jeudi 9 avril 2015

Orgueil et préjugés de Jane Austen (relecture)

L'actuelle édition de 10/18
10/18 : la couverture que j'avais



J’ai lu quelques romans de Jane Austen il y a fort longtemps, et je gardais un très bon souvenir de Raisons et sentiments, Emma ou Orgueil et préjugés. C’est en étant intriguée par le phénomène des réécritures austeniennes que j’ai eu envie de relire Orgueil et préjugés. Coup de chance, j’ai trouvé sur la Bibliothèque électronique du Québec l’édition électronique qui avait la mienne en version papier jadis. J’en profite pour signaler que cette version numérique est impeccable, merci à la BeQ!
Ma relecture m’a emportée dès les premières pages, et tout en connaissant l’issue du roman, j’étais captivée par les rebondissements. Je n’avais pas le souvenir de la bêtise de Mrs Bennett et j’avais oublié la tête à claques qu’est Lydia. J’ai vibré avec Lizzie, je suis tombée amoureuse de Darcy… Ah! Darcy… Dans mon casting idéal, je me permettrais de croiser deux adaptations: je retiens (comme tout le monde, non?) Colin Firth dans le rôle de Darcy et Keira Knightley dans celui de Lizzie. 
Les personnages prennent vie avec une rapidité étonnante sous la plume de Jane Austen, c’est un fait, et on achève le roman sans avoir la moindre envie de les abandonner. Tous sont croqués avec vivacité, de l’horripilant Collins au nuisible Wickham, en passant par lady Catherine… 
Je comprends mieux pourquoi Jane Austen est considérée comme une figure tutélaire du roman sentimental. Tout est là, tout est en place dans cette romance passionnante, les élans, les mouvements mystérieux du coeur, les réactions du corps, qui devancent celles de l’esprit. C’est subtil, c’est beau, c’est passionnant. Pas de coup de foudre en revanche, pas de ceux dont on nous nourrit dans nos fictions contemporaines, comme un passage obligé de la romance. Jane Austen est bien plus fine que ça… Il n’y a que Lydia pour s’emballer au premier regard, et l’on voit ce que ça donne…
Et puis il y a la peinture psychologique et sociale, le démontage des us et coutumes de cette micro-société, une communauté fortement hiérarchisée socialement, impitoyable, superficielle souvent dans ses rapports sociaux, rigide, extrêmement codifiée. Je me suis régalée des remarques malicieuses, ironiques de Jane Austen. On sourit souvent des travers des uns et des autres, enchaînés aux conventions sociales et au sens de leurs intérêts. Pourtant, Jane Austen n’est jamais inutilement bavarde, encore moins sentencieuse. Elle a au contraire le sens de la scène piquante, qui en dit long. 
M’étant passionnée pour Orgueil et préjugés, j’ai voulu enchaîner avec Le Journal de Mr. Darcy d’Amanda Grange (Milady). Cruelle erreur. D’abord je pense que pour trouver le moindre plaisir à lire cet ouvrage, il faut laisser passer un peu de temps. Ensuite, le roman souffre de gros défauts. La forme du journal n’est pas utilisée de manière crédible, offrant un hybride entre narration romanesque classique et journal intime: comment croire que M. Darcy, dans une forme aussi subjective et commentative que le journal, rapporterait aussi scrupuleusement et aussi longuement les dialogues des personnages? Et surtout, Amanda Grange échoue là où brille Jane Austen: quand cette dernière montre le trouble des élans de nos protagonistes, l’ambivalence des sentiments, la révélation qui vient par le trouble du corps et de l’esprit, Amanda Grange assène au lecteur une forme de coup de coeur de Darcy pour Lizzie: immédiatement séduit, il commente à l’envi ses sentiments naissants. On peut aimer cela, j’y vois une aberration par rapport à l’esprit de Jane Austen. 
Ce n’est pas bien grave, et je conçois qu’on trouve du plaisir dans ces réécritures: je n’abandonne d’ailleurs pas, j’en essaierai d’autres. 
Mais pour le moment, je vais rester sur le bonheur d’avoir relu Orgueil et préjugés

Jane Austen, Orgueil et préjugés (Pride & Prejudice), édition électronique BeQ d'après l'édition de 1932. Traduit de l'anglais par V. Leconte et Ch. Pressoir. Disponible en 10/18. 



4 commentaires:

keisha a dit…

Je suis une grosse relectrice des romans de jane Austen et c'est vrai, d'une lecture à l'autre, on oublie des détails et c'est le bonheur!

Hélène a dit…

Je ne me lasse pas de Jane Austen, j'aime les relire !

Unknown a dit…

Ah oui, enchaîner une austenerie après la plume de Jane Austen était une erreur en effet :p
On ne peut apprécier ces réécritures que si on les prend pour ce qu'ils sont: des divertissements légers!

Tasha Gennaro a dit…

@ toutes les trois: oui, quel bonheur! Cela m'a donné envie de replonger dans ses autres romans.
@ Mlle Alice : tu as raison. Mais j'étais partante pour un divertissement léger, mais le contraste était trop fort, je réessaierai plus tard!