tag:blogger.com,1999:blog-50682432750703488872024-03-24T21:36:48.873+01:00Tasha's booksTasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.comBlogger711125tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-86853543744759633912024-03-24T21:36:00.001+01:002024-03-24T21:36:12.537+01:00Vieux Kapiten de Danü Danquigny<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjAQywruWdVT2oQrGM-0OweP25AsYy7dkmyU31if2lvdmHsRqB9UYxE8ztY_RJmgLtZwZuqnixX9ee4kCSyFWA0yrVJkf_Q8zTAS3omSAADlise57imNHLfrQWtt-VyF8wcZQp0Qs3W9mySoNVpSbErXuox5112f5YDcU9IJMATPPmy9GM0KDCwHqc-XWmN/s2421/G08403.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2421" data-original-width="1653" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjAQywruWdVT2oQrGM-0OweP25AsYy7dkmyU31if2lvdmHsRqB9UYxE8ztY_RJmgLtZwZuqnixX9ee4kCSyFWA0yrVJkf_Q8zTAS3omSAADlise57imNHLfrQWtt-VyF8wcZQp0Qs3W9mySoNVpSbErXuox5112f5YDcU9IJMATPPmy9GM0KDCwHqc-XWmN/w273-h400/G08403.jpg" width="273" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;">En Albanie, un vieil officier de la sécurité intérieure spécialisé dans les écoutes téléphoniques se lance dans une croisade personnelle contre un de ses anciens amis, aujourd’hui à la tête d’une organisation criminelle.</span><br style="caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;" /><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;">En France, Desmund Sasse enquête sans discrétion sur le meurtre d’un jeune type, et va bientôt devoir fuir pour sauver sa peau. Pendant ce temps-là, son amie Élise Archambault, détective privée, est embauchée par un avocat véreux pour retrouver son fils.</span><br style="caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;" /><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;">Des trottoirs bitumés de Morclose aux montagnes vertes de l’Épire, trois enquêtes que rien ne semble relier explorent la haine et la vengeance. Elles vont finir par entrer en collision au pied du cimetière des martyrs de Korcë, en Albanie.</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ah que c'est bon de retrouver Desmund Sasse, notre Peter Punk! De l'Albanie à Morclose, on le retrouve en train de mettre son nez là où il ne faut pas : gêneur patenté, il entreprend d'abord de faire mettre sous les verrous un caïd local, et comme ça ne fonctionne pas, de virer le trafic de la came de sa cité sinistrée, dominé par un triste sire. Pour cela, il entreprend de convaincre, d'une curieuse manière que je vous laisse découvrir, le fournisseur en Albanie. Il remonte à la source, en somme. De la Bretagne à l'Albanie, c'est la même pourriture, la même gangrène. On retrouve toute la saveur du précédent opus, une façon de brosser le portrait d'une ville moyenne de province qui, depuis longtemps, n'est plus épargnée par les trafics en tout genre, drogue, prostitution, le tout avec la bénédiction intéressée des notables locaux et dans un contexte délétère. Il y a de très belles lignes, vers le début du roman, sur notre jeunesse, qu'on "gère comme un stocke de marchandise, ou comme on mène le bétail. (...) L'immense majorité d'entre eux, sauf les 'fils de', bien sûr, vont traverser un tunnel de précarité de plusieurs années, à enchaîner les stages peu ou pas payés, les CDD reconduits en CDI pour être virés plus facilement et sans indemnités, en se faisant rabrouer les oreilles de vieux refrains sur le goût de l'effort ou le projet d'entreprise."</span></p><p><span style="font-family: verdana;">En Albanie, ce n'est évidemment pas mieux : Danü Danquigny enchevêtre les trajectoires et enrichit son évocation empathique d'un pays qui était au coeur des <i>Aigles endormis</i>. Le Kapiten qui donne son nom au roman est le vestige d'un régime, d'un pays qui n'est plus, qui a été jeté aux chiens, à la version la plus pure du capitalisme, celle des trafiquants et des voyous. Il sait qu'il a fait les mauvais choix, il est la métaphore d'un pays saccagé. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Il faut lire le chapitre "Ce que je crois", empli de la rage du personnage, qui s'exprime en des pages superbes rythmées par l'anaphore "Je crois". </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Et puis il y a ce plaisir de retrouver Marv', Elise, et de voir défiler scènes et personnages déjantés et abîmés, furieux et pathétiques. J'aime cette folie et ce rythme, typiques d'une littérature de genre parfaitement maîtrisée. Desmund est à la fois un perdant magnifique et un héros XXL, fracassé et prêt à se sacrifier. Mais à ce jeu, le Kapiten va le surpasser. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Bref, une excellente lecture, une de plus!</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Danü Danquigny, <i>Vieux Kapiten</i>, Gallimard, Série Noire, 2024. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><br /></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-39322278690423180922024-03-18T14:08:00.001+01:002024-03-18T14:08:10.145+01:00Reine de Pauline Guéna<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi19K-vdWhIMeuBWf7s3Qd5ZQb0KQ3Tze4Nko6t7ueVeGmjP7Kj1Wj9-gezD32z8EOiTquJq8e5RrUxDIL9s0a81fvqQDA84RT0yekFUqN6DZ2LZ0APrz4VDe7IczMy-GPBXJaPZ5HeUpOhX9n_rL5atVo3H5bKnA5E1aahY5UHSXZ7nPHhom9EDV8nD3_V/s2421/files-2.jpeg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2421" data-original-width="1653" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi19K-vdWhIMeuBWf7s3Qd5ZQb0KQ3Tze4Nko6t7ueVeGmjP7Kj1Wj9-gezD32z8EOiTquJq8e5RrUxDIL9s0a81fvqQDA84RT0yekFUqN6DZ2LZ0APrz4VDe7IczMy-GPBXJaPZ5HeUpOhX9n_rL5atVo3H5bKnA5E1aahY5UHSXZ7nPHhom9EDV8nD3_V/w273-h400/files-2.jpeg" width="273" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /><br />Présentation éditeur<br /><br />« Il se réveille en sursaut. Les cris et les rires des enfants ne sont pas ceux de l’école du village, mais c’est bien l’odeur sèche du béton et celle, suffocante, de la tôle chauffée à blanc qui ont mêlé dans sa sueur et dans la crasse les années et les lieux. Il se redresse, sa prise sur l’arme resserrée, aux aguets. Les enfants se sont tus. Comme les oiseaux. »<br /><br />Marco est tueur à gages. C’est un professionnel fiable et efficace qui a toujours honoré ses contrats. Jusqu’à ce jour d’été où Marco va tuer par amour.<br />Sa cavale commence. À ses trousses, le milieu, la police et un jeune journaliste en quête de gloire. Devant lui, rien d’autre que l’été qui n’en finit pas, et la femme qu’il aime.<br /><br />Ce que j'en pense</span><div><span style="font-family: verdana;"><i>Reine</i> de Pauline Guéna illustre parfaitement ce que peut être un roman noir lorsqu'il se déploie hors des catégories éditoriales du genre (littéraire). Il n'est pas dénué de ce que je mets, en matière de motifs, de registre, de figures, sous le terme de roman noir, et qui est plus qu'un "regard" (même si je ne rejette pas ce terme). On y retrouve une thématique fondatrice des fictions criminelles, même si on la retrouve dans l'ensemble de la littérature : la transgression criminelle. Point d'enquête policière ici, mais des personnages qui se cherchent, se croisent. Le personnage de Léan, le journaliste en mal de promotion, est intéressant, mais évidemment, les deux figures fascinantes du roman sont Reine et Marco. Ce sont deux figures tragiques, servies par l'écriture somptueuse de Pauline Guéna. </span></div><div><span style="font-family: verdana;">L'autrice sait prendre des chemins inattendus, par exemple en faisant cohabiter Léan et Marco. </span></div><div><span style="font-family: verdana;">C'est un roman que j'ai refermé le coeur battant, éblouie. </span></div><div><span style="font-family: verdana;"><br /></span></div><div><span style="font-family: verdana;">Pauline Guéna, <i>Reine</i>, Denoël, 2024.</span></div>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-8797951123723765912024-03-17T11:06:00.000+01:002024-03-17T11:06:10.854+01:00La pouponnière d'Himmler de Caroline De Mulder<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh-z611Y9ojvuw-allBy9xaqh2h65vdFL7MEIOvlC9GpHAEeDq0T37YxLkronSxK6SnZHYeDuqpxnPcxDMTcPDlPVCvObTg3lFEpVtMX0f-lhAYtRzZdwzEjOKKhbfIke0uTSdJChb8vr8gvI-x3rG3gzA2N4U5Q19qRxGqWbu-oQ7UfJppkJIO2Bcx9gkN/s2421/G08044.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2421" data-original-width="1654" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh-z611Y9ojvuw-allBy9xaqh2h65vdFL7MEIOvlC9GpHAEeDq0T37YxLkronSxK6SnZHYeDuqpxnPcxDMTcPDlPVCvObTg3lFEpVtMX0f-lhAYtRzZdwzEjOKKhbfIke0uTSdJChb8vr8gvI-x3rG3gzA2N4U5Q19qRxGqWbu-oQ7UfJppkJIO2Bcx9gkN/w274-h400/G08044.jpg" width="274" /></a></div><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur<br /></span></p><p><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;"><span style="font-family: verdana;">Heim Hochland, en Bavière, 1944. Dans la première maternité nazie, les rumeurs de la guerre arrivent à peine ; tout est fait pour offrir aux nouveau-nés de l’ordre SS et à leurs mères « de sang pur » un cadre harmonieux. La jeune Renée, une Française abandonnée des siens après s’être éprise d’un soldat allemand, trouve là un refuge dans l’attente d’une naissance non désirée. Helga, infirmière modèle chargée de veiller sur les femmes enceintes et les nourrissons, voit défiler des pensionnaires aux destins parfois tragiques et des enfants évincés lorsqu’ils ne correspondent pas aux critères exigés : face à cette cruauté, ses certitudes quelquefois vacillent. Alors que les Alliés se rapprochent, l’organisation bien réglée des foyers Lebensborn se détraque, et l’abri devient piège. Que deviendront-ils lorsque les soldats américains arriveront jusqu’à eux ? Et quel choix leur restera-t-il ?</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Je me suis évidemment précipitée sur ce nouvel opus de Caroline De Mulder, <i>La pouponnière d'Himmler</i>, dès sa sortie. Si vous me suivez avec quelque régularité, vous savez que j'aime énormément l'oeuvre de Caroline De Mulder. Si vous n'avez jamais lu cette autrice remarquable, précipitez-vous sur <i>La pouponnière d'Himmler</i>.</span></p><p><span style="font-family: verdana;">L'un des tours de force de ce nouveau roman est de nous captiver à chaque page alors que, bon, on sait comment l'Histoire fracasse ce rêve monstrueux, eugéniste, barbare, des Lebensborn. La force du récit est telle que, très rapidement, il est très difficile de lâcher le livre. Et si vous ne connaissez pas cet aspect du nazisme, vous apprendrez des tas de choses (Caroline De Mulder sait de quoi elle parle, comme en témoigne la bibliographie indicative à la fin de l'ouvrage). Mais avant tout, ce roman est de la très grande littérature. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Un autre tour de force - mais je n'avais aucun doute en l'ouvrant - du roman est de nous plonger au coeur des ténèbres (oui bon c'est facile, pardon pour la formule), et j'ai éprouvé le même sentiment qu'en voyant <i>La Zone d'intérêt</i> : nous saisissons la banalité du mal de façon presque clinique, sans pathos, sans emphase, sans effets inutiles. L'écriture de Caroline De Mulder, brillante, toujours parfaitement juste, d'une grande beauté en dépit du sujet abordé, parvient à la fois à se situer à hauteur d'homme et de femme tout en offrant des clés de lecture qui dépassent évidemment le niveau individuel. Tout comme Glazer offre de purs moments de cinéma, en travaillant notamment le détail d'une image et la bande son, Caroline De Mulder saisit l'atrocité - de ce projet et du nazisme tout entier -</span><span style="font-family: verdana;">par la littérature, c'est-à-dire </span><span style="font-family: verdana;">par la force de l'écriture, notamment par l'importance accordée aux sensations. Il n'y a jamais un mot de trop, jamais une phrase dénuée de force. Le diable est dans les détails, ici aussi. On voit, on touche, on sent.</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Je repensais en le lisant à un récent ouvrage qui a valu à son autrice une belle polémique sur sa façon d'humaniser la tondue de Chartres jusqu'à la complaisance, en utilisant des moyens de fiction qui sont des choix impliqués. Je ne l'ai pas lu et ne prendrai donc pas parti, mais en lisant <i>La pouponnière d'Himmler</i>, je me disais qu'il n'y a rien de tel chez Caroline De Mulder. Elle parvient à nous montrer la complexité de l'Histoire en tant qu'elle affecte les destins singuliers, elle nous dit la banalité du mal, justement, mais cette banalité n'est pas une façon d'atténuer les responsabilités, elle en souligne l'horreur, tout comme elle souligne la redoutable efficacité du système d'endoctrinement nazi, l'instrumentalisation de l'humain. Et elle n'a pas besoin de grands discours pour cela, elle nous offre des personnages. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Et quels personnages! De Renée, la jeune Française séduite par un SS et répudiée, tondue, à Helga, jeune infirmière au service de ce projet, dont elle finit par percevoir les failles puis l'horreur, en passant par Marek, sublime Marek, déporté polonais affamé. Tous les trois sont agis plus qu'ils n'agissent : Marek, réduit à la plus grande impuissance, occupé à survivre et qui ne supporte plus d'être réduit à un ventre affamé, à l'animalité la plus élémentaire. Renée, qui prendra conscience qu'elle a été abusée et qui ne verra plus d'issue. Helga, qui se demandera : "J'étais bonne, mais pas du bon côté?"</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Aux corps et aux ventres pleins de vie et de nourriture (il faut nourrir les mères des futurs guerriers du Reich) s'oppose le corps tout en creux de Marek, mais à la fin, il n'est plus de ventre plein : tous sont vides et affamés, Marek comme les mères, les bébés comme les soignantes. A la devanture idyllique d'un <i>heim</i> succède la réalité horrifique du "réarmement démographique" (fais donc un peu plus attention aux mots, Manu, on est quelques uns à en comprendre le sens). Ce moment où le <i>heim</i> brûle ses archives, ses dossiers - forcément incriminants - est saisissant : tout et tous se couvrent de cendres, les cendres, funeste métonymie du nazisme. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Cette fausse enclave qu'est le <i>heim</i>, ce soi-disant refuge idyllique est rattrapé par la guerre, par la mort, dans leur brutalité qui ne peut plus être esquivée. Et ces deux destins de femmes, parmi tant d'autres trajectoires, nous le disent, comme le note Helga dans son journal, désemparée :</span></p><p><span style="font-family: verdana;">"Il n'y a pas d'un côté le bien, de l'autre le mal, il y a de longues glissades dont on ne se relève pas, et des passages quelquefois imperceptibles de l'un à l'autre. Quand on s'en rend compte, il est déjà trop tard.</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Cette question m'obsède, revient sous des formes toujours nouvelles, comme si elle était infinie. Choisit-on le mal ou est-ce lui qui nous choisit? J'étais bonne, mais pas du bon côté?</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ne pensons-nous pas tous être du côté de la lumière?"</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Et vous verrez, le roman parvient à se fermer sur deux sourires, et les dernières lignes sont des joyaux : l'humanité qui revient, dans un paysage de mort et de dévastation, la vie. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Caroline De Mulder, <i>La pouponnière d'Himmler</i>, Gallimard, 2024.</span></p><p><span style="font-family: verdana;"> </span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-28940132396236408952024-03-15T10:40:00.004+01:002024-03-15T10:40:49.511+01:00L'affaire Sylla de Solange Siyandje<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJVJXNn_AiXbMqAhyTinFYtv1ZO7skJRZ5c6JA0wAengjlBf7vmy8B_2erV-tIRTARD_pJNuB9lMMJS4-elWVT2Sj24hvinY9nqtiQaWr5zjdUjkiewE_uquO5vS20PPtGNb3wBQGenZteyEBrMzlUsi9ex6jCl10gKEfn18NrOlVG-Z5wGUHmnoS9zeAJ/s2421/G08087.