personnage de Marìa, par celui d’Isabel, il faut d’ailleurs dire que Victor del Àrbol traite bien ses personnages féminins.
Surtout, c’est du roman noir comme j’aime, qui ne s’abandonne jamais au manichéisme, qui n’offre aucune issue consolatoire au lecteur. Au contraire, il l’assomme jusqu’aux dernières lignes, parce que la vision du monde, de l’Histoire proposée n’est pas là pour rassurer le lecteur. Il n’y a rien de rassurant dans ces années franquistes, rien de romantique à vivre. Noir, tragique : ce sont les termes qui caractérisent le mieux le roman à mon sens.
Personne n’est tout à fait innocent, le poids des fautes est porté pendant des générations, de nombreuses vies sont ravagées, et les pires salauds – les politiques – s’en tirent, ils traversent les soubresauts de l’Histoire espagnole sans être inquiétés.
Bref, La Tristesse du samouraï est un grand roman noir, auquel on pense lorsqu’on ne lit pas, dont les personnages vous hantent, dont la force tragique vous bouleverse.

Le mot de la fin
Indispensable.

Victor del Àrbol, La Tristesse du samouraï (La Tristeza del Samurài), Actes Sud/Actes Noirs, 2011. Traduit de l’espagnol par Claude Bleton. Edition originale : Editorial Alrevés, 2011. Disponible en Babel Noir.

13 commentaires:

zarline a dit…

J'avais également lu d'excellents avis à sa sortie mais je l'avais oublié depuis. A croire que je dois me rattraper, car ton billet s'ajoute à l'avis plus qu'enthousiaste de mon libraire ce matin...

Tasha Gennaro a dit…

Te rattraper, je ne sais pas, ;-)
Mais tu peux te lancer sans hésiter, c'est vraiment TRES TRES bien!

Miss Cornelia a dit…

J'avais été littéralement emportée, bousculée, brutalisée en qq sorte par ce roman noir qui ne laisse aucun réel espoir. Je suis contente qu'il t'ait plu, ô grande prêtresse des polars!

Tasha Gennaro a dit…

Oui, bousculée, brutalisée, je suis d'accord! Ouh la, grande prêtresse du polar, non, hélas! :-)

Shelbylee a dit…

Je l'avais repéré mais je l'avais reposé car le titre m'évoque le Japon et que j'avais peur d'être déçue vu qu'en fait ca à rapport avec l'Espagne. Mais je le renote quand même dans ma LAL. PS :je suis en train de lire Absente...

Tasha Gennaro a dit…

Pour moi c'est un gros coup de coeur. Tu aimes Absente? Tu me diras ce que tu en penses quand tu l'auras fini?

Shelbylee a dit…

Pour l'instant j'en suis p 69 et oui j'aime assez, après j'attends pour vraiment me prononcer. Je trouve que le style parlé un peu mafieux est assez bien rendu, mais j'ai un peu de mal à le lire après une journée de boulot.
Je te dirai évidemment ce que j'en ai pensé ;-)

Tasha Gennaro a dit…

OK! Ah! lire après le boulot, quand on a la tête pleine et qu'on est épuisé... je crois que je vois ce que tu veux dire :(

monpetitchapitre a dit…

J'avais adoré aussi, un gros coup de coeur. Le sujet m'a beaucoup intéressée et même si je l'ai lu il y a plusieurs mois, il m'arrive encore d'y repenser.

Loo a dit…

Et bien je serai partante pour le lire. J'ai toujours beaucoup de mal à faire mes choix pour les polars.

Tasha Gennaro a dit…

Je te le recommande. La longueur me faisait un peu peur (avec la fatigue) mais en fait, ça m'a captivée tout du long.

Tasha Gennaro a dit…

@ Mon petit chapitre (Anne) : ça ne m'étonne pas, je pense que c'est une lecture qui va me marquer moi aussi. C'est fou comme certains personnages, certains livres continuent à nous habiter, longtemps après.

Anonyme a dit…
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