Présentation éditeur
Sud de la France.
Un homme est enfermé dans un hangar isolé. Après l’avoir séduit, sa
geôlière, Émilie, lui tire une balle à bout portant. Il peut hurler, elle vit
seule dans son chenil, au milieu de nulle part.
Elle lui apprend que, cinq ans plus tôt, alors jeune infirmière, elle a
été victime d’un chauffard.
L’accident lui a coûté une jambe. Le destin s’acharne.
La colère d’Émilie devient aussi puissante que sa soif de vengeance.
Ce que j’en pense
Evidemment, j’ai un a priori positif quand j’ouvre un roman
de Marin Ledun. Evidemment, j’attendais celui-ci avec une grande impatience. N’empêche :
En douce ne m’a pas déçue. Après avoir passé presque quinze jours sur un polar
(qui pourtant me plaisait beaucoup), j’ai aimé prendre cet uppercut de
noirceur, j’ai aimé avoir cette sensation d’urgence à la lecture. En douce
commence comme un thriller : une rencontre un soir de 14 juillet, une
promesse de nuit de plaisir, et le virage abrupt vers la violence. Jusque-là, Marin
Ledun semble mettre ses pas dans ceux d’auteurs lus jadis. Mais ce n’est qu’un
leurre, et alors que d’autres romanciers prendraient la voie du thriller
psychologique et adopteraient le point de vue de la victime, Marin Ledun déjoue
nos attentes et retrouve illico la noirceur de la tragédie sociale et la
distance de l’écriture du noir. En mêlant deux strates temporelles, il donne
non pas des explications mais des clés de compréhension du fol engrenage qui
entraîne les victimes vers le pire. En douce est une sorte de mélange entre le
rythme d’un thriller et la force d’un roman noir. Pas plus qu’Emilie ne savait
où la mèneraient ses actes, je ne savais où me menait Marin Ledun. J’ai aimé
ces scènes de noir où l’ambiance et les lieux priment : l’atmosphère de la
fête du 14 juillet, les bruits et les parfums du chenil et de la forêt, l’hôpital
et les bars… En douce donne à voir de manière saisissante comment Emilie a peu
à peu tout perdu, elle qui n’avait déjà pas grand-chose : la perte de sa
jambe n’est que la première étape d’un processus de dépouillement social,
économique, psychologique.
Aliénation au sein du monde du travail, société qui refuse l’échec
et la différence, mécanismes de domination, violences physiques et symboliques :
c’est bien un roman de Marin Ledun que nous lisons, et un roman noir ciselé
comme je les aime.
Il y a plus encore : si les personnages sont des
victimes, ils gardent la dignité, peut-être la seule qui leur reste, celle de
dire non et de choisir, in fine, de retourner ou non la violence subie en
violence infligée. Jusqu’aux dernières lignes, l’auteur bouscule son lecteur.
Pour ma part, j’ai été bouleversée par le choix ultime d’Emilie.
Enfin, il faut remarquer un tour de force : Marin
Ledun, par une écriture très sobre, dépouillée, qui ne cherche pas l’effet,
parvient à faire comprendre sans tomber dans les excès du roman didactique ou à
thèse. Ce n’est pas le moindre de ses talents.
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