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2421" data-original-width="1653" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJVJXNn_AiXbMqAhyTinFYtv1ZO7skJRZ5c6JA0wAengjlBf7vmy8B_2erV-tIRTARD_pJNuB9lMMJS4-elWVT2Sj24hvinY9nqtiQaWr5zjdUjkiewE_uquO5vS20PPtGNb3wBQGenZteyEBrMzlUsi9ex6jCl10gKEfn18NrOlVG-Z5wGUHmnoS9zeAJ/w273-h400/G08087.jpg" width="273" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;"><span style="font-family: verdana;">En quelques jours, cinq personnes meurent empoisonnées. La police se saisit de l’enquête et découvre qu’elles ont pour seul point commun d’avoir été en rémission de cancer après avoir consulté un guérisseur, Moussa Sylla. Immédiatement dans le viseur de la justice, Sylla fait appel à Béatrice Cooper pour le défendre. L’avocate remarque que l’une des victimes était en lien avec Merculix, l’entreprise pharmaceutique pour laquelle travaille son mari, mais elle est loin d’imaginer dans quel engrenage elle a mis le doigt…</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Voilà un premier roman à mes yeux bien prometteur. Je vous l'avoue, j'ai eu un peu de mal à entrer dedans, mais je ne saurais dire si le roman est vraiment en cause tant il m'est difficile en ce moment de trouver du temps et de l'énergie pour lire. Par conséquent, il faut qu'un roman m'agrippe très vite. Pourtant, en dépit de mon début de lecture un peu laborieux, j'ai persévéré et j'ai bien fait. Car si <i>L'affaire Sylla</i> débute comme un polar judiciaire classique, il se distingue rapidement : par son sujet plus original qu'il n'y paraît, et en tout cas pas si souvent traité que ça dans le roman noir français, par la force de ses personnages, par le dosage du réalisme (Solange Siyandje sait de quoi elle parle) et du romanesque. Les méandres d'une procédure deviennent des éléments de tension en eux-mêmes, et on se prend au jeu au point qu'il est difficile de lâcher le roman. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">J'ai aimé que Sylla ne soit pas posé comme une espèce de pantin un peu folklo au nom de la Raison toute puissante, et j'ai adoré le trio de personnages introduits ici, Béatrice, Clotaire et Serge. En revanche, pas de pitié pour l'industrie pharmaceutique, mais entre nous, comment être sympathique avec ces bandits? </span></p><p><span style="font-family: verdana;">J'espère donc retrouver les trois personnages à l'avenir, ou même sans eux, lire un prochain polar de Solange Siyandje. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Solange Siyandje, <i>L'affaire Sylla</i>, Gallimard Série Noire, 2024.</span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-636978706103737882024-03-15T10:14:00.003+01:002024-03-15T10:14:15.708+01:00La colère d'Izanagi de Cyril Carrère<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiM6QRLwUc7wW41Rci5JDjr8r7Bl2ZpP9ZSmdKPlCYszL9z5_8WRE-zuJho8ln79pCkhtUMLWlS3Y5lZw75NF7PQdKisEZwox7L6RJuNBxrsUkl22Rrcb4OE1Wi4zVRoFoDJ0xmg5EZhOU3v7CcpC72UFtDC1Jf5BmurHkRUCMx8rs3JAEe1XKi_ORYVTxB/s2421/files.jpeg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2421" data-original-width="1654" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiM6QRLwUc7wW41Rci5JDjr8r7Bl2ZpP9ZSmdKPlCYszL9z5_8WRE-zuJho8ln79pCkhtUMLWlS3Y5lZw75NF7PQdKisEZwox7L6RJuNBxrsUkl22Rrcb4OE1Wi4zVRoFoDJ0xmg5EZhOU3v7CcpC72UFtDC1Jf5BmurHkRUCMx8rs3JAEe1XKi_ORYVTxB/w274-h400/files.jpeg" width="274" /></a></div><br /><span style="background-color: white; font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="background-color: white; font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="background-color: white;"><span style="font-family: verdana;"><span style="caret-color: rgb(40, 40, 41); color: #282829;">Tokyo.</span><br style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(40, 40, 41); color: #282829;" /><span style="caret-color: rgb(40, 40, 41); color: #282829;">Un incendie criminel ravage le cœur de l’un des plus grands quartiers d’affaires au monde.</span><br style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(40, 40, 41); color: #282829;" /><span style="caret-color: rgb(40, 40, 41); color: #282829;">L’enquête est confiée à Hayato Ishida, flic prodige mais solitaire qui tente de se reconstruire en marge de la Crim. Il est rejoint par Noémie Legrand, Franco-Japonaise décidée à briser les chaînes d’un quotidien frustrant.</span><br style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(40, 40, 41); color: #282829;" /><span style="caret-color: rgb(40, 40, 41); color: #282829;">Sur leur chemin, un couple d’étudiants dans le besoin, à la merci d’une communauté où solidarité rime avec danger.</span><br style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(40, 40, 41); color: #282829;" /><span style="caret-color: rgb(40, 40, 41); color: #282829;">Et, tapi dans l’ombre, celui qui se fait appeler Izanagi, bien décidé à mettre son plan destructeur à exécution.</span></span></span></p><p><span style="background-color: white;"><span style="font-family: verdana;"><span style="caret-color: rgb(40, 40, 41); color: #282829;"><br /></span></span></span></p><p><span style="background-color: white; font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="background-color: white; font-family: verdana;">Vous le savez, je ne suis pas très attirée par le thriller, sans doute parce que j'en ai une mauvaise image, à cause de thrillers </span><span style="font-family: verdana;">états-uniens que je trouve pénibles, et parce que le roman noir me plaît davantage (j'aime quand ça se finit mal), et sans doute parce que je suis une connasse prétentieuse. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Les éditions Denoël m'ont envoyé ce roman de Cyril Carrère, et le fait que l'intrigue se déroule au Japon m'a attirée. J'ai lu avec plaisir cette histoire fichtrement bien construite, avec des personnages bien campés, et vous savez que je n'en parlerais pas si ce n'était pas le cas. Hayato Ishida est agaçant à souhait, et Cyril Carrère brosse avec lui un personnage d'enquêteur hors-normes comme on les aime. Et en fin connaisseur du Japon, il propose aussi aux lecteurs une enquêtrice qui est notre point d'entrée dans cette culture: Noémie Legrand, une Franco-japonaise. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">On ne peut plus claironner (si tant est que les choses se soient posées un jour comme ça) que le thriller, contrairement au roman noir, ne dit rien de la société. Non seulement je pense que même le <i>cosy crime</i> dit des choses de ce que nous sommes et vivons, de nos aspirations, mais plus directement, le thriller désormais s'empare de questions sociales, même s'il ne les traite pas du tout comme le roman noir (regardez Stephen King). Ici, Cyril Carrère, à travers les deux étudiants et les actes criminels commis, jette un regard sur le Japon contemporain et urbain, sur la dureté de cette société. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Surtout, Cyril Carrère ne cède pas à certaines facilités (à mes yeux) du thriller, qui m'ont longtemps tenue éloignée du genre. Il ne nous fait pas de retournements de situations aberrants et incessants. Et je me disais en refermant le roman : finalement, les thrillers - comme les grands récits d'énigme - jouent avec des procédés narratifs et littéraires. Vous allez encore dire que je fais mon intello à deux balles mais ici, l'auteur use de la rétention d'informations : je ne peux en dire plus sans vous gâcher le plaisir. Je n'ai rien vu venir, mais sachez que ça m'a semblé bien plus intéressant et malin que les plot-twists débiles de certains Helvètes qui jouent les malins ou de certains "maîtres" américains du thriller qu'on voit venir à dix mille kilomètres tant leurs recettes sont éculées. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">N'en déplaise aux détracteurs du genre (dont je suis aussi, bien souvent), le thriller d'aujourd'hui est certes un divertissement auquel on a le droit de ne pas adhérer, mais il est aussi une forme qui joue des possibilités de la narration pour offrir un jeu littéraire retors et très intéressant. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Je me dis depuis quelques temps qu'il faudrait se coller à une étude littéraire sérieuse, d'ampleur, du thriller. Il est le plus commercial ET le moins légitime dans la galaxie des fictions criminelles, ce qui explique que les universitaires ne s'y salissent pas les pattes, mais je pense qu'il y a quelque chose de passionnant à faire, sur son histoire et son évolution. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Cyril Carrère, <i>La colère d'Izanagi</i>, Denoël Sueurs froides, 2024. </span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-84908707747133300352024-02-25T16:45:00.000+01:002024-02-25T16:45:04.957+01:00Nos armes de Marion Brunet<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgL_V9aLXKlIzZNha8hMJbrFTPME37gLTyDC1_ygekV52vCkgtih9GaKC1r9XobW2D-rhHEf4fmMZxXlYHNJoLTbFIsD68uyzl9v8j91dvGcAw09KMt8wEuJDRwTsRwY93bU3DonT9EeqYQES74e_OOr7y-Mro36S_hJehaziDDbRlW39sosak2Kz9-z7xO/s800/9782226471000-j.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="800" data-original-width="547" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgL_V9aLXKlIzZNha8hMJbrFTPME37gLTyDC1_ygekV52vCkgtih9GaKC1r9XobW2D-rhHEf4fmMZxXlYHNJoLTbFIsD68uyzl9v8j91dvGcAw09KMt8wEuJDRwTsRwY93bU3DonT9EeqYQES74e_OOr7y-Mro36S_hJehaziDDbRlW39sosak2Kz9-z7xO/w274-h400/9782226471000-j.jpg" width="274" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p style="box-sizing: inherit; font-size: 16px; margin: 0px 0px 1.4rem;"><span style="font-family: verdana;"><span style="box-sizing: inherit;">1997.</span> <span style="box-sizing: inherit;">Mano et Axelle, aussi passionnées que révoltées, évoluent dans le milieu engagé et militant d’une ville étudiante</span>. Exaltées par leurs idéaux, entourées par un groupe soudé, elles rêvent d’un autre ordre social tout en laissant naître entre elles un amour fou. Jusqu’au jour où elles participent à un braquage qui tourne mal : l’une tue un policier et écope d’une lourde peine de prison, l’autre parvient à s’échapper. </span></p><p style="box-sizing: inherit; font-size: 16px; margin: 0px 0px 1.4rem;"><span style="font-family: verdana;"><span style="box-sizing: inherit;">Vingt-cinq ans plus tard</span>, dans la campagne où elle a posé sa caravane, Mano attend, bouleversée, car une femme la cherche. Est-ce la possibilité de retrouvailles si longtemps rêvées ou le moment de solder les comptes ?</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Marion Brunet est une des autrices les plus talentueuses du roman (noir) à mes yeux. Elle a cette capacité de suivre des hommes et des femmes dans leur intimité, et d'y saisir ce que l'époque, ce que l'Histoire impriment aux corps et aux esprits, de saisir à travers des trajectoires singulières la dimension sociale. J'ignore si l'on peut dire que <i>Nos armes</i> est son roman le plus personnel, mais elle fait le portrait de jeunes hommes et de jeunes femmes qui pourraient être ses frères, ses soeurs, tant ils lui sont proches par l'âge. Il ne me semble pas pour autant qu'elle fasse un roman générationnel : elle saisit la jeunesse, elle saisit les soubresauts de l'Histoire, et il n'y a rien de nostalgique ou de factice. Lorsque les évènements relatés commencent, nous sommes quelques temps après les grandes grèves de 1995, et quand le roman s'achève, nous sortons des mouvements de Gilets Jaunes. Entre les deux, des parcours brisés, des vies saccagées, et un désenchantement douloureux. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Mieux que personne elle sait retrouver l'énergie et la révolte de la jeunesse, à travers son groupe de grands adolescents qui rêvent de révolution. Elle dessine de délicats portraits de jeunes gens déjà malmenés mais encore pleins de fougue. C'est un talent rare : je lis tant de romans (noirs ou non) qui s'imaginent saisir l'adolescence et la jeunesse alors qu'ils en proposent une vision d'adulte nostalgique qui n'a pas grand-chose à voir avec la fêlure adolescente. Elle saisit aussi l'ivresse des corps, les élans du désir, et c'est magnifique. C'est une jeunesse fiévreuse, et j'ai pensé à ces mots d'Henri Michaux : "</span><span style="background-color: white; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Si nous ne brûlons pas comment éclairer la nuit?"</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Axelle et Mano, mais aussi Charly, Jicé et Nacer (Paola me semble en retrait) partagent les idéaux d'une partie de la jeunesse à la fin des années 1990. Ils ont la maladresse de leur jeune âge, en dépit d'une certaine éducation politique. Ils n'ont pas grand-chose à voir avec leurs aînés révoltés et sont plus libertaires que "gauchistes". A travers eux, Marion Brunet saisit le désenchantement qui a commencé après la chute du Mur (dont il est question vers la fin du roman). Si je suis plus âgée que les protagonistes, je n'avais pas vingt ans quand le Mur est tombé, et j'avais comme eux l'illusion que quelque chose commençait. Le roman est ainsi ponctué des séismes majeurs de la fin du XXème et du début du XXIème siècles, et ce n'est pas un détail, pas un décor. <i>Nos armes</i> embrasse le délitement du tissu social, la reprise en mains (avait-elle cessé?) des plus fragiles, des "précaires" comme on dit, et le constat est bien amer. Leur colère ne pèse pas lourd face à l'adversité. Police, justice, milieu carcéral, la violence d'Etat est constante, et même de plus en plus forte. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Marion Brunet entrelace avec une grande maîtrise passé et présent, récit d'Axelle et narration à propos de Mano, et déstabilise par la pirouette finale, pourtant si logique (chut!). <i>Nos armes</i> est un superbe roman d'amour, un amour qui est dans cette époque, ce contexte, une transgression (qui se fiche de l'être). C'est, sur fond de révolté matée, d'écrasement de toute velléité de changement social, un amour tragique (nul suspense à ce sujet). </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Et puis une fois encore, Marion Brunet excelle lorsqu'il s'agit de nous broyer le coeur, et cela sans pathos. La scène où le grand-père rend pour la première fois visite à Axelle en prison m'a laissée en miettes (et qu'il est beau, ce personnage de grand-père). L'écriture est tout en finesse, d'une beauté à couper le souffle. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Nouvel opus, nouvelle réussite : Marion Brunet est une très grande autrice, mais ça, on le savait déjà, non? </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Marion Brunet, <i>Nos armes</i>, Albin Michel, 2024.</span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-22077873424983035122024-02-09T14:18:00.004+01:002024-02-09T14:18:20.167+01:00Hôtel Carthagène de Simone Buchholz<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhxH3w7W5zS4mpG0caARLyE53IbRmYlS06xbZtNXpM4e1EyKibSNc5VRtVFEWhG__SkRNOPvtSVwybL_72HIjsDZJb5wX7nn4PdckaXEqRIESqVDTvrCnWEF7oZRGjL49OcsFgNV_0VyujYMrjooP73M9NCAxPWClzfpjX2QiqmSe9MrYwkcBzb3UJHRklo/s1273/buchholz-hotel-carthagene.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1273" data-original-width="900" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhxH3w7W5zS4mpG0caARLyE53IbRmYlS06xbZtNXpM4e1EyKibSNc5VRtVFEWhG__SkRNOPvtSVwybL_72HIjsDZJb5wX7nn4PdckaXEqRIESqVDTvrCnWEF7oZRGjL49OcsFgNV_0VyujYMrjooP73M9NCAxPWClzfpjX2QiqmSe9MrYwkcBzb3UJHRklo/w283-h400/buchholz-hotel-carthagene.jpg" width="283" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(31, 31, 31); color: #1f1f1f; margin-bottom: 1rem; margin-top: 0px; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Aujourd’hui, hôtel River Palace. Dernier étage. Douze hommes armés prennent en otage les clients du bar. Ils ignorent qu’un jeune retraité y fête son anniversaire avec ses anciens collègues flics, et la procureure Chastity Riley.<br style="box-sizing: border-box;" />À l’extérieur, les équipes spéciales se mettent en place.</span></p><p style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(31, 31, 31); color: #1f1f1f; margin-bottom: 1rem; margin-top: 0px; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">1984. Colombie, Carthagène. Henning arrive d’Allemagne pour prendre un nouveau départ. Plein de rêves, le jeune homme vivra-t-il une ascension fulgurante au pays des cartels de drogue ?</span></p><p style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(31, 31, 31); color: #1f1f1f; margin-bottom: 1rem; margin-top: 0px; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Je suis une veinarde : grâce aux bons soins de Caroline de Benedetti, j’ai reçu un exemplaire du nouveau roman de Simone Buchholz, <i>Hôtel Carthagène</i>, sorti hier en librairie. Et j’ai embarqué avec ravissement. Le roman alterne entre le huis-clos de plus en plus angoissant du bar de l’hôtel River Palace et l’équipée de Henning par-delà les océans, dont se dégage pourtant la même sensation étouffante. Evidemment, je n’avais même pas lu la quatrième de couverture, je ne savais donc pas qu’il y avait une prise d’otages. Par conséquence, le premier et très bref chapitre, qui nous projette en avant par une des prolepses (z’avez vu comment je cause ?) auxquelles le roman noir nous a habitués, m’a intriguée et confortée dans l’idée que tout allait très mal se passer. Néanmoins, j’ai quasiment sursauté quand, à la fin d’un chapitre page 21, il est écrit : </span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">« à ce moment-là retentissent les premiers coups de feu. » </span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Ah la la ! toujours cet art de la surprise, de la gifle finale. Il faut dire qu’en dehors de cet incipit qui fleurait bon la tragédie, ça commençait piano. Au bon sens du terme et avec la mélancolie de Chastity. Faller fête son anniversaire, et autour de lui, ce sont ceux qu’on aime, qui nous tordent le cœur depuis le début, exception faite de Stepanovic qui se fait attendre. