jeudi 8 octobre 2015

L'alignement des équinoxes de Sébastien Raizer


Présentation de l'éditeur
Karen Tilliez, fille étrange et fascinante, se prend pour un samouraï, atteint l'équinoxe de la mystérieuse loi de l'alignement en décapitant un homme d'un coup de sabre. Diane Lempereur, jeune femme aussi séduisante que déboussolée, travaille dans un sex-shop et abandonne tous les repères de sa vie tourmentée en se laissant guider par un psychiatre aux expérimentations singulières. Silver, boxeuse zen laotienne, et Wolf, ancien commando déphasé, deux flics de la brigade criminelle, vont être entraînés dans ce lavage de cerveau existentiel en forme de grand huit, au son des Stooges, de Kraftwerk et de Coil, dans un univers mutant et mouvant, où rien ne semble impossible - ni aller de soi. Et pendant ce temps, la Vipère règle ses comptes, en attendant son propre équinoxe.

Ce que j'en pense
Lors de sa sortie, je n'avais guère prêté attention à ce roman, et puis je suis tombée sur le billet d'Unwalkers, qui m'a donné envie de le lire. J'ai beaucoup aimé mais je comprends qu'on adhère modérément (comme Jean-Marc Laherrère). 
D'abord, je pense qu'on peut se désintéresser du discours érudit qui parsème les pages de ce roman, mais pour ma part cela m'a passionnée. Raizer est toujours très clair. Et si je ne suis pas vegan et pas tentée de l'être, j'ai trouvé intéressantes certaines prises de position des personnages (Doris, épatante).
Ensuite, on peut ne pas adhérer à l'orientation plutôt héroïque des personnages, avec leur petit côté "vigilantes". Markus reprend un topos, celui du hacker de génie, borderline, recruté par la police. Mais pour tout vous dire, j'ai adoré ces personnages et j'ai hâte de les retrouver dans le second volet. J'aimerais que soit développé le personnage de Markus, justement, parce que si nous avons des bribes de son histoire, nous le voyons trop peu à mon goût. J'aime bien aussi le personnage de Big Jim, énigmatique patron. Et surtout, surtout, j'adore le duo d'enquêteurs : nous avons déjà des éléments sur le parcours de Silver, personnage féminin très convaincant; nous en savons moins sur Wolf. La suite devrait nous en apprendre davantage et d'ores et déjà, les deux ont ce côté torturé et sombre qui fait les bons héros de noir. Et puis j'aime bien la légère tension sexuelle qui existe entre ces deux-là: Raizer n'appuie jamais le trait, n'en fait pas trop, et c'est d'autant plus convaincant. 
Côté intrigue, j'ai accroché tout de suite, même si je ne suis pas fan des chapitres où l'on se glisse dans l'esprit barré de Diane. 
Deux choses enfin méritent d'être soulignées : la culture rock qui habite le roman, pas étonnant quand on connaît l'itinéraire de l'auteur mais sacrément plaisant tout de même ; et la qualité de l'écriture, qui jamais ne se complaît dans la violence, tout en l'évoquant avec force,et qui n'appuie jamais sur le pathos ou sur le bizarre. Le tout dégage une grande singularité. 
Décidément, Aurélien Masson sait dénicher les nouveaux talents du noir en France aussi, et ça, ça n'a pas de prix. En tout cas, j'ai hâte de retrouver l'auteur et ses personnages (en 2016). 

PS : pour l'anecdote, j'entendais l'autre jour un jeune homme, qui se pique d'avoir des compétences en édition, pester contre la maquette du roman, avec son titre fragmenté sur la couverture. Amusant, parce que moi je trouve que c'est un beau clin d'oeil à l'alignement dont il est question... 

Sébastien Raizer, L'alignement des équinoxes, Gallimard/Série Noire, 2015.

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