Présentation
La « muraille de lave » est une falaise de basalte noir très dangereuse, qui cause de nombreux accidents. C'est également le nom donné au siège social d’une banque aux pratiques spéculatives tout aussi dangereuses...
Alors que le commissaire Erlendur est toujours absent, Sigurdur Oli enquête sur un
chantage qui se transforme en meurtre et qui va l'amener à la muraille de lave.
Mon avis
Je ne sais pourquoi, j’avais délaissé Indridason, alors que c’est
un auteur que j’apprécie beaucoup. La première fois que j’ai lu un de ses romans, j'ai pensé à Mankell (à cause du personnage principal), mais j’ai vite préféré
Indridason. Les intrigues de Mankell me semblaient trop souvent tirées par les
cheveux (j’ai peu aimé La Muraille
invisible) et les parutions désordonnées en France m’horripilaient (tantôt le
père de Wallander était mort, tantôt il ne l’était pas…). Et puis Indridason étire
moins les choses, ses romans sont courts, secs, et j’aime ça. Enfin,
contrairement à beaucoup de lecteurs, j’ai aimé qu’il éclipse son héros pour se
concentrer sur d’autres membres de l’équipe ; d’abord cela évite la
lassitude, ensuite cela épargne au lecteur l’héroïsation outrancière du
personnage de l’enquêteur. Bref, alors que sort Le duel, je me suis dit que j’avais bien du retard sur la
série, et j’ai attaqué et dévoré La
muraille de lave. Cette fois, il adopte le point de vue du peu sympathique
Sigurdur Oli, dénué d’empathie, parfois limite idéologiquement. Et c’est une
excellente idée ! Il est un tantinet borné, c’est un tâcheron mais son
côté laborieux en fait un assez bon enquêteur. Pas d’intuitions fulgurantes
chez lui, oh que non, mais un acharnement qui finit par payer. De plus, on
découvre l’histoire personnelle et familiale de ce type ordinaire, ce qui le
rend touchant.
Pendant un long moment, on se dit que l’intrigue est policière mais
qu’il n’y a pas de dimension sociale, et pourtant, il n’en est rien. Indridason
introduit tout en finesse un constat sans concession sur l’Islande et son fol
élan capitaliste et spéculatif. Il a écrit ce roman juste après le
déclenchement de la crise islandaise et nous montre des spéculateurs qui jouent
avec le feu dans un mélange de cynisme et de crétinerie aveugle effarant. Plus
on avance dans le roman, plus la charge est forte.
Et il y a l’art de trousser les intrigues, parfaitement maîtrisé
par Indridason ; tout se complique, mais finalement le crime est
banalement simple, humainement ordinaire, parce qu’il n’y a pas besoin
d’imaginer une résolution abracadabrantesque.
C’est donc un roman noir sans temps mort, parfaitement construit, au
propos acéré sur le monde comme il va (mal).
Arnaldur Indridason, La muraille
de lave (Svörtuloft), Métailié Noir, 2012. Traduit de l’islandais par Eric
Boury. Publication originale : 2009. Disponible en Points Policier.
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