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Et vous voyez, beaucoup de romanciers, à partir d’une situation analogue, nous auraient sorti le grand jeu (et certains avec talent) de l’action, du retournement de situation sur fond d’actes héroïques. Mais pas Simone Buchholz. Chastity et ses fidèles acolytes ne sont pas des fous, ce ne sont pas des stéréotypes sur pattes. Et puis oh ! c’est « open bar », ça tombe bien. Quoi de mieux pour supporter une prise d’otages ? <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">A travers le destin de Henning, c’est une nouvelle facette de la criminalité organisée – sur la base du trafic de stupéfiants – que le roman explore : l’engrenage de l’argent facile, des liens que l’on ne peut défaire, de la passivité qui se mue en pure criminalité. C’est une mécanique en tous points comparable à celle de nos sociétés capitalistes, avec les dindons de la farce qui font tourner le business au quotidien, assurent la production, la logistique et la vente, et les gagnants dégueulasses, ceux qui sont en capacité de blanchir et réinvestir, et qui s’en tirent. Ce bar d’hôtel est un microcosme : </span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">« Trop d’armes, trop d’hommes en costumes. Au fond, la situation n’est pas plus merdique que partout ailleurs sur la planète. »<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Comme tout héros de roman noir qui se respecte, Henning est un personnage tragique, qui fait de mauvais choix, qui les paie au prix fort, et se révolte : sa révolte est nihiliste, mais elle touche au cœur. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Dans ce huis-clos, Chastity ne s’y trompe pas, elle sait quelles sont les forces en présence et repère ces hommes qui achètent tout, y compris les femmes :<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">« Je n’éprouve aucune sympathie particulière pour ces femmes, mais encore moins pour ces hommes. Parce que, manifestement, ils estiment que s’acheter des femmes est une bonne idée. Que c’est légitime et qu’ils le font uniquement parce qu’ils peuvent se le permettre.<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Mais je suis peut-être injuste, comme souvent quand j’ai envie de mettre le feu au capitalisme. »<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">La suite montrera qu’elle n’est pas injuste et qu’elle a vu clair. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">De volume en volume, l’univers de Simone Buchholz se fait plus sombre, plus tragique. Les pointes d’humour sont pourtant présentes, mais elles sont aussi teintées de douleur, comme dans ces réflexions de Stepanovic :<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">« La police est organisée policièrement.<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Stepanovic supporte à peine l’ordre.<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">En général il supporte mal l’ordre inhérent à la police parce qu’il ne croit pas à l’ordre : selon lui, c’est une tentative de diversion ridicule des gens pour oublier qu’ils sont mortels. »<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">La police est organisée policièrement : que voulez-vous, je trouve ce genre de formule irrésistible. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;"><i>Hôtel Carthagène</i> laisse nos personnages dans l’introspection, parce qu’ils sont dans l’attente. Chastity observe ses amis, ses amants, et les preneurs d’otages. Elle n’éprouve pas réellement de peur, en tout cas pas pour elle-même. Elle mesure l’étendue du désastre, encore et toujours. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Et dans ce marasme qui ne saurait trouver d’issue heureuse, on redoute que jamais Chastity et Stepanovic ne se rejoignent. Stepanovic finit par se mettre en mouvement, et j’emploie ces termes à dessein, parce que ce n’est pas Jason Bourne, c’est Ivo, dont le corps se fait plus lourd avec les années, mais qui est mû par quelque chose qui le dépasse et le grandit :<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">« Il commence à grimper, échelon après échelon ; même si son corps est lourd et pataud, moins agile qu’autrefois, son âme le tire vers le haut. Il avance nettement plus vite que prévu parce qu’il est en chemin vers elle. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Le reste ne compte pas. »<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Et qu’importe que son initiative n’enclenche rien de décisif pour l’action, qu’importe qu’il arrive trop tard pour l’un de nos otages préférés… Nous avançons avec lui vers Chastity. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Nous avons voyagé avec Henning, mais le centre du monde, c’est le bar du River Palace, c’est là que le monde perd ou retrouve son équilibre. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Une fois de plus, Simone Buchholz excelle dans l’art du roman noir, dont elle utilise les codes sans cynisme et sans naïveté, nous écrabouillant le cœur avec sa musique si délicate, ses chapitres aux allures de poème de prose. On en redemande. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Simone Buchholz, <i>Hôtel Carthagène</i> (<i>Hotel Cartagena</i>), L'Atalante, coll. Fusion, 2024. Traduit de l'allemand par Claudine Layre. </span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;"> <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;"> </span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-49740153138811920162024-01-21T19:04:00.002+01:002024-01-21T19:04:08.089+01:00Bye Bye Elvis de Caroline De Mulder<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEibALP3GEfyGmw5xgLREDVhPVJQe-68jQnUj7kyfPmK3gQW2ArpWC-zzBpUJGoKz9YFTNLd8HWe7CN_GXdjhIimBnfa35zB_7EZsyeSihCxxiPzc4oGgyVjqaS1t6MpQ56erT49k2T9MO0FRzlTgAv6jj4wy4_afS-dL9C5G9vpUSncC0gLpiROCqAQgg-g/s1000/617wEGN-I-L._AC_UF1000,1000_QL80_.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1000" data-original-width="649" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEibALP3GEfyGmw5xgLREDVhPVJQe-68jQnUj7kyfPmK3gQW2ArpWC-zzBpUJGoKz9YFTNLd8HWe7CN_GXdjhIimBnfa35zB_7EZsyeSihCxxiPzc4oGgyVjqaS1t6MpQ56erT49k2T9MO0FRzlTgAv6jj4wy4_afS-dL9C5G9vpUSncC0gLpiROCqAQgg-g/w260-h400/617wEGN-I-L._AC_UF1000,1000_QL80_.jpg" width="260" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation de l'éditeur</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(15, 17, 17); color: #0f1111;">Le 16 août 1977 à Graceland, ils sont des milliers de fans à chercher à voir une dernière fois le corps sacré d’Elvis Presley, décédé de façon brutale à 42 ans. Entre les murs de ce qui deviendra un lieu de pèlerinage, son entourage, financièrement à ses crochets, fait surtout le deuil de la poule aux œufs d’or.<br style="box-sizing: border-box;" /><br style="box-sizing: border-box;" />Dix-sept ans plus tard, à Paris, Yvonne, veuve débonnaire, a fort à faire avec John White, son singulier patron, un Américain autrefois clinquant, mais désormais sur la pente poisseuse de la précarité. Quel étrange fil relie la créature fabriquée et le vieil homme sur le déclin?<br style="box-sizing: border-box;" /><br style="box-sizing: border-box;" />De l’ascension fulgurante et inégalable d’un péquenaud de Tupelo à la mort précoce d’une superstar rongée par les adjuvants chimiques et transfigurée par la pression, </span><span class="a-text-italic" style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(15, 17, 17); color: #0f1111; font-style: italic !important;">Bye Bye Elvis</span><span style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(15, 17, 17); color: #0f1111;"> se fait autant un roman de la dévoration que de l’adoration. En laissant planer le doute sur le devenir des idoles, Caroline De Mulder sème le trouble et nous rend captifs d’une narration double et hypnotique.</span></span></p><p><span style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(15, 17, 17); color: #0f1111;"><span style="font-family: verdana;"><br /></span></span></p><p><span style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(15, 17, 17); color: #0f1111;"><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Ceux qui me connaissent savent que j’aime ce qu’écrit Caroline De Mulder. Je n’allais pas laisser passer la réédition de <i>Bye Bye Elvis</i>. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Hormis le fait que le livre évoque le King, je ne savais rien du roman en le commençant. En ce qui me concerne, le nom de Caroline De Mulder suffit. J’ai d’abord été décontenancée par l’alternance entre ces deux récits, distants dans le temps et dans l’espace. Mais John, l’Américain vieillissant qui vit à Paris sur les restes d’une gloire passée, et Elvis, la star absolue d’une Amérique triomphante, ont bien des points communs. Caroline De Mulder a un talent inouï pour évoquer les corps, la décrépitude de la chair, la jeunesse de la peau et des muscles qui se débinent, sous le coup des années ou des excès (ou les deux, mon capitaine). John a quelque chose de pathétique, de touchant et de répugnant tout à la fois, mais Elvis ploie lui aussi, très jeune, sous le poids d’une gloire qui l’étouffe, débordant ses costumes trop brillants, trop serrés. Légèrement déviant, toxicomane jusqu’à l’os, il n’est pas l’étoile brillant au firmament, mais une créature qui ne se possède plus, et cherche toute sa vie à panser ses blessures.<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">L’écriture de C. De Mulder provoque le malaise, un peu à la manière de certains écrivains du XIXème siècle, précisément parce qu’elle capte le malaise, l’excès en toutes choses, mais elle bouleverse aussi, parce qu’elle livre une incarnation de la légende, et le mot d’incarnation est bien celui qui convient. Elvis le blondinet devient le sex-symbol aux cheveux aile de corbeau, au regard incandescent, et d’emblée, il ploie sous le poids de ce qu’il symbolise. John se désagrège corps et âme et tente de donner le change, de se donner le change, à vrai dire. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Avec Yvonne, qui prend soin de John à Paris, John et Elvis, Caroline de Mulder nous offre trois destins fracassés, brise les idoles, ne donne aucune réponse. Il y a des moments loufoques, mais tragiquement loufoques, un paradoxal mélange de malaise et de grâce, des questions sans réponse. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Cette fausse bio-fiction est une merveille vénéneuse et douce, fascinante et troublante, signée Caroline De Mulder. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">PS : en prime, une excellente postface sur le roman.</span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;"> </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(15, 17, 17); color: #0f1111;"></span></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Caroline De Mulder, <i>Bye Bye Elvis</i>, Espace Nord, 2023.</span><span style="font-family: Times New Roman, serif;"><o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">Le roman avait été publié en 2014 chez Actes Sud.</span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-26610547318800107902024-01-13T10:34:00.003+01:002024-01-13T10:34:38.445+01:00Le concert de Muharem Bazdulj<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiAfchlYgOqdrclqEezYAJyBx2SteyF1sUtbZdooah76AKWS905AGYmnoUpllYRC5NbZiiISV8gZlZiH4XM3xgjXXGDlQhEoEIPy-3r-T5QdEpSbqr_v4XHvpM0Dk_gCzsk6o0HRfl27gN7ilxIDeOic_PArA16FXV3Z-hJOi3cOYl1vMPptXrtAqHOaGUn/s807/bd659a_1141617ef2914fe9b5103eeac554724b~mv2.jpg.webp" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="807" data-original-width="538" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiAfchlYgOqdrclqEezYAJyBx2SteyF1sUtbZdooah76AKWS905AGYmnoUpllYRC5NbZiiISV8gZlZiH4XM3xgjXXGDlQhEoEIPy-3r-T5QdEpSbqr_v4XHvpM0Dk_gCzsk6o0HRfl27gN7ilxIDeOic_PArA16FXV3Z-hJOi3cOYl1vMPptXrtAqHOaGUn/w266-h400/bd659a_1141617ef2914fe9b5103eeac554724b~mv2.jpg.webp" width="266" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="caret-color: rgb(195, 239, 255);">Sarajevo, 23 septembre 1997. U2 est en plein dans sa tournée Pop Mart, et offre aux spectateurs ce soir-là un concert mythique ! Le premier show d'un groupe majeur en Bosnie depuis la fin de la guerre en 1995. Un pur moment de rock'n'roll. Tous les classiques font résonner le stade : « Miss Sarajevo » bien sûr, jusqu'à « Sunday Bloody Sunday », et aussi « New Year's Day », où Bono sollicite l'aide du public, car il avait perdu sa voix le matin même… Avant de ponctuer par son célèbre « Viva Sarajevo ! Fuck the past, kiss the future! ».</span><br style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(195, 239, 255); font-feature-settings: inherit; font-kerning: inherit; font-optical-sizing: inherit; font-size-adjust: inherit; font-stretch: inherit; font-variant-alternates: inherit; font-variant-east-asian: inherit; font-variant-ligatures: inherit; font-variant-numeric: inherit; font-variant-position: inherit; font-variation-settings: inherit; line-height: inherit;" /><span style="caret-color: rgb(195, 239, 255);">Le roman de Muharem Bazdulj suit une galerie de protagonistes Sejo le jour du show légendaire. De Marko, fan inconditionnel, à Zeljko, supporter de foot, qui se doit d’être présent au stade, jusqu’au journaliste croate qui couvre l'événement… Cette nuit magique fut pour tous le symbole d’un retour à la normale dans cette région depuis trop longtemps en tension. Elle est devenue la frontière métaphorique entre le conflflit et la paix, et restera pour U2, selon leur déclaration, leur concert préféré.</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Le principe est simple : les chapitres nous présentent une succession de personnages, qui tous se rendent au concert de U2 du 23 septembre 1997 à Sarajevo. C'est autant un évènement politique que musical, par lequel U2 entend marquer, au milieu de sa tournée PopMart, le fragile retour à la normale d'un pays qui sort de la guerre. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Il y a là tout ce qui me plaît : un roman kaléidoscopique, qui après le chapitre de présentation de l'évènement passe de personnage en personnage, jusqu'au concert, point d'orgue et de rassemblement, et ses lendemains. Il y a la musique, car adolescente, j'ai aimé U2 (j'avais 16 ans à la sortie de The Joshua Tree, que j'écoutais en boucle alors), et j'avais adoré que le groupe fasse monter sur scène Salman Rushdie, qui n'était plus apparu en public depuis le lancement de la fatwa. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Muharem Bazdulj a un sacré talent pour brosser le portrait de ses personnages, pour les faire exister en quelques lignes par le prisme de cet évènement. Il restitue avec une force incroyable l'élan de vie de cette jeunesse qui a vécu l'horreur, car c'est cela qui l'intéresse : la pulsion de vie, et non la mort. On perçoit pourtant les fractures, les tragédies (à travers, notamment, les superbes Azra et Sejo) : le poids de l'Histoire est là.</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Il écrit aussi avec délicatesse ces moments fragiles et improbables, Larry Mullen Jr et The Edge devant leur bière dans la nuit, Brian Eno à la terrasse d'un resto au petit matin. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Pour ma part, j'ai lu d'une traite <i>Le concert</i>, et je l'ai refermé avec émotion. Ceux qui me connaissent savent mon goût pour les littératures de l'est, comme on dit, et mon sentiment d'une histoire commune et d'une forte appartenance européenne. Et c'est pour cela que <i>Le concert </i>m'a tant touchée. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Muharem Bazdulj, </span><i><span style="font-family: verdana;">Le concert (</span></i><span style="font-family: verdana;"><i style="caret-color: rgb(32, 33, 34);"><span style="color: black;">Концерт</span>)</i>, Tro</span><span style="font-family: verdana;">pismes Editions, 2024. Traduit du serbe par Zivko Vlahovic.</span></p><p><br /></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-5048043890871215312024-01-13T09:57:00.003+01:002024-01-13T09:57:19.963+01:00Il s'appelait Doll de Jonathan Ames<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgE9nOV1K2XyNJ0h4x9NIE4-W_ecymT8DzNwykYWLxYWcUApJWovew7fb9jP8WL2xIKUXx3EmjoO522Pxchh8aobBNId3xfOWGMTRLb63Y8XpyfvM3Jy5zWFg0cFG5Iz2-_lgiVmmdRDNaaL_vv2Rfe5wczR7I7MecCpvL-T6ZpIgMthE033ngDBvQQ4fpc/s2591/LO0107.