samedi 3 août 2019

Les ombres de Montelupo de Valerio Varesi


Présentation éditeur
C’est l’automne à Parme. Le commissaire Soneri décide d’échapper à la grisaille de la ville en retournant dans son village natal des Apennins pour des vacances bien méritées.
Il se réjouit à l’idée de cueillir des champignons sur les pentes boisées de Montelupo, une activité jadis partagée avec son père. Sur le village isolé règne la famille Rodolfi, producteurs de charcuterie depuis des générations. Le patriarche, Palmiro, mène sa barque d’une main sûre.
Mais derrière la réussite, se profile un drame familial : le fils, Paride, a d’autres projets pour son avenir… Brutalement, la famille est plongée au cœur d’un scandale financier qui touche toute la petite communauté : Palmiro aurait escroqué la plupart des habitants en leur faisant miroiter des placements financiers qui s’avèrent bidons. Peu après, un randonneur fait une découverte macabre dans les bois : le cadavre de Paride. Voilà qui signe la fin des vacances paisibles de Soneri, embarqué malgré lui dans une enquête où les relations complexes entre le père et le fils Rodolfi jouent un rôle prépondérant. Et en creusant, Soneri va se retrouver bien plus impliqué qu’il ne l’aurait souhaité, quand il découvre que son propre père et Palmiro étaient amis...

Ce que j'en pense
Que c'est bon de retrouver Soneri! Cette fois, un peu à la manière de Maigret, il prend des vacances, sur les lieux de son enfance, et est amené malgré lui à enquêter sur une drôle d'affaire. L'analogie avec Maigret s'arrête là, à mon sens, car dans ce volume, une fois de plus, Soneri liquide une part de son passé, avec douleur. C'est déchirant et il y a des pages d'une émotion incroyable. Soneri fait une fois de plus l'expérience de la perte, avec dans Les ombres de Montelupo une part de son enfance qui fiche le camp. Je me souviendrai longtemps de Sante... Mais il retrouve aussi des choses : une part de la vie de son père (pas de spoiler, promis), et les sensations éprouvées lors des promenades avec son père. 
Valerio Varesi évoque de manière magnifique la montagne, la forêt, ses bruits, ses odeurs, la dureté de cet environnement qui peut être hostile aux hommes mais aussi leur offrir un abri quasiment inviolable. Je pouvais sentir l'odeur des sous-bois en lisant, et palper girolles et trompettes de la mort (je suis d'accord avec Soneri : c'est délicieux, les trompettes de la mort). 
Valerio Varesi livre une fois de plus un roman noir fort et subtil : les changements de nos sociétés sont également perceptibles dans ce coin de montagne où les braconniers côtoient des trafiquants d'un nouveau genre, où l'on convoie d'autres marchandises, bien plus mortifères que jadis. Les êtres qui survivent dans ces bois ne parlent pas le dialecte local mais des langues plus lointaines, au grand dam de certains villageois. Et puis il y a un propos très fort sur l'ascension sociale, sur ce qu'elle fait de génération en génération, sur les fortunes amassées - pas proprement, ni jadis, ni aujourd'hui - et leurs conséquences, jusqu'à l'effondrement. De ceux qui ont crevé de faim à ceux qui naissent corrompus par l'argent, on perçoit l'éloignement de la communauté, la perte des repères et des valeurs. 
Enfin, il y a dans Les ombres de Montelupo les fantômes de la Seconde Guerre mondiale, ce passé source de bien des maux et de la corruption de la communauté, en quelque sorte, en tout cas de la famille qui fait vivre ce village tout en le corrompant. Soneri va chercher des réponses à ses propres interrogations, tout au long de son séjour. Il les trouvera, comme solde de tout compte avec Montelupo. 
L'écriture est d'une poésie incroyable, superbement rendue par la traduction de Sarah Amrani. La langue de Varesi est magnifique, et cela m'a davantage frappée dans ce volume, sans doute parce qu'il fait la part belle aux descriptions.
Décidément, Valerio Varesi s'impose comme un grand du roman noir italien... 

Valerio Varesi, Les ombres de Montelupo (Le ombre di Montelupo), Agullo, 2018. Traduit de l'italien par Sarah Amrani. Disponible en Points Policier. 

2 commentaires:

Kathel a dit…

J'aime bien cette série aussi, et le quatrième est paru, il faut que je le note !

Tasha Gennaro a dit…

Il attend sagement sur ma PAL!