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2591" data-original-width="1760" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgE9nOV1K2XyNJ0h4x9NIE4-W_ecymT8DzNwykYWLxYWcUApJWovew7fb9jP8WL2xIKUXx3EmjoO522Pxchh8aobBNId3xfOWGMTRLb63Y8XpyfvM3Jy5zWFg0cFG5Iz2-_lgiVmmdRDNaaL_vv2Rfe5wczR7I7MecCpvL-T6ZpIgMthE033ngDBvQQ4fpc/w271-h400/LO0107.jpg" width="271" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;"><span style="font-family: verdana;">Happy Doll, alias Hank Doll, une cinquantaine d’années, habite Los Angeles. Il est détective privé le jour et vigile dans un salon de massage la nuit, après une carrière dans la Navy et dans la police. Lorsque son ami Lou Shelton vient lui demander de lui donner un rein qui lui sauvera la vie, il hésite pendant une nuit. Cependant, le lendemain matin, les choses se compliquent alors que Lou vient s’écrouler, mortellement blessé par balle, dans ses bras et lui confie, avant d’expirer, un gros diamant. Commence alors pour Hank toute une série de péripéties rarement agréables, sur les traces des assassins de Shelton dans les bas-fonds de L.A.</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Hasard ou non des parutions, j'ai lu ce roman juste après avoir relu <i>Le Grand sommeil</i> de Raymond Chandler, dans l'épatante traduction de Benoît Tadié (Série Noire), ce qui m'a permis de saisir la parenté entre les deux types d'univers et d'écriture. Jonathan Ames livre avec <i>Il s'appelait Doll</i> une merveille d'hommage au roman noir américain, et si cela m'a fait penser à Chandler, c'est qu'il y a chez Ames une même mélancolie, une tendance contemplative qui vous tord le coeur. Hank Doll est un privé qui, faute de clients en nombre suffisant, est aussi vigile dans un salon de massage le soir ; comme il se doit, il est un brin cynique mais d'une lucidité et d'une loyauté sans faille, comme Marlowe. Ce n'est pas un loser même s'il est un peu paumé à ce moment de sa vie. Ex-marine, ex-flic, il en a sous le capot, en quelque sorte. C'est aussi un solitaire, dont le meilleur ami est George, son chien. Là se trouve une trouvaille du roman : dépeindre la relation entre un homme et son chien, sans niaiserie, en restituant la force qui peut lier un individu et son animal. C'est magnifique, croyez-moi. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">A la fois maladroit et intelligent, Doll ne tarde pas à mettre le doigt là où il ne faut pas, et à déclencher une série de catastrophes. </span><span style="font-family: verdana;">L'intrigue est rocambolesque à souhait - mais rappelez-vous, celles de Chandler étaient parfois bigrement embrouillées - et on ne peut lâcher le roman. On commence avec une possible greffe de rein et on termine par le démantèlement d'un trafic énorme. Rappelons que l'auteur est scénariste : chez certains, ça donne une écriture transparente (et sans intérêt), chez Ames cela se traduit par une efficacité incroyable, un sens du rythme, sans que soit oubliée l'écriture romanesque. Il y a aussi ce ton, distancié, légèrement sarcastique, très hard-boiled : de l'humour sans gros sabots, ça fait du bien. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><i>Il s'appelait Doll</i> est un bijou de roman noir, dans lequel Jonathan Ames ne se contente pas de faire le malin ("regardez comme je connais bien mes classiques, je vous fais un roman méta parce que je suis tellement intelligent") mais livre un vrai et grand roman noir. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Jonathan Ames, <i>Il s'appelait Doll </i>(<i>A Man Named Doll</i>), Joëlle Losfeld, 2024. Traduit de l'anglais (USA) par Lazare Bitoun. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><br /></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-67752401604191882832024-01-03T17:07:00.001+01:002024-01-03T17:07:19.572+01:00Chevreuil de Sébastien Gendron<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiRprqir6LyIFJBHJ6NPV_Fzxi-edzMs4ES1Y3ZSQEKWSClthkBedKu0-3yO5hzze-1lnMwXOEWq7nxMofzUyTaw1WQs95dz8qVcyWm87WHx-2KQs88J4wR5GS0KmPAPM9WdgGXJch8Fc4fFSEi_mMHjAcIlb-2rTc_KVj2Ik9HfDnBJ1VLB-uZd-9FsF9S/s590/Gendron.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="590" data-original-width="406" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiRprqir6LyIFJBHJ6NPV_Fzxi-edzMs4ES1Y3ZSQEKWSClthkBedKu0-3yO5hzze-1lnMwXOEWq7nxMofzUyTaw1WQs95dz8qVcyWm87WHx-2KQs88J4wR5GS0KmPAPM9WdgGXJch8Fc4fFSEi_mMHjAcIlb-2rTc_KVj2Ik9HfDnBJ1VLB-uZd-9FsF9S/w275-h400/Gendron.jpg" width="275" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;">Tout va bien pour Connor Digby. Sujet britannique, auteur de romans jeunesse à succès, il vient de retrouver l’amour en la personne de Marceline, une femme tout à fait à sa mesure et, pour ainsi dire, tombée du ciel. Seulement voilà, le village français dans lequel il est installé depuis une demi-douzaine d’années se met brusquement à le détester. Il faut dire que la population locale, franchement raciste et réactionnaire, n’a que cet étranger à se mettre sous les crocs.</span><br style="caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;" /><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;">Un vent épique se lève enfin sur ce petit coin de France, et Connor et Marceline sont bien décidés à en profiter pour rejouer la guerre de Cent Ans.</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Vous ne connaissez pas le village de Saint Piéjac? Si, vous connaissez. OK, il ne s'appelle peut-être pas Saint Piéjac, mais vous le connaissez. Vous y vivez peut-être. C'est un coin comme il existe par milliers dans notre beau pays. C'est un concentré de la bêtise, de la méchanceté et de la haine de l'autre, tristement ordinaire. Il faut tout le talent de Sébastien Gendron pour en faire un lieu romanesque, et il en a, du talent ! </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Il faut l'imaginer assembler les pièces de son jeu de massacre : un Anglais pas très intégré parmi les ploucs franchouillards, prompts à détester tout ce qui vient d'ailleurs, une femme en fuite qui va trouver refuge dans ses bras, et une poignée d'autochtones comme on en fait par millions, crétins décérébrés, petits coqs de fumier local, chasseurs aux rêves de conquérants, et méchants très méchants. Secouez le tout, hissez le drapeau (britannique), et c'est de la nitroglycérine qui explose en mille couleurs. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Sébastien Gendron a l'art de croquer avec férocité et jubilation ce qu'il y a de pire dans notre société, et là où certains nous livrent une vision enchantée de nos bourgades ou une vision décliniste de la ruralité, il s'en donne à coeur joie dans la satire. Le Saint Piéjac de <i>Chevreuil</i>, c'est un village français, avec ses petits notables qui font la pluie et le beau temps, son culte de la bagnole et des engins motorisés avec leurs mochetés de parking, ses privilèges de hobereaux dégénérés et armés. C'est un village français d'aujourd'hui mais qui voudrait bien vivre encore dans un "hier" idéalisé et factice, fermé sur lui-même et qui fantasme les périls venus d'ailleurs. Point d'Arabes ou de Noirs dans les parages? Qu'à cela ne tienne, on s'en prend aux Ukrainiens venus manger le pain des Français, et à cet Anglais, une sorte d'ennemi héréditaire aux yeux de ces idiots. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Tout ça est à la fois terrifiant et hilarant, parce que Sébastien Gendron a le sens des situations absurdes et des dialogues ébouriffants. <i>Chevreuil</i> est un roman noir héroï-comique, qui nous fait une épopée à partir de presque rien, du trivial, concluant dans un final "hénaurme", tandis que Il Duce, imperturbable, continue son chemin (lisez, vous comprendrez). </span></p><p><span style="font-family: verdana;">L'air de rien, il rassemble un vrai bestiaire, on se régale avec les titres de chapitres, et tout ça se finit avec des asticots. Nos tristes sires, qui rêvent de l'affrontement avec le chevreuil, véritable seigneur des lieux, indifférent et majestueux, ne sont que des sangliers qui foncent aveuglément et finissent par se rentrer dedans. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Mention spéciale à la scène d'ouverture : la gamine qui se fait bouffer par les lionceaux, je suis fan. Au risque de me répéter : lisez, vous comprendrez. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">On passe d'un zoo à l'autre, en somme. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Embarquez avec Connor et Marceline, ça vous donnera du pep's et de la férocité pour commencer 2024 comme il se doit. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Sébastien Gendron, <i>Chevreuil</i>, Gallimard, La Noire, 2024. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-8943453139183208692023-12-17T14:28:00.005+01:002023-12-17T14:28:51.763+01:00Objectif Zéro d'Anthony McCarten<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjn7OT2nZN9p4XpU4-EE59KrEcjcdERqMs5D84k-Hr32JTEoE9bWm7ybcuMWYzjFLamRmkVHaVYGjg3N_U2IqYeE7ua046CVWEsP_CLNPrhdLEQYqYO2vQuiWdVR53Wawbg2qxJJe0s_Q5a8WVjh9V5fgTMoAdaQh4cfsAbL9_NZmLCpprUvXbhmEAJPh9n/s1211/B27084.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1211" data-original-width="827" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjn7OT2nZN9p4XpU4-EE59KrEcjcdERqMs5D84k-Hr32JTEoE9bWm7ybcuMWYzjFLamRmkVHaVYGjg3N_U2IqYeE7ua046CVWEsP_CLNPrhdLEQYqYO2vQuiWdVR53Wawbg2qxJJe0s_Q5a8WVjh9V5fgTMoAdaQh4cfsAbL9_NZmLCpprUvXbhmEAJPh9n/w274-h400/B27084.jpg" width="274" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><span style="font-family: verdana;"><span style="background-color: white; caret-color: rgb(34, 34, 34); color: #222222;">Ils sont dix, viennent des quatre coins des États-Unis, et partagent le même but : gagner trois millions de dollars. Le bêtatest « Objectif Zéro », imaginé par initiative Fusion, tient en une ligne. Les participants ont deux heures pour disparaître des radars. Si, au bout de trente jours, ils ne sont toujours pas repérés, ils remportent la coquette somme.</span><br style="caret-color: rgb(34, 34, 34); color: #222222;" /></span><p><span style="background-color: white; caret-color: rgb(34, 34, 34); color: #222222;"><span style="font-family: verdana;">Relativement facile ? C’est sans compter les agents de Fusion, une des entreprises les plus innovantes et puissantes au monde, qui sont lancés à leurs trousses. Drones, algorithmes prédictifs, capteurs de reconnaissance faciale et de mouvement… Fusion est sûre de débusquer tous les participants et de recevoir ainsi l’aval de la CIA pour lancer une application révolutionnaire de surveillance des citoyens. Mais une jeune femme sous-estimée par les algorithmes va leur donner du fil à retordre.</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">A priori, <i>Objectif Zéro</i> n'a rien pour me plaire : il relève du techno-thriller et ce n'est pas ce que je préfère. Mais je l'ai reçu en service presse, et même si je ne l'avais nullement demandé, j'ai fini par l'ouvrir, parce que j'avais envie d'un page-turner. Et franchement, Anthony McCarten ne manque pas de talent, de savoir-faire. Il sait piquer la curiosité du lecteur, et dans des chapitres courts, alternent les points de vue des chasseurs et des proies avec habileté et un brin d'humour. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Je suis donc arrivée à un peu plus de la moitié du roman sans m'en rendre compte, bien accrochée, et assez épatée par la capacité de l'auteur à faire exister les personnages, y compris ceux des fugitifs qui tombent plus ou moins rapidement. McCarten a un joli talent pour donner de la chair à ses protagonistes. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Mais il faut bien le reconnaître, jusque là, tout en trouvant ma lecture fort plaisante, j'aurais pu l'interrompre sans me sentir frustrée. Et puis il y a un plot-twist. Oh! pas un de ces retournements comme je les exècre, dans ce que je considère comme de mauvais thrillers. Non, un truc que je n'avais pas vu venir, mais alors pas du tout, et qui m'a empêchée de lâcher le roman ensuite. Jusque là c'était du beau travail, mais à partir de ce coup de théâtre, le roman prend une autre dimension. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">L'interrogation du roman (quel prix est-on prêts à payer pour préserver notre sécurité?) se fait plus subtile mais aussi plus aigüe, et insuffle assez de noirceur au récit et à son dénouement pour contrebalancer l'effet thriller, avec ses aspects idéologiques parfois un peu rances. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Je me demandais comment l'auteur allait se dépêtrer de la mécanique qu'il avait enclenchée, comment il allait éviter le simplisme que d'autres auraient adopté sans hésiter pour livrer une fin propre et rassurante. Et il s'en tire très bien, sans manichéisme, sans angélisme, sans naïveté, avec une porte entrouverte sur juste ce qu'il faut d'espoir. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">McCarten est presque un vieux routier au vu de son pedigree : même s'il vit à Londres et Los Angeles, d'après sa fiche Wikipédia en tout cas, le fait qu'il soit néo-zélandais n'est pas anodin. Comprenez qu'il n'est pas américain, et je crois que ça fait une différence. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Anthony McCarten, <i>Objectif Zéro</i> (<i>Going Zero</i>), Denoël, Sueurs froides, 2023. Traduit de l'anglais (Nouvelle Zélande) par Frédéric Brument.</span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-51017387176284961902023-12-15T08:59:00.000+01:002023-12-15T08:59:25.358+01:00LOTUS - Un inédit de Sébastien Raizer <p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiSPFdhBcqxxighe6mVXac18wis4eMLOoyHiDEDujs53ckNi42NNRd7jM4Of0WK3lFxC-mXFSr8NwHxHUn1J5PJOk10WjkK-u8Y3N8PazJNOIBhwRztakMPfPIMovZYxvbKGO5tiB_Byyvpoq-ZiP5q-icek4_6YqUtQ-rRV2AAXuUHckb18wZL5bffyQCV/s2362/386892234_883826376372979_5507719220339930686_n.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1365" data-original-width="2362" height="231" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiSPFdhBcqxxighe6mVXac18wis4eMLOoyHiDEDujs53ckNi42NNRd7jM4Of0WK3lFxC-mXFSr8NwHxHUn1J5PJOk10WjkK-u8Y3N8PazJNOIBhwRztakMPfPIMovZYxvbKGO5tiB_Byyvpoq-ZiP5q-icek4_6YqUtQ-rRV2AAXuUHckb18wZL5bffyQCV/w400-h231/386892234_883826376372979_5507719220339930686_n.jpg" width="400" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Sébastien Raizer, vous le savez, fait partie à mes yeux des auteurs de roman noir les plus importants et les plus singuliers. Avec <i><a href="https://tashasbooks.blogspot.com/2023/09/terres-noires-de-sebastien-raizer.html?fbclid=IwAR3vRJPBUrp7NzoELSEp43Vs2EON6PlPcVKEdcGegzGwlY7s2-V0qDyq-hc" target="_blank">Terres noires</a></i> (2023), il vient de clore une trilogie, inaugurée avec <i><a href="https://tashasbooks.blogspot.com/2020/10/les-nuits-rouges-de-sebastien-raizer.html" target="_blank">Les Nuits rouges</a></i> en 2020, poursuivie avec <i><a href="https://tashasbooks.blogspot.com/2022/05/mecanique-mort-de-sebastien-raizer.html" target="_blank">Mécanique mort</a></i> en 2022, le tout en Série Noire (Gallimard). </span></p><p><span style="font-family: verdana;">La puissance de sa vision, la beauté de son écriture en font à mes yeux un auteur incontournable, et il nous fait l'amitié et l'honneur d'offrir un texte qui vient compléter la trilogie. Non, je ne me mets pas à parler à la première personne du pluriel par mégalomanie, mais parce que nous sommes quelques uns à qui il fait cet immense plaisir. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Voici donc <i>Lotus</i>, cadeau précieux à l'approche de Noël. Savourez, dégustez, c'est comme toujours un très grand cru. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce texte est la propriété intellectuelle de Sébastien Raizer et est donc soumis la législation sur les droits d'auteur.</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><a href="https://drive.google.com/file/d/1om8KGvr4j-3lZnIiSAILBPPq6Ec0OJnC/view?usp=sharing" target="_blank">Lotus de Sébastien Raizer @2023 Sébastien Raizer</a><br /></span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-27436282214678481712023-10-29T10:34:00.001+01:002023-10-29T10:34:17.016+01:00Le smoking des orques de Vincent Maillard<p><span style="font-family: verdana;"></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-family: verdana;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/a/AVvXsEj9EqppwG4wbvZlOnkkcHja1cm1gxYi_PAi3Z1Ic0NkDqeXgT8HHvKYkySAX0tGQHNBWGn3S5Uud1PMzTnYLCt4M6NsTo_2DQrfysIvRMJ2BGRAs0GQiDGO5ddBdhnUOSKa4XqMTFdccutZmT8hilrfJXx9-mcVEH0d8YuN17z5aLPISVpIMb0WeLo9IGHg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img alt="" data-original-height="450" data-original-width="296" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/a/AVvXsEj9EqppwG4wbvZlOnkkcHja1cm1gxYi_PAi3Z1Ic0NkDqeXgT8HHvKYkySAX0tGQHNBWGn3S5Uud1PMzTnYLCt4M6NsTo_2DQrfysIvRMJ2BGRAs0GQiDGO5ddBdhnUOSKa4XqMTFdccutZmT8hilrfJXx9-mcVEH0d8YuN17z5aLPISVpIMb0WeLo9IGHg=w263-h400" width="263" /></a></span></div><span style="font-family: verdana;"><br /><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p style="background-attachment: initial; background-clip: initial; background-image: initial; background-origin: initial; background-position: initial; background-repeat: initial; background-size: initial; border: 0px; box-sizing: border-box; font-size: 16px; margin: 0px 0px 15px; outline: 0px; padding: 0px; text-align: justify; vertical-align: top;"><span style="font-family: verdana;">Sébastien, documentariste en mal de projets, réussit à convaincre son producteur de l’envoyer à Nice en repérage pour un film sur les orques, ces prodigieux cétacés. Mais le spectacle auquel il assiste au parc aquatique Océland tourne au désastre lorsqu’une vieille orque entraîne son dresseur Ludo au fond de la piscine. La mort suspecte de ce dernier quelques jours plus tard à l’hôpital, alors qu’il est quasiment rétabli, ainsi que celle de son ami journaliste à <em style="background-attachment: initial; background-clip: initial; background-image: initial; background-origin: initial; background-position: initial; background-repeat: initial; background-size: initial; border: 0px; box-sizing: border-box; font-weight: inherit; margin: 0px; outline: 0px; padding: 0px; vertical-align: top;">La Provence</em> persuadent Sébastien qu’Océland baigne dans un milieu aussi saumâtre que l’eau de ses bassins. Depuis le couple qui dirige l’établissement jusqu’aux mafias de l’Est et du Proche-Orient, en passant par des rumeurs de sextapes dans le club de foot local : ça craint, c’est dangereux. Sébastien escomptait réaliser un film sur l’harmonie du vivant, le voilà emporté dans le tourbillon de la grande chasse d’eau des basses-fosses humaines.</span></p><div><br /></div><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Vous vous souvenez que j'ai découvert il y a peu, grâce à sa sortie en poche, Vincent Maillard (avec <i>L'os de Lebowski</i>, FOR-MI-DABLE)? Eh bien c'est à l'occasion d'Un aller-retour dans le noir à Pau que j'ai également constaté que l'auteur avait sorti, voici quelques mois (et sans doute quand le précédent est sorti en poche), un nouveau roman, <i>Le smoking des orques</i>. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Pour ma part, si j'ai visité nombre de zoos, dans lesquels se trouve parfois un espace de démonstration avec de gentils dauphins, je n'ai jamais vu un tel "spectacle" ni fichu les pieds dans les parcs aquatiques dont il est ici question. La raison est que c'est bourré d'enfants qui hurlent, mais passons. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Vincent Maillard nous offre avec Sébastien un de ses personnages un peu décalés, une sorte d'inadapté au milieu dans lequel il devrait pourtant trouver sa place, le monde de la télévision. Il projette de réaliser un documentaire sur les orques, et alors qu'il se rend dans un parc aquatique de la Côte d'azur pour prendre des contacts et commencer à construire son documentaire, un des soigneurs/animateurs du numéro des orques est "attaqué" par Bulko, en l'occurrence maintenu un peu trop longtemps sous l'eau et secoué comme un pantin par le splendide animal soudain incontrôlable. Deux morts suivront. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><i>Le smoking des orques</i> (titre superbe) est la quête sentimentale et existentielle d'un anti-héros qui ne parvient pas à jouer le jeu de son univers professionnel, superficiel, bling-bling, où la bêtise et l'argent règnent en maître. Et il est bien trop lucide et malin pour ne pas comprendre que la soudaine révolte de Bulko sent mauvais. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Si le roman n'est en rien un polar avec enquête et tout et tout, c'est bel et bien, à mon sens, un roman noir. Le prologue crée une attente (au sens de l'horizon d'attente) typique du roman noir, oriente d'emblée notre regard de lecteur. Il ne sera donc pas question d'une simple errance sentimentalo-existentielle, ni d'un roman naturaliste sur les orques, ou plutôt, ces deux aspects sont liés à un regard démystificateur, celui d'un roman noir sur une société et un monde politique corrompus, qui sacrifient sans l'ombre d'un scrupule l'équilibre d'un milieu naturel et des espèces qui l'habitent à leur intérêt (politique et surtout économique) personnel. <i>Le smoking des orques</i> est un roman noir parce qu'il soulève le tapis et nous montre les merdes qui sont planquées dessous, à partir d'un élément de rupture (des morts qui n'ont rien de naturel). Il le fait avec son héros mi-candide mi-désabusé, avec un propos solidement documenté (sur les orques, en particulier), et une fin ouverte qui m'a enchantée. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Et puis on retrouve ici le style caustique de Vincent Maillard, très (trop?) appuyé dans une première moitié du roman, son sens de la formule qui fait mouche ; ensuite le ton se fait plus doux-amer, et j'avoue que j'ai aimé la couleur que prend le roman lorsque Sébastien est à Vancouver. Il y a des passages superbes sur la beauté de ce milieu naturel, sans que l'on perde de vue l'auto-dérision du personnage. Mais elle passe en "moderato", en quelque sorte. Comme dans son précédent roman, il y a une forme de désespoir, un sens du tragique (oui oui, je trouve) qui me plaisent énormément, et qui font que Vincent Maillard est plus dans le noir que dans la "comédie policière". J'ai adoré également les passages intermédiaires où se font entendre les orques : si loin si proche...</span></p><p><span style="font-family: verdana;">En résumé : <i>Le smoking des orques</i>, superbe titre pour un roman à lire absolument, par un auteur qui a sa petite musique singulière dans le roman noir, le tout dans un grand format très très beau (oui je suis superficielle).</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Vincent Maillard, <i>Le smoking des orques,</i> Philippe Rey, 2023. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-62864279090541414612023-09-25T10:34:00.005+02:002023-09-25T10:34:58.558+02:00L'Echiquier de Jean-Philippe Toussaint<p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="background-color: white; caret-color: rgb(66, 66, 66); color: #424242; letter-spacing: 0.2px; text-align: justify;"></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhHyNAQfftPd0uYA266m6qEzW2CD0WhkAzbpwRVamYgEFsuugixwHRQaRUibPD9ww1uxOPqNuQpihb8QLSdqSbE8lncTN60RhBXOcpVgG-sgovMfP1GebvKQYUIYtoOkfLw-SsseEmucLaWi_NU7jqvNTLtuNjgGhm7i-XCfHdFcX9pQMkXHwaxmX6xshnw/s245/livre_moyen_9782707348852.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="245" data-original-width="178" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhHyNAQfftPd0uYA266m6qEzW2CD0WhkAzbpwRVamYgEFsuugixwHRQaRUibPD9ww1uxOPqNuQpihb8QLSdqSbE8lncTN60RhBXOcpVgG-sgovMfP1GebvKQYUIYtoOkfLw-SsseEmucLaWi_NU7jqvNTLtuNjgGhm7i-XCfHdFcX9pQMkXHwaxmX6xshnw/w291-h400/livre_moyen_9782707348852.jpg" width="291" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="background-color: white; caret-color: rgb(66, 66, 66); color: #424242; letter-spacing: 0.2px; text-align: justify;"><span style="font-family: verdana;">« Je voulais, écrit Jean-Philippe Toussaint, que ce livre traite autant des ouvertures que des fins de partie, je voulais que ce livre me raconte, m’invente, me recrée, m’établisse et me prolonge. Je voulais dire ma jeunesse et mon adolescence dans ce livre, je voulais débobiner, depuis ses origines, mes relations avec le jeu d’échecs, je voulais faire du jeu d’échecs le fil d’Ariane de ce livre et remonter ce fil jusqu’aux temps les plus reculés de mon enfance, je voulais qu’il y ait soixante-quatre chapitres dans ce livre, comme les soixante-quatre cases d’un échiquier. »</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><span style="font-family: verdana;"><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0); white-space-collapse: preserve;">Jean-Philippe Toussaint et moi, c'est une vieille histoire : pas autant que Modiano, mais tout de même. J'ai commencé à le lire en 1997, lorsqu'est sorti <i>La Télévision</i>, et j'ai depuis lu presque tous ses livres. Comme j'attendais que ma librairie préférée reçoive de nouveaux exemplaires de <i>L'Echiquier</i>, j'ai relu <i>La Salle de bain</i> pour patienter. Et j'ai enchaîné ce week-end avec ce nouvel opus, que je suis allée acheter samedi. Je ne saurais dire pourquoi j'aime cet auteur, mais le fait est : sa délicatesse, son auto-dérision, son sens de la Beauté, le rythme de ses récits et de ses phrases, tout me séduit. </span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0); white-space-collapse: preserve;">Avec <i>L'Echiquier</i>, Toussaint livre en 64 chapitres - comme le nombre de cases sur l'échiquier - une introspection, une promenade autobiographique dans laquelle se mêlent souvenirs fondateurs et réflexions sur l'écriture. Dans cet autoportrait de l'auteur, il y a une sorte de contrainte - 64 chapitres, jamais deux fois la même "case" - et pourtant, le récit semble totalement libre, fonctionnant par associations, ellipses, bifurcations. </span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0); white-space-collapse: preserve;">Vous allez dire que c'est une obsession, mais je lui ai trouvé des accents furieusement modianesques, à cet <i>Echiquier</i>, lorsqu'est évoqué cet ami de pensionnat, disparu d'une façon mystérieuse, lui dont la vie entière était nimbée de mystère... Et puis il y a Gilles Andruet, ami d'enfant aussi, reparu, disparu, mort tragiquement. </span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0); white-space-collapse: preserve;"><i>L'Echiquier</i> évoque la figure du père de l'auteur, et les appartements dans lesquels Toussaint a vécu au fil des ans, ou qu'il a fréquentés. En relisant <i>La Salle de bain</i>, j'ai d'ailleurs été frappée par l'importance des lieux de vie, de l'appartement, justement. </span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0); white-space-collapse: preserve;"><i>L'Echiquier</i> est plein de ces ombres, père, amis, lieux, qui font une vie, qui sont comme des fantômes qui peuplent l'esprit de l'auteur quand la vieillesse se profile, fantômes qui se font plus présents lorsque la pandémie survient, et avec elle, la suspension de toutes activités sociales et professionnelles, ou presque. </span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0); white-space-collapse: preserve;">Et tout au long du récit, la réflexion sur l'écriture, la fiction, le rapport au réel, le jeu : les grands joueurs d'échec du XXème siècle, Nabokov, Zweig, sont autant de fantômes qui parcourent ces pages, donnant au texte une profondeur émotionnelle qui va bien au-delà d'une écriture à contrainte. </span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0); white-space-collapse: preserve;"><i>L'Echiquier</i> est sans doute plus sombre, ou plus mélancolique que d'autres textes de l'auteur, mais une fois encore, quelle beauté, quelle grâce!</span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0); white-space-collapse: preserve;">Voilà, vous le savez maintenant, Jean-Philippe Toussaint fait partie de mon petit panthéon personnel. </span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /></span><p><span style="font-family: verdana;"><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0); white-space-collapse: preserve;">Jean-Philippe Toussaint, <i>L'Echiquier</i>, Editions de Minuit, 2023.</span> </span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-24533896379833629482023-09-19T08:49:00.005+02:002023-09-19T08:49:54.873+02:00Bonhomme d'Yvan Robin<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj0A6MUhCjcV8NDWJPFP8MkBCC79clSxk2hmOg7i2G4hxWM8Dw6oBcm1W1Vi8MC61lbFWZ0KLsTrUpnDzkix22-uLhBrKNp3lxWQevcKAkQ-Suyh99zzcyZWA1mWR36iJ_fChfvVAUlQIcVpz8YZMICGZRmJEJGSubWNuUjcaNDpR4sUNlmv7iYhVstwZgW/s599/Bonhomme.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="599" data-original-width="400" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj0A6MUhCjcV8NDWJPFP8MkBCC79clSxk2hmOg7i2G4hxWM8Dw6oBcm1W1Vi8MC61lbFWZ0KLsTrUpnDzkix22-uLhBrKNp3lxWQevcKAkQ-Suyh99zzcyZWA1mWR36iJ_fChfvVAUlQIcVpz8YZMICGZRmJEJGSubWNuUjcaNDpR4sUNlmv7iYhVstwZgW/w268-h400/Bonhomme.jpg" width="268" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="background-color: white; color: #1d2c54;">C'est l'été. Milo vient chez ses grands-parents, comme chaque année, tranquille. Il a ses habitudes. La maison est petite mais agréable, le jardin donne de juteuses tomates, et l'ado passe ses journées à la piscine municipale avec ses copains, Tom, Shen, Louise, Farah, et surtout Justine.</span><br style="background-color: white; box-sizing: border-box; color: #1d2c54;" /><span style="background-color: white; color: #1d2c54;">Sauf que l'ambiance est étrange, cette fois, car voilà un an que son grandpère a disparu sans laisser d'adresse. Parti. Volatilisé. Et si Milo peut désormais emprunter sa moto pour rompre le tête-à-tête avec sa grandmère, cette absence pèse dans la chaleur de juillet.</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Vous souvenez-vous de vos étés, chez vous ou dans une maison familiale, quand le temps s'étirait? Vous rappelez-vous ces journées passées à la piscine avec les potes? Il y a dans cette novella d'Yvan Robin une capacité à capter ces instants d'adolescence, ces sensations, ces émotions et les premiers émois, comme on dit, qui permettent à <i>Bonhomme</i> de toucher bien au-delà du public de la collection (les adolescents). C'est une adolescence d'aujourd'hui, mais vue avec la tendresse d'un auteur qui n'est plus un ado. Rien de caricatural chez ses personnages, pas de cliché sur les rivalités amoureuses. C'est déjà beaucoup, et suffisant pour prendre plaisir à lire <i>Bonhomme</i>. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Mais nous sommes aussi dans la collection Faction, qui non seulement se refuse à toute caricature d'adolescent ou de littérature pour ado, mais qui n'oublie pas de saisir le "social", dans des romans noirs qui prennent position dans le monde. Et le titre <i>Bonhomme</i> met sur la piste. Milo est à un âge où se construit son identité (elle ne cessera d'évoluer mais c'est tout de même un moment crucial), et il a tendance à idéaliser son grand-père, surnommé Giant Joe, ancien boxeur, qui s'est volatilisé un an plus tôt. Fuite? Suicide? Meurtre? Le zigue était coureur de jupon, sûr de sa virilité, un "bonhomme", quoi. Tout est donc possible avec lui.</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Milo va se mettre en tête d'en savoir un peu plus, mais attention, hein, on n'est pas dans le club des cinq, il n'enrôle pas ses copains dans sa quête, il observe, fouille un peu dans le grenier, et fait des découvertes inattendues, qui vont remettre en question sa vision des choses. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><i>Bonhomme</i> est, en dépit ou peut-être à cause de son titre, un beau roman sur les femmes et les relations entre hommes et femmes. Il y a Justine, la jolie Justine qui trouble Milo, et que pour cette relation-là, Yvan Robin évite tous les pièges. C'est une amitié et un amour d'adolescents, dans tout ce que cela peut avoir de fougueux et de simple à la fois, et jamais Milo ne surjoue la virilité, ni Justine une féminité de pacotille. Et puis il y a Mamette, la grand-mère : un bonheur de personnage, qui touche au coeur alors qu'elle semble un peu en retrait. Mais en réalité, elle est au centre de tout. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><i>Bonhomme</i> évite donc les pièges mais reprend le motif de l'initiation, de l'été où tout change (et en même temps rien ne change, on n'est pas dans un roman d'opérette). C'est un bijou de plus dans l'épatante collection Faction, à lire sans modération, même quand on a passé l'âge. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Yvan Robin, <i>Bonhomme</i>, In8 Faction, 2023.</span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-72793757426411812442023-09-16T08:05:00.003+02:002023-09-16T08:05:32.683+02:00Terres noires de Sébastien Raizer<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjB3hZiN8RxhS9x04W0hLnL_9I0XBnz_0wNkKTfhqaEuM9rgAIPJhXprarSslm73OZP6X9Yecdmcp27-Y4fhKCtiRHtgUHvM9UDn8J5-lMjhpST0TbrTIvW4B_0zuz4_AN9FnoUO8J5-PIvPBxaOLz7hq013MStSRwXiD1typCLjnVAFlGC27sGj0C1Bt8Z/s2421/G07995.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2421" data-original-width="1653" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjB3hZiN8RxhS9x04W0hLnL_9I0XBnz_0wNkKTfhqaEuM9rgAIPJhXprarSslm73OZP6X9Yecdmcp27-Y4fhKCtiRHtgUHvM9UDn8J5-lMjhpST0TbrTIvW4B_0zuz4_AN9FnoUO8J5-PIvPBxaOLz7hq013MStSRwXiD1typCLjnVAFlGC27sGj0C1Bt8Z/w273-h400/G07995.jpg" width="273" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="background-color: white; color: #343434;">Sur le point de quitter l’Europe, Dimitri Gallois et Luna Yamada sont victimes d’un règlement de compte sanglant. Mafia serbe, armée privée américaine, groupe bancaire basé au Luxembourg : la véritable cible de cette collusion toxique est Santo Serra, à la tête d’une branche stratégique de la ‘Ndrangheta, et c’est avec lui que Dimitri et Luna vont tenter de briser l’engrenage mortel qui les happe.</span><br style="background-color: white; color: #343434;" /><span style="background-color: white; color: #343434;">Lorsque l’horizon semble s’éclaircir, Luna disparaît au cours d’une embuscade. Pour la retrouver, Dimitri va fouler les terres les plus noires de la sauvagerie et de la folie contemporaines.</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;"><i>Terres noires</i> est le volume conclusif d’une trilogie, et quelle conclusion ! </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Nous retrouvons ici Dimitri, Luna, Nesrine, Keller, tous ceux que l’on a aimés. Le roman s’ouvre sur la promesse d’un départ, sur la possibilité d’accéder à « la vraie vie vivante ». Pour cela, il faut quitter l’Europe, s’arracher à l’anéantissement de « ce monde somnambule » qui poursuit « son inexorable errance vers la nuit, le feu et la mort ». Mais vous vous en doutez, ce ne sera pas simple. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;"><i>Terres noires</i> continue, après <i>Mécanique mort</i>, de montrer la source du chaos, de révéler les racines du Mal, et pour cela, il lui faut remonter au haut de la pyramide, là où se niche la promesse du néant. La finance, la banque, et vous n’aurez pas de mal à reconnaître la banque « réelle » qui ne se cache même pas : comme toujours, Sébastien Raizer mentionne ses sources. Elles sont nombreuses, elles sont disponibles, tout est clair à qui veut voir. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Autrement dit, Sébastien Raizer poursuit le changement d’échelle amorcé avec <i>Mécanique mort</i>, et il aborde la dernière phase de la destruction : après la crise (<i>Nuits rouges</i>), le crime (<i>Mécanique mort</i>), voici la guerre, totale, folle, inéluctable, dernière étape de la prédation capitaliste. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><blockquote><span style="font-family: verdana;">« Parce que la guerre est la nature fondamentale du capitalisme, système plus vérolé que la vérole elle-même. On nous demandera, dans l’absolu des siècles : « et vous faisiez partie de ce système ? », ou bien : « et vous souteniez et alimentiez ce système ? ». Alors, dans la sincérité de notre cœur, frères humains, que répondrons-nous ? » </span></blockquote></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Pour montrer les forces à l’œuvre, il introduit ici Santo Serra, chef de l’organisation criminelle, superbe personnage qui, comme Sébastien Raizer nous y habitués, est à la fois une force de chaos (la criminalité organisée) et une force d’équilibre. Face à nos personnages, Thomas Allen, à la tête de la grande société bancaire et financière prête à détruire le monde pour asseoir son empire, pure force de chaos et de destruction qui sème la mort dans l’entourage de Santo Serra, et qui n’hésite pas à faire de l’Europe et de la planète un enfer, littéralement, qui brûle, se consume. Parce que « la crise, le crime et la guerre sont profitables ».</span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">L’affrontement promet d’être sanglant. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;"><i>Terres noires</i> m’a semblé plus sombre (c’est vous dire) que les précédents volumes. Il y a des moments de délire presque réconfortants, et je vous laisse découvrir la mue de Midget. Mais l’heure n’est pas à l’échappée dans des instants de tendresse et d’humour. Ou plutôt, pour y accéder, il faut en passer par le trou noir de la destruction. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Dans la lignée de la lecture politique de <i>Mécanique mort</i>, <i>Terres noires</i> montre la dernière phase du cycle, celle de la guerre, de la destruction de toutes choses. A sa manière, il envisage l’apocalypse. Nihiliste, le roman affiche volontiers sa parenté avec Dostoïevski. Sébastien Raizer n’est ni un complotiste ni un fou, il livre une vision puissamment poétique et spirituelle, et la destruction ne débouche pas sur le néant, mais sur un autre possible. Et je ne révèle rien en vous disant que le dernier mot du roman est « vivantes ». Si <i>Terres noires</i> est plus sombre, il offre l’accès à la « vraie vie vivante » par un épilogue sidérant de beauté. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Dans la mort il y a de la vie, et inversement. Auprès de Gallois, marqué par la mort et la perte, il y a Luna. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Et toujours, ce sens du rythme, de l’intrigue, la force inouïe des personnages. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Avec <i>Terres noires,</i> Sébastien Raizer livre une « œuvre noire solaire », concluant magistralement sa trilogie européenne.</span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;"><br /></span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Sébastien Raizer, Terres noires, Gallimard, Série Noire, 2023.</span></div><p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-family: verdana;"><br /></span></div><span style="font-family: verdana;"><br /> </span><p></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-29977657241278566342023-09-12T21:29:00.003+02:002023-09-12T21:29:45.923+02:00Deux secondes d'air qui brûle de Diaty Diallo<div style="background-color: white; box-sizing: border-box; line-height: 1.6; margin: 0px 0px 1.25rem; padding: 0px; text-align: left; text-rendering: optimizelegibility;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiuYfy3oCU9NRiOrn31B5TDELiD9r98EaplnHAKTJMVh5qqOrZ_PPLQ0zcwmhXp0eWFHRFCqhjsTZVHo3qkvIulhsb8AyeZGdymDd8jBBdiDUXkp5uwqaKh6oVYSDzEpBO-s-2bOl834E-Q0BY-H09JpWbhWbWT3XqDFKDcUtlORpZ6ULd09wlNPyaLPS1D/s2000/152827_couverture_Hres_0.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2000" data-original-width="1214" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiuYfy3oCU9NRiOrn31B5TDELiD9r98EaplnHAKTJMVh5qqOrZ_PPLQ0zcwmhXp0eWFHRFCqhjsTZVHo3qkvIulhsb8AyeZGdymDd8jBBdiDUXkp5uwqaKh6oVYSDzEpBO-s-2bOl834E-Q0BY-H09JpWbhWbWT3XqDFKDcUtlORpZ6ULd09wlNPyaLPS1D/w242-h400/152827_couverture_Hres_0.jpg" width="242" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span></div><div style="background-color: white; box-sizing: border-box; line-height: 1.6; margin: 0px 0px 1.25rem; padding: 0px; text-align: left; text-rendering: optimizelegibility;"><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur (poche)<br /></span><span style="font-family: verdana;">Entre Paname et sa banlieue : un quartier, un parking, une friche, des toits, une dalle. Des coffres de voitures, chaises de camping, selles de motocross et rebords de fenêtres, pour se poser et observer le monde en train de se faire et de se défaire. Une pyramide, comme point de repère, au beau milieu de tout ça.<br /></span><span style="font-family: verdana;">Astor, Chérif, Issa, Demba, Nil et les autres se connaissent depuis toujours et partagent tout, petites aventures comme grands barbecues, en passant par le harcèlement policier qu'ils subissent quotidiennement.<br /></span><span style="font-family: verdana;">Un soir d'été, en marge d'une énième interpellation, l'un d'entre eux se fait abattre. Une goutte, un océan, de trop. Le soulèvement se prépare, méthodique, inattendu. Collectif.</span></div><div style="background-color: white; box-sizing: border-box; line-height: 1.6; margin: 0px 0px 1.25rem; padding: 0px; text-align: left; text-rendering: optimizelegibility;"><span style="font-family: verdana;"><br /></span><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense<br /></span><span style="font-family: verdana;">Diaty Diallo était invitée aux Ecrits d'août à Eymoutiers cette année, mais je ne pouvais m'y rendre ce jour-là. Je le regrette, mais au fond, le livre importe plus que cette rencontre. <br /></span><span style="font-family: verdana;"><i>Deux secondes d'air qui brûle</i> m'a d'abord séduite par son titre (vous savez combien je suis sensible aux titres), que je trouve magnifique. Le roman tout entier est incandescent. Il l'est dans sa dimension politique: Diaty Diallo livre, comme on a pu le lire partout à la sortie du roman, un portrait fin des "quartiers" et de leur jeunesse abandonnée par la France, par l'Etat. Elle saisit les rapports d'oppression et de domination, avec ces "hommes en bleu" qui de contrôle en contrôle, de rappel à l'ordre en interpellation, sont constamment dans un rapport de force inégal, et incarnent la violence systémique qui met toujours ces jeunes gens sur la brèche. Et cette dimension politique d'un roman de révolte n'est pas rien, comme le rappellent les remerciements et les hommages à ceux qui sont morts sous les coups ou les balles des forces de l'ordre. <i>Deux secondes d'air qui brûle</i> est une manière de tombeau (littéraire) à ces visages que nous avons vus sur nos écrans de télévision, un signe envoyé à ceux qui les ont connus et aimés. </span></div><div style="background-color: white; box-sizing: border-box; line-height: 1.6; margin: 0px 0px 1.25rem; padding: 0px; text-align: left; text-rendering: optimizelegibility;"><span style="font-family: verdana;">Mais Diaty Diallo n'est pas un porte-voix, elle est une voix, une voix littéraire, à mon avis de tout premier plan. Elle a une écriture sensible, qui restitue en quelques mots, en quelques phrases, une atmosphère, une lumière, des odeurs, des mouvements. Elle parvient à restituer quelque chose - du moins je le suppose - de l'inventivité linguistique des habitants de ces quartiers, du métissage, d'une langue urbaine. Elle lui rend une force poétique inouïe. Jamais elle n'est dans le folklore ou le pittoresque, puisqu'elle est dans la re-création littéraire, soutenue par un travail sur la syntaxe et le rythme. Parfois Diaty Diallo enchaîne, staccato, des phrases courtes, minimales, économes. Parfois elle travaille au contraire la longueur de phrases qui s'enroulent sur elles-mêmes, mêlant paroles rapportées, narration, paroles de morceaux de musique. </span></div><div style="background-color: white; box-sizing: border-box; line-height: 1.6; margin: 0px 0px 1.25rem; padding: 0px; text-align: left; text-rendering: optimizelegibility;"><span style="font-family: verdana;">Parce qu'elle est une autrice, elle ne s'englue pas dans le reportage de mauvais aloi. Elle a un talent incroyable pour dessiner ses personnages, et ils ne sont pas ces silhouettes à capuche, dépourvues de visage, que nous livrent en pâture les prétendus médias d'information. Elle n'esquive pas la tragédie, mais elle en fait un moment, l'étincelle terrible. Mais au fond, en dépit de la saine colère qui anime le texte et sans doute son autrice, elle livre avant tout un portrait incandescent de cette jeunesse dont personne ne veut. Et pourtant, ces jeunes garçons auxquels elle attache ses pas de romancières sont solaires, inventifs, drôles, déjà harassés d'ennui et de résignation. Mention spéciale pour l'extravagant Nil, le génial chaudronnier à la verve incroyable, à l'énergie bien barrée. <br /></span><span style="font-family: verdana;">C'est sans doute ce qui m'a le plus frappée et bouleversée dans ce roman : ces moments où ces enfants, ces adolescents, ces jeunes adultes, investissent un espace, se l'approprient. Les corps exultent, comme dirait l'autre. Deux secondes d'air qui brûle est un magnifique roman sur l'adolescence - et aussi sur l'enfance. La joie pure, le désir, le plaisir d'être là, ensemble ou seul, de sentir et de se sentir vivant, la capacité à s'emparer du moment, rien de plus. <br /></span><span style="font-family: verdana;">Je pourrais multiplier les exemples de passages qui m'ont tourneboulée, mais je n'en évoquerai que deux, assez rapprochés dans le texte, d'ailleurs. <br /></span><span style="font-family: verdana;">Le premier est celui où Diaty Diallo parle de la halle du "zéro" (lisez, vous comprendrez), investie et transfigurée par les jeux d'enfants : le pouvoir de l'imagination, des histoires et des jeux, c'est superbe. Parce que oui, bonnes et mauvaises gens que nous sommes, nous avons tendance à oublier que dans ces non-lieux ("un lieu sans en être un"), des êtres vivent, aiment, rient, jouent. Et ces enfants font de la "halle" une salle de bal, un lieu de fête où l'on peut entonner du Piaf jusqu'à s'évanouir. <br /></span><span style="font-family: verdana;">Le second est le moment où avant l'embrasement final, tout le quartier se réunit pour un repas et une fête à ciel ouvert, hommage ultime à Samy. Et croyez ce que vous voulez, BFM et Valeurs actuelles si ça vous chante, mais cette scène, aussi paroxystique soit-elle, m'a rappelé des récits, des évocations de moments bien réels, dans ces "quartiers". Les enfants qui courent partout, le visage luisant de gras, les vieux assis tranquillement : "Manger, c'est vraiment la douceur". <br /></span><span style="font-family: verdana;">Le final est éblouissant, suspendu, définitif, tout à la fois. Pour ces <i>Deux secondes d'air qui brûle</i>, ça valait la peine. </span></div><div style="background-color: white; box-sizing: border-box; line-height: 1.6; margin: 0px 0px 1.25rem; padding: 0px; text-align: left; text-rendering: optimizelegibility;"><span style="font-family: verdana;"> </span><span style="font-family: verdana;"><br /></span><span style="font-family: verdana;">Diaty Diallo, <i>Deux secondes d'air qui brûle</i>, Points, 2023. Initialement paru au Seuil, en 2022. </span></div>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-68114796817040156612023-09-12T20:46:00.003+02:002023-09-12T20:48:49.242+02:00La Situation de Karim Miské<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi6Q01MI0Is0O9P8qFNgkfPVuumBphnydyQ4d4rwCyVTBQlAAe6F-ermYiFPKvfSehEg_iUegcfOViQY8TDopVYqKgnlLp71MuJ8F7UMR120t8g_E9uOGeLU2WzxR2amVaADJz7ZRCKTNWHEPw8wQV9bsK9oMrVoTXjf9lmc1yv-PJUmoftQIYRKosp5Ucb/s1500/917x6xejpJL._SL1500_.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1500" data-original-width="1013" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi6Q01MI0Is0O9P8qFNgkfPVuumBphnydyQ4d4rwCyVTBQlAAe6F-ermYiFPKvfSehEg_iUegcfOViQY8TDopVYqKgnlLp71MuJ8F7UMR120t8g_E9uOGeLU2WzxR2amVaADJz7ZRCKTNWHEPw8wQV9bsK9oMrVoTXjf9lmc1yv-PJUmoftQIYRKosp5Ucb/w270-h400/917x6xejpJL._SL1500_.jpg" width="270" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="background-color: white;">France 2030. Kamel Kassim vit dans le quartier de Belleville et depuis trois mois, des affrontements entre coalition de gauche et milice d’extrême droite embrasent Paris et sa banlieue. Pour préserver ce qu’il reste de ses idéaux, Kamel évite de sortir de chez lui. Jusqu’au jour où une attaque au pied de son immeuble l’oblige à s’impliquer. Il plonge alors dans la noirceur d’un pays fracturé : ses rouages politiques, ses intrigues sinistres. Ses ultimes zones d’humanité qui aident à espérer.</span><span class="Apple-converted-space" style="background-color: white; box-sizing: border-box;"> </span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Il y a des romans que l'on n'attend pas, mais qui continuent de vous habiter bien après leur lecture. J'associais le nom de Karim Miské au roman noir, à <i>Arab Jazz</i>, paru en 2012 chez Viviane Hamy. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">De fait, <i>La Situation</i> de Karim Miské (Les Avrils) est un roman noir, mais aussi un roman dystopique, (à peine), et également une histoire d'amour, quasiment une actualisation de Roméo et Juliette. Je l'ai lu cet été, et les soulèvements à la suite de la mort du jeune homme à Nanterre, avec la violente répression qui s'en est suivie, résonnaient très fort avec ma lecture.</span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Si je dis que c'est à peine une dystopie, c'est justement parce que le récit nous tend le miroir de ce qui nous attend. <a style="cursor: pointer;" tabindex="-1"></a>J'allais ajouter "si nous n'y prenons garde", mais mon pessimisme m'en empêche. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Néanmoins il serait réducteur de considérer que l'auteur joue les Cassandre et rien d'autre. Il fait avant tout oeuvre de fiction, avec des personnages très bien dessinés, et une construction implacable. Il maîtrise les codes des genres qu'il aborde, sans faire le mariole, sans surjouer la virtuosité. Ses personnages ne sont pas des types sociologiques, ils sont des êtres de chair et de sang. Enfin, si je peux dire, parlant d'êtres de papier... </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">J'ai frémi avec eux, et j'ai frémi pour nous. Je ne voudrais pas, vraiment pas, que nos futures années soient conformes à cette <i>Situation</i>, que Karim Miské ait manqué d'imagination, en somme. Tout est si... plausible, dans ce portrait politique de la France de 2030. </span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;"><br /></span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); white-space-collapse: preserve;"><span style="font-family: verdana;">Karim Miské, <i>La Situation</i>, Les Avrils, 2023.</span></div><div dir="auto" style="caret-color: rgb(5, 5, 5); color: #050505; font-family: system-ui, -apple-system, BlinkMacSystemFont, ".SFNSText-Regular", sans-serif; font-size: 15px; white-space-collapse: preserve;"><br /></div>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-43084289367865060022023-08-16T13:26:00.004+02:002023-08-16T13:26:40.125+02:00Okavango de Caryl Férey<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBrv8bYsmSAEyg3wl3oEDD6GDa5nA7H5Uv4pZ3xFJy7r3QrJmPghFUwVo5f7XsAsCMOOKPgwuaZnu5hajwZ7fnx6cBO0GkRnErfyLm1A5Luv-DSefGszxm0vgC89LjTyCqtgwRTP2PJ0-3yTXfwPA8CGbxZC-1fBQKl3PMaRC2o8cPtBHn3drefyiTCLd1/s2421/G05382.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2421" data-original-width="1653" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBrv8bYsmSAEyg3wl3oEDD6GDa5nA7H5Uv4pZ3xFJy7r3QrJmPghFUwVo5f7XsAsCMOOKPgwuaZnu5hajwZ7fnx6cBO0GkRnErfyLm1A5Luv-DSefGszxm0vgC89LjTyCqtgwRTP2PJ0-3yTXfwPA8CGbxZC-1fBQKl3PMaRC2o8cPtBHn3drefyiTCLd1/w273-h400/G05382.jpg" width="273" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;">Engagée avec ferveur dans la lutte antibraconnage, la ranger Solanah Betwase a la triste habitude de côtoyer des cadavres et des corps d'animaux mutilés.</span><br style="caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;" /><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;">Aussi, lorsqu'un jeune homme est retrouvé mort en plein cœur de Wild Bunch, une réserve animalière à la frontière namibienne, elle sait que son enquête va lui donner du fil à retordre. D'autant que John Latham, le propriétaire de la réserve, se révèle vite être un personnage complexe. Ami ou ennemi ?</span><br style="caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;" /><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;">Solanah va devoir frayer avec ses doutes et une très mauvaise nouvelle : le Scorpion, le pire braconnier du continent, est de retour sur son territoire...</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Il y a dans ce nouveau roman noir de Caryl Férey tout ce qui fait la force du genre : une intrigue impeccablement construite qui captive le lecteur, un regard plein d'humanité et d'empathie, une vision politique et sociale. Alors embarquez!</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Jamais Caryl Férey n'est lourdement didactique. C'est un des tours de force du roman : il nous apprend énormément de choses, sur la Namibie et les pays alentour, sur les animaux, sur la colonisation, sur les populations diverses qui peuplent tous ces territoires, sur la mondialisation, sur la logique de marché qui entretient le trafic, sur la société namibienne. Et là vous vous dites : bigre! ça en fait des choses, ça doit être indigeste. Eh bien pas du tout, pas une page de trop, pas un paragraphe lourdingue. Caryl Férey est un romancier aguerri, et si l'on mesure le travail qu'il faut pour arriver à une telle fluidité, on se doit de saluer son savoir-faire. Que les éléments de compréhension passent par le récit même ou les dialogues, ils surviennent en tout cas "naturellement". </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Il y a plus : <i>Okavango</i> montre que tout cela est lié. Le colonialisme a non seulement laissé des traces, mais il revêt de nouveaux visages, donnant lieu à de nouvelles guerres. Poids de l'Histoire et rapports de domination très actuels se conjuguent, cruellement, tragiquement. Tout est affaire de domination d'ailleurs: des peuples européens sur les peuples africains, des puissances économiques d'aujourd'hui sur les populations locales, des hommes sur les femmes, des êtres humains sur les animaux. Volonté de puissance, de profit : la plaie sempiternelle. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Face à cela, des figures fortes : Solanah, la ranger magnifique du roman, une femme droite dans ses godasses, qui a fait des choix peu conventionnels dans son pays. Vibrante de colère, troublée par ses propres désirs, loyale : elle incarne un contre-pouvoir salutaire à la saloperie. Priti est une jeune femme libre, solaire, qui a la fougue de la jeunesse. J'ai un faible pour ce personnage, sa vivacité, sa rapidité, son humour. Les femmes ne sont pas bien traitées par les hommes sûrs de leur bon droit. Et Caryl Férey est - toujours - du côté des femmes, sans mièvrerie ni paternalisme.</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Il y a Seth, aux côtés de ces deux femmes, que vous allez adorer aussi. Et puis il y a John, ambigu, nimbé de mystère, un personnage follement romanesque, dont la rédemption ne peut qu'aller de pair avec la tragédie. Il y a N/Koï, qui nous donne des clés de compréhension sur son peuple. Il est l'ami fidèle de John, présent quoi qu'il arrive. Je ne vous donne là qu'un aperçu de la galerie des personnages. Tous animent ce récit de bout en bout, tous portent quelque chose de la société dépeinte, de sa folie, de sa démesure, de ses espoirs aussi. Les 500 pages et quelques se dévorent, parce que Caryl Férey s'y entend pour construire un solide récit, pour insuffler du souffle à l'intrigue. On vibre, on a peur (pour les personnages), on rit, on est bousculé, on est bouleversé. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Et puis il y a les animaux, personnages majeurs de ce roman. Il y a des scènes bouleversantes d'amour, ou de cruauté, d'ailleurs. Caryl Férey brosse des portraits saisissants et nous offre des passages d'une beauté infinie, d'une grâce... Il y a ces moments où les animaux paient le prix de la cupidité humaine, ou de leur pure cruauté. La scène fondatrice de la "conversion" de John est terrible, traitée comme une scène de guerre, massacre d'une violence inouïe et insoutenable. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce roman n'est pas rassurant, il faudrait être fou pour se sentir rassuré devant l'ampleur du désastre, mais Caryl Férey parvient à insuffler de l'espoir, à rendre justice à la beauté, que ce soit la beauté d'un homme ou d'une femme, la beauté d'un animal, et il croit à la tendresse, envers et contre tout, celle qui donne de l'épaisseur à ce que nous vivons, celle qui donne des moments d'empathie, de communion, de communication tout simplement, entre les êtres vivants (merde aux spécistes). C'est pourquoi on referme le roman bouleversé, mais pas dévasté. Au coeur des ténèbres, il y a malgré tout de l'amour. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Caryl Férey, <i>Okavango</i>, Gallimard, Série Noire, 2023.</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><br /></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-54673386640411295102023-08-02T11:07:00.004+02:002023-08-02T11:07:22.145+02:00Rue Mexico de Simone Buchholz<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiwSFl_P_PgMM4KYLphUYp_kEhRhRyTVORF3L6dATrKWr6m8cc8PbRpJzlShhxrQEL1CiogYWW7EygRtRg37CpiFUQEX1r9VUffWySFhxzP7heWe2AtCKCjGotjLatt559AEBC9eL_XXapI8RJoXXb3cdypKvCNxDZPdA2PqPLgv7FKh6DHbNsFY3gn93_6/s1000/41qRcGBZWsL._AC_UF1000,1000_QL80_.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1000" data-original-width="706" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiwSFl_P_PgMM4KYLphUYp_kEhRhRyTVORF3L6dATrKWr6m8cc8PbRpJzlShhxrQEL1CiogYWW7EygRtRg37CpiFUQEX1r9VUffWySFhxzP7heWe2AtCKCjGotjLatt559AEBC9eL_XXapI8RJoXXb3cdypKvCNxDZPdA2PqPLgv7FKh6DHbNsFY3gn93_6/w283-h400/41qRcGBZWsL._AC_UF1000,1000_QL80_.jpg" width="283" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="background-color: white; caret-color: rgb(15, 17, 17); color: #0f1111;"><span style="font-family: verdana;">Les gens qui habitent dans des ports gardent toujours espoir ". Des voitures brillent aux quatre coins du monde. A Hambourg également. Dans l'une d'elles, on retrouve le cadavre d'un fils du clan Saroukhan. Ces anciens mercenaires de l'Empire ottoman sont devenus de puissants trafiquants installés à Brème. Qui a tué Nouri Saroukhan ? La procureure Chastity Riley est de retour avec son collègue Ivo Stepanovic. Doivent-ils chercher la mystérieuse jeune femme qui observait la voiture du toit d'un immeuble ? La vérité se cache-t-elle au sein de l'entreprise d'assurances où Nouri travaillait et gagnait beaucoup d'argent ? Rue Mexico raconte comment deux jeunes, tels Roméo et Juliette, tentent d'échapper à leur milieu et à sa violence. De son côté, la vie de Chastity Riley est bouleversée par le retour d'un ancien amant...<span class="Apple-converted-space"> </span></span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0);">Je viens de terminer <i>Rue Mexico</i> de Simone Buchholz (L'Atalante, collection Fusion). J'en suis presque étourdie. C'est une merveille de roman noir, et je ne sais par quoi commencer.<span class="Apple-converted-space"> </span></span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0);">Il y a bien sûr le plaisir de retrouver les personnages, Chastity évidemment, mais les autres également. Oh comme je les aime! Ce sont de vrais personnages de noir, éprouvés, cabossés, mais ce ne sont jamais des caricatures du genre. On quitte un peu les lieux habituels, pour Brême, mais tout reste poisseux à souhait, et beau en même temps, d'une beauté littéraire, je veux dire que c'est le regard et l'écriture de l'autrice qui instillent de la beauté.<span class="Apple-converted-space"> </span></span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0);">Je ne sais si c'est moi (mon humeur) mais j'ai trouvé ce <i>Rue Mexico</i> encore plus sombre que les précédents, en tout cas moins tempéré par des touches d'humour. Sans doute est-ce parce que l'intrigue se prête moins à la dérision. S'y déploie toute la puissance de Simone Buchholz, un portrait sans concession de nos sociétés désagrégées, profondément minées par des saloperies diverses. Il n'y a aucun manichéisme, aucun angélisme, et pourtant, une humanité, une capacité à entendre les souffrances... Comme l'équipe de Chastity et Ivo, on est soufflés devant l'impensable, l'inacceptable. La rage nous prend, un sentiment d'impuissance aussi. Nouri, Aliza, deux victimes de la criminalité, une criminalité qui n'a pas du tout le même visage mais finalement, les mêmes méthodes, les mêmes façons de liquider les "menaces".<span class="Apple-converted-space"> </span></span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0);">Simone Buchholz nous parle de ce monde qui se consume, des gouffres qui se creusent sous nos pieds. Il y a ceux qui sont du bon côté de la barrière, apparemment, et qui jouissent, c'est-à-dire entrent dans la danse, agréent au système: on les croise dans les bars branchés, insouciants de tout. Il y a ceux qui ne sont pas du bon côté et s'emparent, violence en bandoulière, de ce à quoi ils aspirent : argent, femmes, dans une conception clanique terrifiante. Tous se rejoignent dans cet appétit de jouissance dégueulasse, dans la criminalité qui sous-tend le système.<span class="Apple-converted-space"> </span></span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0);">Entre les deux, il y a Nouri, Aliza, le Rote Flora (lisez le roman) et son alternative fragile et menacée. Et ça broie le coeur.<span class="Apple-converted-space"> </span></span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0);">Tout cela finira mal. Le roman est ponctué de la mention de ces voitures qui brûlent, dans la nuit des petites et grandes cités. Un avertissement.<span class="Apple-converted-space"> </span></span><br style="caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0);">Et puis il y a l'écriture de Simone Buchholz, sa façon de composer les chapitres, brefs, parfois très très brefs, comme des gifles, avec un sens de la chute inouï et assez rare. Pas de cliffhanger, on n'est pas dans un thriller. Et sa manière de composer des phrases, comme des poèmes en prose ou même en vers libres. C'est beau à pleurer.<span class="Apple-converted-space"> Je salue la traduction de Claudine Layre. </span></span></span></p><p><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0);"><span class="Apple-converted-space"><span style="font-family: verdana;"><br /></span></span></span></p><p><span style="caret-color: rgb(0, 0, 0);"><span class="Apple-converted-space"><span style="font-family: verdana;">Simone Buchholz, <i>Rue Mexico</i> (<i>Mexikoring</i>), L'Atalante, coll. Fusion, 2023. Traduit de l'allemand par Claudine Layre.</span></span></span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-11278108875088832732023-07-19T19:58:00.002+02:002023-07-19T19:58:40.110+02:00Monnaie bleue de Jérôme Leroy<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgV8JWUzrYTcNaWm2xUsHQqcRFb3wP1IjjIvYXFSG5jkyrezsguZI3UMmpmM31DPqGcyl6zUtAelP6AHu-5IWpsnEYrr7cT3zB913B2Oi0Yh_YhO20T_FoaFVko6D0w5xZY9V91q2MqK8MRSTUV_iapQ7BFFs6Tv7maEYmY3oB833NjwDmux3MS7lZ-0umA/s1000/81OHyesrVqL._AC_UF1000,1000_QL80_.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1000" data-original-width="620" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgV8JWUzrYTcNaWm2xUsHQqcRFb3wP1IjjIvYXFSG5jkyrezsguZI3UMmpmM31DPqGcyl6zUtAelP6AHu-5IWpsnEYrr7cT3zB913B2Oi0Yh_YhO20T_FoaFVko6D0w5xZY9V91q2MqK8MRSTUV_iapQ7BFFs6Tv7maEYmY3oB833NjwDmux3MS7lZ-0umA/w248-h400/81OHyesrVqL._AC_UF1000,1000_QL80_.jpg" width="248" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><i style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(0, 0, 0);">Monnaie bleue</i><span style="background-color: white; caret-color: rgb(0, 0, 0);"><span class="Apple-converted-space"> </span>est l'histoire secrète, violente et sombre de la France de la toute fin du vingtième siècle.<span class="Apple-converted-space"> </span></span><br style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="background-color: white; caret-color: rgb(0, 0, 0);">On assistera, dans ce roman noir, à la vie habituelle des proies et des cibles d'un ordre social d'autant plus impitoyable qu'il est menacé.<span class="Apple-converted-space"> </span></span><br style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(0, 0, 0);" /><span style="background-color: white; caret-color: rgb(0, 0, 0);">On assistera également aux manipulations, chantages</span><span style="background-color: white; caret-color: rgb(0, 0, 0);"><span class="Apple-converted-space"> </span></span><span class="details" style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(0, 0, 0);">et assassinats divers orchestrés par ceux qui veulent continuer à défendre l'indéfendable : polices parallèles, conseillers occultes et chiens de garde médiatiques.<span class="Apple-converted-space"> </span><br style="box-sizing: border-box;" />Mais il sera aussi et surtout question, ici, de vengeance, d'honneur et d'amour fou.</span></span></p><p><span class="details" style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(0, 0, 0); font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm;"><span style="font-family: verdana;">Il y a des livres qui résonnent étonnamment (ou pas, d’ailleurs) avec l’actualité. J’ai lu il y a peu de temps <i>Monnaie bleue</i> de Jérôme Leroy, avant que le pays ne s’embrase à nouveau. L’idée que le roman noir offre une saisie « en direct » de la société, du monde est à la fois juste et irritante. Irritante parce qu’elle conduit parfois – souvent – à oublier que les romans noirs sont avant tout des œuvres littéraires, à masquer la force de l’écriture derrière « l’universel reportage », faisant éventuellement des auteurs des pythies impuissantes ou au contraire investies du pouvoir de comprendre mieux que les autres : on en connait quelques-uns qui se sont retrouvés donneurs de leçons vite fait. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm;"><span style="font-family: verdana;">Il est cependant vrai que certains romans noirs, lus ou relus dix, vingt, trente ou quarante plus tard, voient plus loin que le bout de leur nez, et comme ces derniers mois, j’ai plongé le mien (de pif) dans de nombreux romans noirs et polars, je peux vous dire que j’en suis parfois restée bouche bée. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm;"><span style="font-family: verdana;">Mais revenons à <i>Monnaie Bleue</i>. Publié en 1997, il est de ceux-là. Et quand, il y a quelques semaines, ça a pété un peu partout, y compris dans des coins qui n’avaient rien, pensait-on sottement, de lieux inflammables, j’ai repris <i>Monnaie bleue</i>, je l’ai feuilleté, parcouru à nouveau. Jérôme Leroy y montre une folle intelligence des dérives dont on continue de voir les résultats. J’avais l’impression, en ces jours d’émeutes, qu’il me parlait de la France d’aujourd’hui, en direct. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm;"><span style="font-family: verdana;">Ce serait une raison suffisante de le lire ; et je continue de penser que nos politiques seraient bien inspirés de lire du roman noir (de lire tout court, d’ailleurs), peut-être qu’ils pigeraient mieux. Non, je rêve, je sais. Mais j’entends dire de telles imbécillités, des trucs tellement énormes que je me demande si les mecs sont vraiment hors-sol, totalement cons ou d’un cynisme absolu, et j’ai envie de leur envoyer une petite sélection de romans noirs. Histoire de bronzer moins con à Brégançon. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm;"><span style="font-family: verdana;">Je m’égare. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm;"><span style="font-family: verdana;">Il y a mille raisons de lire <i>Monnaie bleue</i> (et Jérôme Leroy en général) : sur fond de tragédie politique et sociale, de dystopie même plus dystopique, Jérôme Leroy livre aussi une superbe histoire d’amour, du moins ai-je lu le roman ainsi, un amour en forme d’impasse autant que d’accomplissement, et il n’y a jamais rien de mièvre ni de crade. C’est beau à tomber. Il y a quelque chose de romantique (dans le sens littéraire du terme) chez Leroy, une croyance désespérée en l’amour, la poésie, le sexe. Cela ne permet pas de surmonter la saloperie adverse, bien trop puissante, mais cela permet de rester digne, de se tenir hors de l’abjection. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm;"><span style="font-family: verdana;">N’allez pas croire que tout ça est pesant. Bon, c’est pas la marrade à toutes les pages, mais vous le savez, Jérôme Leroy ne manque pas d’humour, dans les clins d’œil, les références, et certaines scènes façon série B, folles et démesurées.<o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm;"><span style="font-family: verdana;">Et la fin, mes amis, la fin : une pure merveille de beauté tragique, dans une écriture presque blanche, sobre. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm;"><span style="font-family: verdana;">Lisez <i>Monnaie bleue</i> de Jérôme Leroy : ça vous déchire le cœur. <o:p></o:p></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm;"><span style="font-family: verdana;"> </span></p><p><span class="details" style="box-sizing: border-box; font-family: verdana;">Jérôme Leroy, <i>Monnaie bleue</i>, La Table Ronde, La Petite Vermillon, 2009 (1ère édition : 1997, éditions du Rocher)</span></p><span style="font-family: verdana;"><br /></span><br /><p></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-45116782172176185712023-07-14T11:37:00.003+02:002023-07-14T11:37:25.834+02:00Mai 67 de Thomas Cantaloube<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi67mAoGWaylqSuDP8QteNAC-LzMYAutHId2q28QMz8FI3zPDkOTA4JQeAkabPUszyWre5_OKUf7dYEPlmxAwhf-AH6oXqFFxGLopv5ghmhZ6MQwcpWxMWrwnBexC4NeTgnBfUUska6BJHvZmX1f2CqgQgls9T26ZqFtY6tewFVY748CABcFEYzzQbvjEzC/s2421/G06538.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2421" data-original-width="1653" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi67mAoGWaylqSuDP8QteNAC-LzMYAutHId2q28QMz8FI3zPDkOTA4JQeAkabPUszyWre5_OKUf7dYEPlmxAwhf-AH6oXqFFxGLopv5ghmhZ6MQwcpWxMWrwnBexC4NeTgnBfUUska6BJHvZmX1f2CqgQgls9T26ZqFtY6tewFVY748CABcFEYzzQbvjEzC/w273-h400/G06538.jpg" width="273" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;">Mai 1967, la Guadeloupe est sous pression. Une manifestation dégénère en une émeute sévèrement réprimée par la préfecture. Dans les jours qui suivent, les rumeurs évoquent des dizaines de morts, et de nombreux Guadeloupéens sont arrêtés et enfermés en métropole, avant d’être jugés pour sédition. Lucille, la compagne du journaliste Luc Blanchard, en fait partie.</span><br style="caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;" /><span style="background-color: white; caret-color: rgb(52, 52, 52); color: #343434;">Pour l’innocenter, Blanchard se lance dans une enquête qui le mène jusqu’aux plus hautes instances du gouvernement gaulliste. Et ses révélations sont un caillou de plus dans la chaussure d’édiles totalement dépassés par la colère contre un pouvoir qui cherche à étouffer les aspirations des populations d’outre-mer, mais aussi celles de la jeunesse qui descend dans la rue en mai 68.</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Thomas Cantaloube clôt avec <i>Mai 67 </i>sa trilogie sur la Vème République, qu'il saisit par des aspects méconnus parce que planqués sous le tapis par l'Histoire officielle. Il s'attache ici au soulèvement violemment réprimé de mai 67 en Guadeloupe, qui a fait l'objet d'une occultation claire et nette par le pouvoir, sur fond d'absence de bilan chiffré des victimes et d'archives disparues (comme c'est commode). C'est grâce à Luc Blanchard, son héros ex-flic et journaliste, et sa compagne Lucille, qu'il nous donne à voir cet évènement, entrelaçant avec brio histoire personnelle et histoire collective. D'une plume fluide et didactique, il m'a donné à comprendre des évènements que, je l'avoue, je ne connaissais pas. Thomas Cantaloube est précis mais jamais pesant, il travaille avec une connaissance documentée sur des évènements qu'il ordonne, sans jamais perdre de vue le propos de sa trilogie. Avec ses trois romans, il montre que la Vème République est le régime d'une décolonisation ratée et pourrie dans ses fondements, ne serait-ce que parce qu'elle est incapable d'affronter la vérité de la colonisation (on n'en est pas sortis). </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Et puis il y a le plaisir de retrouver les personnages de Thomas Cantaloube, Blanchard, Lucchesi et Volkstrom. Oserai-je le dire? Je les aime tous les trois, oui, même Volkstrom, pourtant peu recommandable. Thomas Cantaloube sait donner de l'épaisseur à ses personnages, ils ne sont pas des incarnations d'idées, ils sont des êtres dotés de leur histoire, de leurs contradictions, et de leurs valeurs, même si on ne les partage pas. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">On retrouve le talent de l'auteur dans des scènes de bravoure, des scènes d'anthologie, diraient certains : la scène de la manifestation qui tourne au bain de sang est menée avec virtuosité, et me reste en tête la savoureuse scène de Lucchesi qui en a soudain ras la casquette de ses clients richards insupportables et prend les mesures qui s'imposent. C'est le côté western de Thomas Cantaloube, et j'adore ça. Il excelle aussi dans l'évocation du procès et des conditions de détention, en métropole, de Lucille et de ses compagnons. La violence du système judiciaire, la déshumanisation des prévenus, le racisme structurel des institutions : tout y est, tout fait écho au présent.</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Intelligent, rythmé et fluide, <i>Mai 67</i> est à lire absolument, et j'ai hâte pour ma part de voir ce que Thomas Cantaloube nous réserve pour la suite. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Thomas Cantaloube, <i>Mai 67,</i> Gallimard, Série Noire, 2023.</span></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-24566848846717544402023-05-14T22:37:00.001+02:002023-05-14T22:37:24.217+02:00Le Mur de Marianne Peyronnet<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg9o1-FiCyEKqUKTztQZPTFolPJMKbgbRrVII5kFiwJ5OgDexI3z0oGyJLNyprYZLjtUOMzDrCBC3vUsQFXjcMFoLiSROYXKtipoYfG8PeXkRQva6l1R-DNGE8ZEuuaAmiKfKp8pFyrne6kiyejriDOz9AUHRz_0DntIfbOBX9UIat-uoTt0uJ57TS3fQ/s500/9782957202447-475x500-1.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="500" data-original-width="347" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg9o1-FiCyEKqUKTztQZPTFolPJMKbgbRrVII5kFiwJ5OgDexI3z0oGyJLNyprYZLjtUOMzDrCBC3vUsQFXjcMFoLiSROYXKtipoYfG8PeXkRQva6l1R-DNGE8ZEuuaAmiKfKp8pFyrne6kiyejriDOz9AUHRz_0DntIfbOBX9UIat-uoTt0uJ57TS3fQ/w278-h400/9782957202447-475x500-1.jpg" width="278" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p><span style="background-color: white; caret-color: rgb(68, 68, 68); color: #444444; white-space: pre-wrap;"><span style="font-family: verdana;">« Nous sommes l’utopie. Chacun une cellule du corps parfait de la Matrie. Chacun utile à son bon fonctionnement, indispensable par notre nombre et notre dévouement. Chacun à notre place, œuvrons à l’équilibre. Nous sommes l’écologie. Nous sommes la nature. Nous n’abusons pas de ses richesses. Nous sommes la sobriété. Notre vie ne compte que comme partie du tout. Nous en faisons don à l’ensemble, de notre premier cri à notre dernier soupir. »
Le jeune soldat au service de la Matrie répondant au nom d’Alb 3, troisième fils d’Alba Irina Viga Luane, est très fier de se voir affecté au Mur en tant que sentinelle. Il défendra le territoire des Matrides contre les assauts des Bêtes.
Mais, au cours de ce roman qui pose la question de notre humanité dans une société repliée sur elle-même, une rencontre va venir bouleverser ses certitudes, et Alb verra sa loyauté envers la Matrie s’effondrer, lorsque l’utopie se transformera en une inquiétante dystopie.</span></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Avant tout chose, sachez-le, je ne suis pas une grande lectrice de science-fiction, genre dans lequel on place habituellement la dystopie. En effet, vous vous en doutez : l'Utopie dont il est ici question est un régime qui s'est mis en place dans un monde post-apocalyptique, ou qui y ressemble, dans une enclave qui sert de refuge contre le reste du pays, en proie à une régression civilisationnelle sans précédent. La Matrie protège ses citoyens et leur offre un modèle collectiviste dans lequel chacun est au service de l'Etat et du bien commun. Et là, même si je ne vous livre pas les détails, que vous découvrirez vous-mêmes, vous sentez déjà que ça part en cacahuète.</span></p><p><span style="font-family: verdana;">J'ai ouvert ce roman sans rien en savoir, comme je le fais presque toujours. J'ai pensé pêle-mêle à <i>La servante écarlate</i>, au <i>Désert des tartares</i>, au <i>Rivage des Syrtes</i>. Ne vous fiez pas à la trame à première vue classique, et n'oubliez pas que Marianne Peyronnet s'est déjà illustrée avec talent dans le roman noir. <i>Le Mur</i> est donc d'une grande noirceur, et c'est tant mieux. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Et pourtant il y a dans ce roman quelque chose de lumineux. Je vous laisse découvrir le roman et je ne voudrais pas en raconter trop. Je ne sais pas si ce roman nous dit que l'humanité, tissée de rencontres, d'empathie et d'amour résiste à tout ou est menacée par des forces antagonistes bien plus puissantes. Mais il nous alerte sur nos peurs, sur la tentation du repli, il nous incite à toujours questionner les valeurs et les actes qu'on veut nous imposer. Pao, Satine et Bayé représentent cette humanité en nous, menacée, assiégée. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">L'écriture de Marianne Peyronnet, dans ce récit à la première personne, suit le cheminement de ce jeune homme, qui passe d'une obéissance sans mesure au régime nourricier à l'éveil d'une conscience. Pas de fioritures, pas de pathos, une écriture précise et sans chichis. Le récit n'en a que plus de force. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Marianne Peyronnet, <i>Le Mur</i>, Les éditions Relatives, 2023. Sortie le 15 mai.</span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><br /></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5068243275070348887.post-61429003547967279122023-04-28T15:58:00.003+02:002023-04-28T15:58:39.056+02:00Un conte parisien violent de Clément Milian<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7DbMhgs39NiheYydQB5HNdxgp8buGuY1hs8H7qeZRD5isfwn9gzTWwffzffiXGecQcze86JylriNTOjdqbasApoVr1jQwwLcc0A96vlAtV4wvgbcah9syVb3ympkgFfPXIuhPaXs0m1PcVxA-bhkMGwT0Jl3NujOVW44gmDTGdT5fGiXIuXYjoZlPng/s2338/81XLurdrfXL.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2338" data-original-width="1653" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7DbMhgs39NiheYydQB5HNdxgp8buGuY1hs8H7qeZRD5isfwn9gzTWwffzffiXGecQcze86JylriNTOjdqbasApoVr1jQwwLcc0A96vlAtV4wvgbcah9syVb3ympkgFfPXIuhPaXs0m1PcVxA-bhkMGwT0Jl3NujOVW44gmDTGdT5fGiXIuXYjoZlPng/w283-h400/81XLurdrfXL.jpg" width="283" /></a></div><br /><span style="font-family: verdana;"><br /></span><p></p><p><span style="font-family: verdana;">Présentation éditeur</span></p><p style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(31, 31, 31); margin-bottom: 1rem; margin-top: 0px;"><span style="box-sizing: border-box;"><span style="font-family: verdana;">« À quatorze ans, la gamine fascinait presque tous les zonards du quartier, qui l’appelaient Chewing-gum, comme elle semblait élastique à force de tomber sans jamais se faire mal. Ça lui plaisait d’avoir plusieurs noms : Gomme, Gamine, Sally, Salamandre, et puis Sal ou encore Salomé, tout à la fin de la liste. »</span></span></p><p style="box-sizing: border-box; caret-color: rgb(31, 31, 31); margin-bottom: 1rem; margin-top: 0px;"><span style="font-family: verdana;">Place Stalingrad, Paris, l’été.<br style="box-sizing: border-box;" />Salomé zone au milieu des clochards et des toxicomanes. Elle attend le retour de sa mère, disparue à New York. Son père flic ne semble pas inquiet. Sa soeur vit une histoire d’amour.</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce que j'en pense</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Clément Milian est de retour et son nouveau roman, <i>Un conte parisien violent</i>, est un concentré d'énergie et de noirceur. Salomé, alias Sal, Gamine, Chewing-gum, et j'en passe, est une ado de 14 ans livrée à elle-même, dont le territoire est Stalingrad à Paris, cour des miracles du XXIè siècle pour une Zazie d'aujourd'hui (mais celle-ci déteste le métro). Son père est flic et ne fait que passer dans un appartement également déserté par la mère, hôtesse de l'air habituée de fugues amoureuses qui laissent ses deux filles sans repère. Sal a une grande soeur, Rose, qui s'efforce de l'encadrer mais qui est très accaparée par son histoire d'amour avec Ben le gominé. Bref, Sal fait ce qu'elle veut, c'est-à-dire un peu n'importe quoi, et passe ses jours et même ses nuits parmi ses potes de Stalingrad.</span></p><p><span style="font-family: verdana;">Ce roman noir se dévore d'une traite, enchaîne les chapitres courts, parfois une phrase, quelques mots, aussi rapides et percutants que Sal, qui virevolte parmi les zombies avec une grâce folle. C'est l'été, et l'écriture de Clément Milian nous fait ressentir l'étouffement des jours et des nuits de canicule à Paris, la tension qui monte. Le royaume de Sal, c'est ce peuple de laissés-pour-compte, des êtres en marge et pour certains totalement fracassés. La lecture est constamment tendue, parce qu'à voir Sal évoluer parmi les ombres, on se doute, comme Rose, que ça va mal finir. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">Et puis c'est un conte, un conte noir, mais un conte, avec ses rites d'initiation et ses personnages : un ogre, une princesse solaire avec ses cheveux blonds, et à la fin un chevalier, bien fracassé mais un chevalier quand même, qui va se dresser comme un géant, empêchant l'acte interdit de se produire. C'est un conte contemporain, qui ne se déroule pas dans un château mais dans un coin de Paris qui représente bien ce qu'est cette ville aujourd'hui : un lieu tiraillé entre misère sociale et gentrification, où se côtoient sans presque se voir des jolies étudiantes et les plus miséreux. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">La force du roman et ce qui l'empêche de sombrer le moins du monde dans un misérabilisme angélique, c'est sa langue, la force de cette narration et des dialogues qui claquent, qui donne une puissance inouïe à ce portrait sur le vif d'une société déglinguée. </span></p><p><span style="font-family: verdana;">On savait que Clément Milian était un auteur formidable, il le confirme avec ce très beau roman noir. Rendez-vous service, lisez <i>Un conte parisien violent</i>. </span></p><p><span style="font-family: verdana;"><br /></span></p><p><span style="font-family: verdana;">Clément Milian, <i>Un conte parisien violent</i>, L'Atalante Fusion, 2023.</span></p><p><br /></p>Tasha Gennarohttp://www.blogger.com/profile/17059805036197583841noreply@blogger.com0